Sciences et Avenir: la face cachée de l'Univers
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LES DÉCOUVERTES DE DEMAIN
De quelle manière s’est peuplé l’Univers ? Le télescope James-
Webb promet de s’approcher du Big Bang jusqu’à 180 millions
d’années pour étudier la mystérieuse période de réionisation,
dans la prime enfance du cosmos.
Au plus près des
premières étoiles
Lorsque les dernières lueurs de sa
rugissante naissance s’estompèrent,
bien avant que les toutes
premières étoiles ne s’y forment,
l’Univers entra dans une longue
ère de ténèbres, baptisée Âges
sombres par les cosmologistes.
Il demeura ainsi plus de cent millions d’années
pendant lesquelles il ne se passa rien, ou
presque. Il était alors empli d’hydrogène, d’hélium
et de matière noire en mélange presque
parfaitement uniforme : le fond de rayonnement
cosmologique, première lumière émise dans
tout l’Univers 380000 ans après le Big Bang,
nous enseigne en effet que les variations de densité
d’un point à un autre du tout jeune cosmos
ne dépassaient pas initialement plus d’une partie
pour 100 000. Imaginez : si les reliefs de la Terre
étaient aussi peu contrastés, la différence d’altitude
entre ses plus hauts sommets et ses fosses
océaniques les plus profondes serait inférieure
à 120 mètres…
De quelle manière l’Univers est-il passé d’un
état aussi formidablement uniforme au cosmos
actuel peuplé d’étoiles, de galaxies et de
trous noirs denses séparés par de gigantesques
espaces vides ? Les détails restent en grande
partie mystérieux. Et les astronomes ne parviennent
toujours pas à faire jaillir de leurs
supercalculateurs des univers simulés qui ressemblent
réellement au nôtre… « On aimerait
par exemple comprendre comment on aboutit
à la morphologie actuelle des galaxies », certifie
Sandrine Codis, astrophysicienne au CNRS.
Ces vastes archipels d’étoiles ont souvent la
forme de disques spiralés très plats, mais aussi
– pour les plus grands – de ballons de rugby
ellipsoïdes au sein desquels les astres circulent
sur des orbites désordonnées, tels des moucherons
autour d’un lampadaire. Ces galaxies elliptiques,
beaucoup plus pauvres en gaz, n’ont plus
de matière première pour former des étoiles et
seraient le fruit de fusions en séries de galaxies
spirales géantes, comme notre Voie lactée.
« Il y a quelques années, on avait tout faux,
s’amuse la chercheuse. Les simulations numériques
aboutissaient à des univers ne contenant
que des galaxies elliptiques ou, au contraire,
uniquement des spirales ! » Mais malgré ces
progrès récents, quelque chose nous échappe
encore…
Comme une écume de lumière
sur les flots de la matière noire
Pourtant, sur le papier, on comprend les mécanismes
à l’œuvre entre les Âges sombres et
aujourd’hui. Ils sont dictés par les lois de la physique,
qui sont formelles : aussi faibles qu’elles
aient été, les fluctuations de densité initiales du
contenu du cosmos n’ont pu que s’amplifier à la
longue, les régions denses tendant à s’effondrer
sous leur propre poids et à attirer davantage
de matière au détriment des régions les moins
denses. Les astrophysiciens privilégient un scénario
dit « bottom-up » (littéralement « de bas
en haut »), au cours duquel les grumeaux les
plus petits s’individualisent les premiers avant
de s’assembler en amas de plus en plus grands.
SPACE TELESCOPE SCIENCE INSTITUTE
50 I NUMÉRO SPÉCIAL SCIENCES ET AVENIR AVRIL/JUIN 2022