Sciences et Avenir: la face cachée de l'Univers
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DU MYTHE À LA SCIENCE
Imaginez-vous sous un ciel étoilé, sans connaissance astronomique. Quels sont ces
astres, comment tournent-ils ? Telles sont les énigmes qu’ont résolues les savants...
avant de comprendre que le cosmos était bien plus vaste que ce qu’ils en voyaient.
Et l’Univers s’élargit
jusqu’à l’infini
Observer le ciel pour
mieux comprendre le
monde : une préoccupation
qui daterait
en France d’au moins
trente-quatre millénaires
! Un os retrouvé
dans l’abri Blanchard, en Dordogne, et
datant de cette période, porte une série
d’encoches qui indiqueraient le cycle de la
Lune. Mais dans quel but, nuit après nuit,
relever ces informations ? Selon l’astrophysicien
au CEA Jean-Marc Bonnet-Bidaud,
« la justification fondamentale de
l’astronomie, dans toutes les cultures, est
la mesure du temps ». Grâce aux calendriers
lunaires, les hommes préhistoriques
se repéraient dans le continuum des saisons
et suivaient les rythmes du gibier. « Ce
besoin de mesurer le temps est devenu fondamental
dès la transition du néolithique,
avec l’adoption d’une agriculture. Prévoir
les saisons était primordial. Rater une
récolte, c’était se mettre en danger de mort
par famine », poursuit Jean-Marc Bonnet-Bidaud.
C’est ainsi que les hommes ont identifié
les cycles du Soleil et de la Lune et noté les
configurations des astres, des repères bien plus
fiables que l’évolution des températures.
Si l’observation du ciel était une pratique
répandue, le développement d’une science
astronomique n’a pas connu partout la même
fortune. L’historien des sciences Denis Savoie
souligne l’écart entre Égyptiens et Babyloniens
: « Les Égyptiens sont restés isolés dans
THE GRANGER COLL NY / AURIMAGES
Hipparque , au II e siècle
avant notre ère, étudia
les mouvements du
Soleil et de la Lune.
la vallée du Nil pendant près de 3 000 ans. Hormis
pour le Soleil, primordial pour établir
leur calendrier dérivant de 365 jours, on
ne trouve pas dans leurs textes de mention
d’éclipses, et les astres n’avaient pas pour
eux de caractère prédictif. » Dans d’autres
civilisations, à côté des considérations agricoles,
l’astrologie devait constituer un moteur
essentiel des travaux astronomiques. À Babylone,
le destin du royaume était lié aux planètes.
Les présages planétaires annonçaient au roi ou
à la nation des affaires d’importance.
En Grèce, la trigonométrie sphérique
ouvre la voie aux calculs prédictifs
En Mésopotamie, l’essor de l’astronomie s’explique
aussi par la présence d’un gouvernement
centralisé et pérenne. Dans le temple
d’Esagila consacré à Marduk à Babylone, des
scribes scrutaient le ciel, nuit après nuit. La
tâche était ardue, explique Denis Savoie : « Dans
le ciel nocturne, vous avez des astres fixes, les
étoiles ; devant elles, des astres qui bougent,
les planètes. Et il faut imaginer avec ça comment
est le monde ! » Les Babyloniens comprirent
que sur de longues durées, les mouvements
célestes se répètent. Le grand cycle de
Vénus est de huit ans, celui de Mars de quinze
ans, celui de Jupiter de quatre-vingt-trois ans.
Denis Savoie précise qu’ils « cherchèrent à
donner aux positions des astres un caractère
prédictif, mais à des moments particuliers de
la visibilité des planètes : leurs stations, disparitions
et rétrogradations ». Pour identifier ces
moments, ils ordonnèrent le ciel en constella-
12 I NUMÉRO SPÉCIAL SCIENCES ET AVENIR AVRIL/JUIN 2022