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SOCIÉTÉAu printemps 2021, des manifestations<br />

violentes éclatent dans le pays, à la<br />

suite de l’arrestation de l’opposant<br />

Ousmane Sonko, accusé de viol. De<br />

celles-ci résulte un rassemblement<br />

prodémocratie plus large, mené par<br />

la jeunesse du pays. Ce mouvement<br />

traduit une perte de confiance envers<br />

les institutions. Pourtant, en 2019, une enquête du think tank<br />

Futuribles a montré l’optimisme de la jeunesse face à l’avenir<br />

du pays. Près de 75 % des jeunes ont estimé que la démocratie<br />

participative aura progressé d’ici 2030. Mais la pandémie a<br />

ralenti l’économie informelle, dont dépendent tant de familles<br />

sénégalaises, aggravant encore un peu plus le contexte socioéconomique.<br />

En mars, des milliers de manifestants descendent<br />

alors dans la rue, pour dénoncer le manque de justice sociale et<br />

de démocratie. C’est le lancement du mouvement #FreeSenegal.<br />

Un hashtag devenu viral sur les réseaux sociaux, générant à<br />

partir du 3 mars 2021 plus de 2,8 millions de tweets. Cette mobilisation<br />

virtuelle fait suite aux manifestations opposant jeunes<br />

et forces de l’ordre. Pape Demba Dione est à l’initiative de ce<br />

hashtag. Il est à l’image de cette jeunesse engagée et connectée.<br />

Sous son calme typiquement sénégalais, se cache un redoutable<br />

communicant numérique. Il a compris que la mobilisation africaine<br />

si vite étouffée trouvait sa liberté sur la Toile. Rapidement,<br />

#FreeSenegal est aussi devenu un outil pour lancer des initiatives<br />

citoyennes, afin d’aider les blessés au sein des manifestations.<br />

Il a fallu moins d’une semaine au mouvement pour réunir<br />

10 millions de francs CFA à destination des familles de blessés.<br />

Un appel à la mobilisation a permis, en moins de trois jours, de<br />

récolter 300 pochettes de sang.<br />

La société civile et la jeunesse sont en avance sur les dirigeants<br />

selon Cheikh Fall, le cofondateur d’AfricTivistes, la ligue<br />

africaine des blogueurs et Web activistes pour la démocratie. Il<br />

définit « la démocratie silencieuse comme étant l’expression publique<br />

d’une partie de la population, restée longtemps aphone<br />

et qui se positionne en force de contestation pour des exigences<br />

républicaines ». Des exigences d’une partie de la jeunesse que<br />

Cheikh Fall a récemment exposées au sommet Afrique France,<br />

qui s’est tenu à Montpellier en novembre 2021. Devant le président<br />

français Emmanuel Macron, il a dénoncé avec émotion le<br />

passé colonialiste et néocolonialiste entre la France et l’Afrique.<br />

Il l’a désigné comme « un passé lourd à porter » pour les jeunes<br />

générations. L’activiste panafricain n’en est pas à son coup d’essai<br />

concernant les luttes démocratiques. En 2012, lors des élections<br />

présidentielles, il avait créé la plate-forme Sunu2012.sn,<br />

destinée à surveiller le bon déroulement du scrutin électoral<br />

au Sénégal. Natty Seydi, également cofondateur d'Afric-<br />

Tivistes, souligne cette force numérique qui grandit dans l’espace<br />

public : « Aujourd’hui, si tu as un problème, la première<br />

chose que tu fais, c’est un post sur Internet. Ce que les gens<br />

espèrent, c’est cette relation entre les nouveaux médias et les<br />

médias traditionnels. »<br />

OBJECTIFS : ZÉRO GROSSESSE NON DÉSIRÉE<br />

ET ZÉRO MARIAGE FORCÉ<br />

Les femmes donnent de la voix pour faire respecter leurs<br />

droits. De nombreux collectifs existent partout dans le pays<br />

pour lutter contre les violences faites aux femmes. Certains<br />

encouragent la scolarisation des filles. Sylvie Diack, une étudiante<br />

de 22 ans et animatrice radio de l’organisation Parole<br />

aux jeunes, en a fait son cheval de bataille. Elle milite pour<br />

l’université pour toutes au Sénégal, où une femme sur trois ne<br />

fait pas d’études supérieures. Dans ses émissions diffusées sur<br />

Facebook, elle donne la parole aux filles et aux associations.<br />

Et met en avant les nouvelles initiatives citoyennes féminines.<br />

C’est le cas du pacte de Kolda, mis en place dans la région du<br />

même nom, en Casamance. Ce pacte est un accord signé entre<br />

les parents, qui garantissent à leurs filles de ne pas les marier<br />

avant leurs 18 ans. En retour, celles-ci ne doivent pas tomber<br />

enceintes et assurent pendant leur scolarité un travail de sensibilisation,<br />

comme leaders de communauté. Leur objectif ? Zéro<br />

grossesse non désirée et zéro mariage forcé.<br />

DR<br />

92 HORS-SÉRIE AFRIQUE MAGAZINE I FÉVRIER 2022

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