M - Diocèse de Quimper et du Léon
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Nécrologie<br />
R. P. Joseph LE JOLLEC, s. j.<br />
Voici plus d'un an que le R. P. Le Jolleo est mort, exactement<br />
le 23 Novembre 1959. Tout le bien qu'il a fait dans le diocèse<br />
aurait dû lui mériter un éloge funèbre plus rapi<strong>de</strong>. Le signataire<br />
<strong>de</strong> ces lignes, à qui c<strong>et</strong>te chronique fut <strong>de</strong>mandée en temps<br />
opportun, s'excuse d'un r<strong>et</strong>ard qui a pu sembler aux Pères Jésuites<br />
<strong>de</strong> Roz-Avel comme une inconvenance <strong>et</strong> qui a sans doute étonné<br />
tant <strong>de</strong> prêtres <strong>du</strong> diocèse à qui était familière la personne <strong>du</strong><br />
Père Le Jollec pour l'avoir enten<strong>du</strong> prêcher dans Ies Missions,<br />
pour l'avoir vu si fidèle à la Rési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Roz-Avel dans les <strong>de</strong>rnières<br />
années <strong>de</strong> sa vie, pour avoir peut-être bénéficié <strong>de</strong> ses<br />
conseils éclairés <strong>et</strong> <strong>de</strong> sa bonté. Enfant <strong>de</strong> Lothey, Br<strong>et</strong>on fier <strong>de</strong><br />
sa race, <strong>de</strong> sa langue, <strong>de</strong> ses traditions, missionnaire attitré <strong>du</strong><br />
diocèse, prédicateur <strong>de</strong> r<strong>et</strong>raites, confesseur infatigable, par<br />
toutes ses « libres »; par tout son ministère, le R. P. Le Jollec fut<br />
toutes ses «c fibres » <strong>et</strong> par tout son ministère Ie R. P. Le Jollec fût<br />
sans que soit évoquée la physionomie <strong>de</strong> ce religieux à qui tant<br />
<strong>de</strong> prêtres, dont je suis, gar<strong>de</strong>nt vénération eL reconnaissance.<br />
Rappelons pour mémoire les gran<strong>de</strong>s dates <strong>de</strong> sa vie. Il naquit<br />
à Lothey le 29 Juin 1875, d'une farnille très chrétienne à laquelle<br />
Dieu donna onze enfants. Vif, intelligent, sensible, il s'imprègne<br />
dès son enfance <strong>de</strong> toutes les richesses <strong>de</strong> sa terre natale. Tout<br />
lui <strong>de</strong>vient familier : les champs, les bords <strong>du</strong> canal, Ies vieilles<br />
pierres, les noms <strong>de</strong> villages, les mœurs ancestrales, la langue,.<br />
les vieux noms Jus sur Ies tombes ou sur Ies registres <strong>du</strong><br />
presbytère : c'est tout cela, fixé par son étonnante mémoire <strong>et</strong><br />
interprété par un cœur tout filial qui <strong>de</strong>viendra la matière <strong>de</strong> son<br />
livre sur Lothey.<br />
Mais c'est surtout l'atmosphère chrétienne <strong>de</strong> sa famille.<strong>de</strong> sa<br />
paroisse, <strong>de</strong>s offices liturgiques qui marqua son âme : <strong>de</strong> bonne<br />
heure sans doute il rêva <strong>de</strong> se consacrer à Dieu dans la vie sacerdotale.<br />
Tout simplement il suivit la filière normale <strong>de</strong>s candidats<br />
au sacerdoce : il fut élève à l'Ecole <strong>de</strong>s Frères <strong>de</strong> Chateaulin ;<br />
puis il entra au P<strong>et</strong>it Séminaire à Pont-Croix ; <strong>de</strong> là au<br />
Grand Séminaire <strong>de</strong> <strong>Quimper</strong>. Que c<strong>et</strong>te ligne droite ne fasse pas<br />
illusion : elle n'est pas Ie simple déroulement d'une vocation<br />
toute faite, ni une voie <strong>de</strong> facilité qu'il aurait parcourue sans<br />
se poser <strong>de</strong> question, comme on laisse jouer un automatisme,<br />
I/abbé Le Jollec est un volontaire, qui réfléchit <strong>et</strong> qui prie, qui<br />
se fixe <strong>de</strong>s buts quand il est siïr <strong>de</strong> la volonté <strong>de</strong> Dieu <strong>et</strong> qui les<br />
poursuit avec une volonté inflexible. Son goût pour l'histoire,<br />
son amour pour la terre br<strong>et</strong>onne, sans compter bien sûr la grâce<br />
toute puissante <strong>de</strong> Dieu qui marque ses pr. pour les œuvresqull<br />
lui plaît, ont révélé au séminariste les noms <strong>de</strong> Michel Le<br />
Nobl<strong>et</strong>z, <strong>du</strong> Père Maunoir. Il rêve <strong>de</strong> continuer leur œuvre <strong>de</strong>*<br />
missionnaires.<br />
Archives diocésaines <strong>de</strong> <strong>Quimper</strong> <strong>et</strong> <strong>Léon</strong> — 735 —<br />
A peine est-il ordonné prêtre, le 25 Juill<strong>et</strong> 1899 par Mgr <strong>de</strong><br />
