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Sciences et Avenir: la face cachée de l'Univers

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LA VIE AILLEURS

puissant champ magnétique de la géante

gazeuse. Et détecte à chaque survol d’Europe

de curieuses variations du signal. Seule explication

plausible : la présence d’une couche

conductrice d’eau salée à quelques dizaines de

kilomètres sous la croûte : un océan. Et quel

océan ! Couvrant la totalité du corps céleste,

il atteint des profondeurs de 100 à 150 kilomètres,

totalise un volume deux fois supérieur

à celui de toutes les eaux terrestres réunies, et

pourrait même parfois se vider d’une partie

de son contenu en surface. C’est du moins ce

que laissent envisager les dépôts de sel observés

en périphérie des failles dont la croûte est

striée, ainsi que certaines zones circulaires

et elliptiques peut-être créées par des remontées

de glaces et des émissions sporadiques de

vapeur d’eau.

Des effets de marée provoqués par

l’énorme gravité de Jupiter

Depuis, deux autres de ces nappes marines

ont été mises au jour dans le système jovien.

Une première sur Callisto. Et une seconde sur

Ganymède, grâce au télescope spatial Hubble,

par l’observation des oscillations des aurores

boréales qui se forment parfois au-dessus des

pôles de cette lune, la seule du Système solaire

à posséder son propre champ magnétique. Mais,

enfouis à des profondeurs bien plus importantes

– de l’ordre de 100 à 150 kilomètres –, ces océans,

contrairement à celui d’Europe, n’ont pas remodelé

la surface de leur astre à des périodes

récentes : les images de Galileo montrent des

terrains âgés de plus d’un milliard d’années,

creusés de nombreux cratères…

Comment de l’eau peut-elle se maintenir

sous forme liquide à de pareilles distances du

Soleil ? L’explication tient à la taille de ces lunes.

« Europe, Ganymède, Callisto et Titan sont

des objets massifs. Le diamètre du plus petit

est proche de celui de la Lune, celui du plus

gros dépasse celui de Mercure, explique Gabriel

Tobie, directeur de recherche CNRS au laboratoire

Planétologie et Géosciences à Nantes. Des

De puissants jets de

vapeur et de grains

de glace percent la

surface d’Encelade,

projetant des sels

minéraux, des

molécules organiques

et des poussières

de silice jusqu’aux

anneaux de Saturne,

dont ce petit corps

est un satellite.

corps de cette importance possèdent un cœur

constitué d’un manteau rocheux riche en éléments

radioactifs. En se désintégrant, ces derniers

fournissent l’énergie – et donc la chaleur

– nécessaire au maintien de l’eau à l’état liquide

à des profondeurs de quelques dizaines de kilomètres.

» À cela s’ajouteraient, pour Europe, les

effets de marée provoqués par l’énorme gravité

de Jupiter. Ceux-ci créeraient des frictions dans

la glace, générant un surplus de chaleur qui

maintiendrait la zone aqueuse beaucoup plus

près de la surface.

Par ailleurs, l’océan de Ganymède – comme

celui de la lune Titan de Saturne – est pris

entre deux couches de glace. Il n’est pas directement

en contact avec le socle rocheux. Ce

phénomène serait simplement dû à sa plus forte

G. TOBIE

« EN SE DÉSINTÉGRANT, LES ÉLÉMENTS RADIOACTIFS DU MANTEAU

FOURNISSENT L’ÉNERGIE – ET DONC LA CHALEUR – NÉCESSAIRE AU

MAINTIEN DE L’EAU À L’ÉTAT LIQUIDE »

Gabriel Tobie, directeur de recherche CNRS au laboratoire Planétologie et Géosciences à Nantes

66 I NUMÉRO SPÉCIAL SCIENCES ET AVENIR AVRIL/JUIN 2022

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