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AM-HS-SENEGAL

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INTERVIEW<br />

<strong>AM</strong> : Vous êtes en charge du PSE depuis un an.<br />

À votre arrivée, la phase 1 du plan était censée<br />

être terminée. Quel bilan peut-on en tirer ?<br />

Abdou Karim Fofana : Le PSE a été mis en place en 2014. Il<br />

apporte en premier lieu de la planification. Auparavant, nous<br />

fonctionnions avec des études prospectives sur vingt ans et<br />

des plans quinquennaux. Mais nous n’avions pas une véritable<br />

vision sur une génération. Le PSE procède par priorisations. Si<br />

nous voulons avoir un pays qui entre dans l’émergence, il faut<br />

transformer notre économie, mais aussi développer notre capital<br />

humain, encourager la solidarité, mieux préparer les générations<br />

futures aux défis du monde qui vient, et travailler sur la<br />

paix et la sécurité. Le PSE nous permet de disposer d’un plan<br />

global, qui ne parle pas seulement d’économie ou de croissance.<br />

Il parle de défis sociaux, de questions de sécurité, de soucis de<br />

bon voisinage. Il s’agit d’un plan global sur le long terme, sur un<br />

horizon de vingt ans (2014-2035). Et ce plan est séquencé. Tous<br />

les cinq ans, nous mettons en place un plan d’action prioritaire.<br />

Le premier était destiné à la transformation<br />

structurelle de l’économie. Pour y<br />

parvenir, nous avons dû régler le problème<br />

de nos capacités productives. Je<br />

vous donne un exemple : en 2012, le<br />

Sénégal, c’était 500 mégawatts de capacité<br />

de production d’électricité. On a<br />

connu en 2011 ce que l’on a appelé les<br />

« émeutes de l’électricité ». Il fallait agir<br />

vite pour que le pays puisse disposer<br />

d’électricité en quantité suffisante et<br />

qu’elle soit produite à un coût compétitif.<br />

Le président de la République a d’abord<br />

veillé au redressement des finances<br />

publiques. Nous avons mis le curseur<br />

sur les infrastructures et les capacités<br />

productives, pour faire en sorte que<br />

l’on produise davantage d’électricité à<br />

un prix plus raisonnable. Et puis, nous<br />

avons élargi la base de la croissance.<br />

Avant 2012, nous avions deux moteurs de croissance, le duo<br />

services financiers et télécommunications. Mais 60 % de notre<br />

population vit de l’agriculture. Dans la première phase du PSE,<br />

nous avons réussi à faire en sorte que notre agriculture produise<br />

plus et mieux. Pour l’arachide, qui représentait la base de nos<br />

productions, nous sommes passés de 400 000 tonnes à 1,8 million<br />

de tonnes. Pour le riz, que nous importions beaucoup, nous<br />

produisons aujourd’hui localement 1,3 million de tonnes, contre<br />

400 000 auparavant. Cela montre que les bases de notre croissance<br />

ont changé. Nous sommes passés de deux à six moteurs.<br />

Et la croissance du Sénégal entre 2011 et 2019-2020, avant la<br />

pandémie, a été multipliée par quatre. C’est ce que l’on attendait<br />

Malgré<br />

la pandémie,<br />

nous avons<br />

pu maintenir<br />

une croissance<br />

de 1,7 %,<br />

avec un déficit<br />

budgétaire assez<br />

soutenable.<br />

du PSE : changer la structure de notre économie. Remettre l’agriculture<br />

à l’honneur, ainsi que le tourisme, l’habitat…<br />

Quels ont été les nouveaux objectifs<br />

définis lors de votre arrivée ?<br />

Ce qui caractérise le PSE, c’est que l’on détermine des<br />

batailles clés pour construire un Sénégal à l’horizon 2035. Et<br />

quel pays souhaitons-nous en 2035 ? Nous voulons une société<br />

et une économie plus prospères. Une économie plus orientée<br />

vers les services et l’industrie. Une agriculture plus développée.<br />

Avec une productivité plus importante. Mais qu’allons-nous<br />

faire de cette croissance ? Il nous faut en premier lieu de l’équité<br />

territoriale. Il y avait des zones qui n’étaient pas sur la côte<br />

atlantique, mais qui avaient du mal à avoir les voies de communication<br />

nécessaires pour être connectées au reste du pays.<br />

Ainsi que des zones où l’eau et l’électricité étaient un problème,<br />

et d’autres où les équipements pour l’éducation ou la santé<br />

n’étaient pas suffisants. Les fruits de la croissance doivent aider<br />

à rétablir cette équité territoriale. Chaque zone doit bénéficier<br />

de sa part de croissance et de notre<br />

ambition nationale d’émergence. Et<br />

puis, nous devons nous occuper de<br />

toutes les questions liées à l’avenir<br />

du Sénégal. Par exemple, nous avons<br />

construit deux universités : la nouvelle<br />

université de Dakar et celle du Sine<br />

Saloum, qui a déjà commencé à fonctionner.<br />

Pour information, de 1960 à<br />

2018, l’université Cheikh Anta Diop, à<br />

Dakar, a augmenté sa capacité de lits<br />

d’étudiants à 4 000 unités. Entre 2018<br />

et 2020, nous avons doublé cette<br />

dernière. Les tarifs de restauration<br />

dans les universités n’ont pas bougé,<br />

nous proposons toujours un tarif de<br />

100 francs CFA par repas. Un prix<br />

incomparable par rapport aux pays<br />

de la sous-région. Notre croissance<br />

doit servir à développer les infrastructures,<br />

préparer l’industrialisation, aider les étudiants à travailler<br />

mieux. Aider aussi les couches les plus vulnérables. C’est tout<br />

cela la promesse du PSE.<br />

Le plan, dont la deuxième phase doit s’étendre<br />

jusqu’en 2023, a dû tenir compte des retards à cause<br />

du Covid-19. A-t-il aussi été réorienté à cet effet ?<br />

Tout à fait. Entre 2020 et 2021, les économies du monde<br />

entier ont subi de plein fouet les effets de la pandémie. Même<br />

si le Sénégal fait partie des pays qui ont le mieux résisté. Nous<br />

avons pu maintenir une croissance de 1,5 %, 1,7 %, avec<br />

un déficit budgétaire assez soutenable. Mais en 2021, nous<br />

devons retrouver une croissance de 5 %, et l’année prochaine,<br />

48 HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE I FÉVRIER 2022

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