La prise en charge. Témoignage d'un Montagnais. - Les Classiques ...
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<strong>La</strong> <strong>prise</strong> <strong>en</strong> <strong>charge</strong>. <strong>Témoignage</strong> d’un <strong>Montagnais</strong>. (1997) 32<br />
trop de neige, les chantiers fermai<strong>en</strong>t de bonne heure. C’est parce que les chevaux<br />
n’étai<strong>en</strong>t pas capables de passer.<br />
[32]<br />
C’était dur! C’était au petit sciotte, il n’y avait pas de scie mécanique, pas de<br />
grosse pelle. Le sciotte criait «galette» souv<strong>en</strong>t. L’hiver, quand le bois était gelé, tu<br />
<strong>en</strong>t<strong>en</strong>dais crier ton sciotte. Ça voulait dire qu’il faisait frette puis que c’était dur sur<br />
les bras. Dans le temps, il fallait que tu coupes ça <strong>en</strong> billots de 12 pieds, sans ça, tu<br />
ne restais pas. Il fallait que tu coupes ton 100 billots par jour. On travaillait pour<br />
des sous-jobbers, dans le temps, c’était Trefflé <strong>La</strong>forest. Quand le bonhomme est<br />
mort, c’est son fils Arthur qui l’a remplacé. On partait au mois de septembre ou octobre<br />
jusqu’au printemps. Dans le temps, les jobbers courai<strong>en</strong>t après les hommes. Il<br />
y avait toujours quelqu’un sur le chemin pour v<strong>en</strong>ir chercher des hommes. On restait<br />
dans des grands camps. On avait chacun un bed. Des fois, c’était des beds à beus, on<br />
couchait cordés. Tu mangeais des beans, du porc et du bœuf. Il n’y avait pas de racisme.<br />
Ça n’existait pas. Ça se respectait. Des fois, tu avais de la misère, tu lâchais<br />
un petit siffle. Tu voyais aussitôt arriver quelqu’un pour t’aider.<br />
Il y avait de l’<strong>en</strong>traide. Quand une maison brûlait, c’était pas long, deux jours<br />
après, le gars était r<strong>en</strong>tré. Ils faisai<strong>en</strong>t des bis, tout le monde v<strong>en</strong>ait aider. <strong>Les</strong><br />
femmes s’occupai<strong>en</strong>t du lunch p<strong>en</strong>dant que les hommes travaillai<strong>en</strong>t. On comm<strong>en</strong>çait à<br />
bûcher les billots le matin. Il y <strong>en</strong> a qui montai<strong>en</strong>t ça au moulin. Ceux qui avai<strong>en</strong>t du<br />
bois d’avance l’apportai<strong>en</strong>t.<br />
Quelqu’un qui tombait dans la misère du jour au l<strong>en</strong>demain, deux jours après, il<br />
recomm<strong>en</strong>çait comme avant. Il y a <strong>en</strong>core du bénévolat mais très peu. Dans notre<br />
temps, le vol n’existait pas. Si tu trouvais une [33] pelle, il fallait que tu la remettes.<br />
C’était sacré, le bi<strong>en</strong> d’un autre.<br />
Aujourd’hui, je p<strong>en</strong>se que la mécanique a remplacé beaucoup de personnes. C’est<br />
la raison principale du fait qu’il y a beaucoup de chômeurs aujourd’hui. Il y a trop de<br />
mécanique. Avant ça, tout se faisait avec des bras et des jambes. On disait: «Des<br />
beans et du lard», nous autres, dans le temps. Aujourd’hui, ça pr<strong>en</strong>d du gaz. Ah! ça a<br />
changé! C’est incroyable de parler de cela quand on y p<strong>en</strong>se. Pour manger trois bons<br />
repas par jour, à ce mom<strong>en</strong>t-là, il fallait se lever tôt le matin, se coucher tard le soir,<br />
arrêter de travailler après souper. Mais le monde était capable. Il y avait moins de<br />
choses comme on voit prés<strong>en</strong>tem<strong>en</strong>t, comme la drogue. Des affaires comme ça, ça