Cormont, évêque <strong>de</strong> la Martinique — il y avait à c<strong>et</strong>te ordination<br />
66 jeunes pr<strong>et</strong>res ! — qu'il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> n entrer au noviciat <strong>de</strong> la<br />
Compagnie <strong>de</strong> Jésus. A Laval dabord, a Jersey, puis à Canterbury,<br />
il poursuit ses étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> philosophie <strong>et</strong> <strong>de</strong> théologie<br />
avec toute son intelligence profon<strong>de</strong> qui va aux choses sans<br />
jamais se laisser égarer par les mots, avec tout son esprit <strong>de</strong> foi<br />
<strong>et</strong> son sens <strong>de</strong> l'Eglise. On était en pleine crise mo<strong>de</strong>rniste :<br />
mais j'imagine que ces nouveautés dangereuses n'eurent d'autre<br />
résultat que d'enraciner sa fidélité à l'Eglise <strong>et</strong> d'exciter son<br />
ar<strong>de</strong>ur combative : il serait le héraut <strong>de</strong> la foi pure, telle que la<br />
tradition nous l'a transmise, telle qu'il la possédait en son cœur.<br />
sans jamais rien concé<strong>de</strong>r â l'esprit mo<strong>de</strong>rne qui ne fût autorisé<br />
par l'Eglise.<br />
En 1904, il fut nommé à'<strong>Quimper</strong>. Il y a connu <strong>de</strong>ux rési<strong>de</strong>nces<br />
: celle <strong>de</strong> la rue <strong>du</strong> Palais; puis, à partir <strong>de</strong> 1928, celle<br />
<strong>de</strong> Roz-Avel. Mais <strong>Quimper</strong> méme, il ne l'a quitté qu'en 1911,<br />
juste pour faire son «troisième an». Durant ces 55 ans il fut<br />
<strong>de</strong>ux fois supérieur. Supérieur, il gouvernait avec bonté mais<br />
avec ferm<strong>et</strong>é ; l'échéance venue, il re<strong>de</strong>venait simple religieux<br />
avec simplicité <strong>et</strong> reprenait, l'obéissance. C'était un homme <strong>de</strong><br />
caractère ; c'était surtout un prétre. Contentons-nous, à son éloge<br />
<strong>et</strong> pour l'édification <strong>de</strong> ceux qui l'ont connu, <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en lumière<br />
ces <strong>de</strong>ux aspects.<br />
cg<br />
J'ai sous les yeux <strong>de</strong>ux photographies prises à <strong>de</strong>s époques<br />
différentes > l'une en 1941, quand il avait 66 ans ; Fautre sur la<br />
fin <strong>de</strong> sa vie <strong>et</strong> qui a servi pour son image mortuaire.<br />
Ce qui frappe sur la première c'est la vigueur <strong>du</strong> visage,<br />
l'éclat <strong>de</strong>s yeux, une impression d'autorité, un air dominateur<br />
corrigé par un refl<strong>et</strong> <strong>de</strong> douceur <strong>et</strong> <strong>de</strong> bonté. S'il est vrai que<br />
l'âge a coutume d'atténuer les ar<strong>de</strong>urs <strong>du</strong> jeune âge, on serait<br />
curieux <strong>de</strong> savoir ce que <strong>du</strong>t étre ta fougife <strong>du</strong> jeune Père k<br />
30 ou 35 ans <strong>et</strong> l'on voudrait savoir par quels efforts sur luimême<br />
il réussit h conquérir c<strong>et</strong>te douceur, c<strong>et</strong>te sérénité, c<strong>et</strong>te<br />
patience évangélique qui lui étaient, en sa vieillesse, <strong>de</strong>venues<br />
habituelles, malgré <strong>de</strong>s étincelles <strong>et</strong> <strong>de</strong>s éclats qui révélaient<br />
méme alors ee fond <strong>de</strong> nature jamais dompté.<br />
La force était une <strong>de</strong>s marques dominantes <strong>du</strong> P. Le Jollec.<br />
Sa santé lui perm<strong>et</strong>tait <strong>de</strong> faire face à <strong>de</strong>s besognes qui eussent<br />
écrasé d'autres : il étudiait, composait ses sermons, préchait,<br />
passait <strong>de</strong> missions en r<strong>et</strong>raites presque sans répit ; recevait <strong>de</strong>s<br />
visites, confessait <strong>de</strong> nombreux pénitents <strong>et</strong> trouvait le moyen, au<br />
milieu <strong>de</strong> toutes ces occupations, d'écrire <strong>de</strong>s livres.<br />
Il avait discipliné à force d'énergie une voix bégayante ; <strong>de</strong><br />
ce défaut naturel mais vaincu, il ne restait qu'une facon <strong>de</strong> précipiter<br />
les fins <strong>de</strong> phrase, aux moments où la véhémence remportait.<br />
Au temps <strong>de</strong> sa pleine forme,, malheur à qui eût ri <strong>de</strong><br />
ce défaut ! Un regard eût rappelé à l'impru<strong>de</strong>nt que la Parole <strong>de</strong>