Guide des communes 2018
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LG<br />
BEST OF & GUIDE <strong>2018</strong><br />
49<br />
Ce qui m’amène à penser que le Parti<br />
Pirate est plus que Sven Clement. Au<br />
niveau national, il est toujours bon d’avoir<br />
quelques personnalités qui sortent du lot.<br />
Ce qui est notre cas avec nos quatre têtes<br />
de listes pour les législatives: Ben Allard au<br />
Nord, Daniel Frères à l’Est, Marc Goergen<br />
au Sud et moi-même au Centre.<br />
«Quand je pense que, nous autres<br />
citoyens qui ne demandons qu’à partager<br />
le savoir et la culture, les puissants et<br />
politiciens de tous poils ne cessent de<br />
nous traiter de Pirates…»; reconnaissezvous<br />
cette citation et peut-on penser que<br />
l’opposition qui y est faite est l’essence<br />
de votre parti?<br />
Elle appartient au Suédois, Rick Falkvinge,<br />
qui un peu éméché au soir du réveillon<br />
de 2006, lance le Parti Pirate. Ce n’est là<br />
qu’une composante seulement de notre<br />
parti politique. Il y fait aussi clairement<br />
allusion aux utilisateurs d’internet et aux<br />
politiciens qui n’y comprennent rien.<br />
Rappelez-vous de ce qui se disait sur l’affaire<br />
“Medicoleak” (ndlr: En janvier 2012, Sven<br />
Clement s’était introduit dans la base<br />
de données du service médicosportif du<br />
ministère <strong>des</strong> Sports où étaient stockées<br />
<strong>des</strong> informations médicales relatives à<br />
49.000 athlètes. Il a été condamné par<br />
la justice). Entre François Biltgen, alors<br />
ministre de la Justice qui parlait «de vol et<br />
de recel» dont la peine encourue va de 5 à 10<br />
ans et les 500 euros qui m’ont été infligés par<br />
le tribunal, on voit la marge…<br />
L’origine du parti prend source dans<br />
l’incompréhension politique du digital.<br />
Dans un monde qui évolue si vite, comment<br />
se fait-il que les politiques ne portent leurs<br />
fruits qu’au bout de 10 ou 15 ans et que<br />
nos systèmes électoraux archaïques ne<br />
permettent pas la participation citoyenne<br />
comme ils le devraient?<br />
C’est pourquoi les politiciens doivent<br />
comprendre ce sur quoi ils légifèrent et<br />
la Chambre <strong>des</strong> Députés devrait mieux<br />
représenter la société.<br />
“Plus de la moitié<br />
de l’électorat travaille<br />
pour l’Etat...”<br />
la xénophobie ou d’un quelconque rejet de<br />
l’autre. L’eurobaromètre de 2017 montre<br />
que 72% <strong>des</strong> Luxembourgeois pensent que<br />
l’immigration est une force pour le pays.<br />
Une minorité qui décide pour une<br />
majorité ou faire marcher la machine<br />
à naturaliser; est-ce là l’avenir de<br />
la population lorsque les étrangers<br />
résidents seront majoritaires?<br />
Je pense que c’est un vrai problème auquel<br />
nous n’avons pas une seule réponse. Brader<br />
la nationalité risquerait de provoquer<br />
un rejet et une ferme opposition <strong>des</strong><br />
Luxembourgeois. La naturalisation relève<br />
aussi de l’intime et du sentiment.<br />
Et si toutes les étu<strong>des</strong> montrent que la<br />
langue luxembourgeoise ne s’est jamais<br />
aussi bien portée, le sentiment de peur de<br />
ne plus pouvoir le parler dans son pays<br />
peut amener à un repli identitaire. Il est de<br />
la responsabilité du politique que de tenir<br />
compte <strong>des</strong> peurs et d’y répondre avec<br />
rationalisme.<br />
Les grands partis qui se sont emparés <strong>des</strong><br />
débats sur le référendum, sont les mêmes<br />
qui aujourd’hui reculent dans certains<br />
conseils communaux. Sous prétexte qu’un<br />
conseiller communal ne maîtrise pas assez<br />
bien le luxembourgeois, ils utilisent le<br />
français. À la peur <strong>des</strong> électeurs, cela risque<br />
d’ajouter de la colère.<br />
Le problème ne serait-il pas plus<br />
largement celui du candidat-fonctionnaire<br />
et du manque de représentation du<br />
secteur privé au sein de la classe politique<br />
toute entière?<br />
La classe politique est majoritairement<br />
composée de fonctionnaires et d’avocats<br />
et on peut y voir une déconnexion avec la<br />
réalité du terrain. Je ne me limite cependant<br />
pas à l’opposition public et privé car on peut<br />
être fonctionnaire et néanmoins proche de<br />
ce qui se fait dans le privé.<br />
Il ne faut pas oublier que plus de la moitié<br />
de l’électorat travaille pour l’Etat, une<br />
société étatique ou dépend de la caisse <strong>des</strong><br />
pensions. Il y a un donc un problème de<br />
démocratie dans le sens où la minorité qui<br />
génère la richesse dont profite la majorité<br />
<strong>des</strong> électeurs n’a pas de droit de vote au<br />
niveau national. Il faut donc trouver un<br />
moyen pour la représenter à la Chambre<br />
<strong>des</strong> Députés et cela pourrait commencer<br />
par <strong>des</strong> élus qui viendraient du secteur<br />
privé.<br />
Le droit de vote <strong>des</strong> résidents étrangers<br />
a échoué pour plusieurs raisons diverses<br />
mais dont aucune ne relève du racisme, de<br />
La loi du 24 février 1984 sur le régime <strong>des</strong><br />
langues est pourtant claire: «Lorsqu’une<br />
requête est rédigée en luxembourgeois, en<br />
français ou en allemand, l’administration<br />
doit se servir, dans la mesure du possible,<br />
pour sa réponse de la langue choisie par le<br />
requérant»…<br />
Force est de constater que cela n’est<br />
pourtant pas respecté pour les questions<br />
en luxembourgeois. Ce qui participe à la<br />
gronde générale <strong>des</strong> électeurs.<br />
L’idée de tout traduire en luxembourgeois,<br />
y compris le droit est une idée au mieux,<br />
dérisoire et au pire, complètement folle. Le<br />
multilinguisme fait partie intégrante de la<br />
culture de ce pays et il suffit de se plonger<br />
dans les archives nationales pour s’en rendre<br />
compte. Des premiers actes de naissance<br />
rédigés en français sous Napoléon, puis en<br />
allemand avec l’imprimerie, de nouveau<br />
en français après la Seconde Guerre<br />
mondiale et le formidable essor de la<br />
langue luxembourgeoise dans les années<br />
80, aujourd’hui le luxembourgeois est aussi<br />
vivant du monde digital et <strong>des</strong> milliers de<br />
sms, mails ou commentaires au quotidien. n