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Les chevaliers de la table ronde

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divers vêtements, et il les rangea soigneusement dans un sac.<br />

Ce fut au tour du roi Mark <strong>de</strong> traverser le Mal Pas. Tristan faisait <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> bruit<br />

avec sa bouteille et son hanap. « Pour l’amour <strong>de</strong> Dieu, roi Mark ! disait-il avec sa voix <strong>de</strong><br />

fausset, donne-moi un don ! » Le roi lui présenta son bonnet <strong>de</strong> fourrure : « Il est un peu usé,<br />

mais il peut encore te protéger du froid ! » dit-il. Puis, comme il al<strong>la</strong>it repartir, Mark se<br />

retourna : « Comment es-tu <strong>de</strong>venu <strong>la</strong>dre ? <strong>de</strong>manda-t-il. – Seigneur roi, répondit le faux<br />

mendiant, c’est à cause <strong>de</strong> mon amie. Son mari avait cette ma<strong>la</strong>die, et comme je faisais avec<br />

elle le petit jeu d’amour, le mal passa sur moi. C’est vraiment à cause d’elle que je me trouve<br />

ici, aujourd’hui, pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r l’aumône aux gens <strong>de</strong> bien ! Mais je t’assure que je ne<br />

regrette rien, car il n’y a pas plus belle femme que mon amie ! – Comment s’appelle-t-elle ?<br />

<strong>de</strong>manda Mark. – La belle Yseult ! » répondit Tristan. Le roi éc<strong>la</strong>ta <strong>de</strong> rire et s’en al<strong>la</strong>.<br />

Il rejoignit Arthur sur <strong>la</strong> B<strong>la</strong>nche Lan<strong>de</strong>. De là, on voyait l’horizon et tout ce qui se passait<br />

dans le Mal Pas. Arthur s’enquit <strong>de</strong> <strong>la</strong> reine Yseult. « Elle vient par <strong>la</strong> forêt, répondit Mark.<br />

Elle se trouve en compagnie <strong>de</strong> Dinas <strong>de</strong> Lidan. » Et ils se dirent l’un à l’autre : « Quelle<br />

fondrière que ce Mal Pas ! On ne sait vraiment pas comment s’en sortir ! »<br />

Cependant, toujours au bout du marais, Tristan vit venir les trois barons qui le haïssaient<br />

le plus. C’étaient eux qui l’avaient dénoncé. C’étaient eux qui avaient préparé les pièges dans<br />

lesquels il était tombé. Devant le marécage, les trois hommes, qui avaient noms Andret,<br />

Denoa<strong>la</strong>n et Gondoïne, hésitèrent à poursuivre plus avant. Alors, Tristan leur indiqua, avec sa<br />

béquille, le passage qu’il prétendait le meilleur : « Voyez, là-bas, cette tourbière après cette<br />

mare. C’est tout droit <strong>de</strong> ce côté. J’en ai vu passer plusieurs sans dommage ! » <strong>Les</strong> trois<br />

hommes piquèrent <strong>de</strong>s éperons et s’engagèrent dans le bourbier, mais ils en eurent bientôt<br />

jusqu’à <strong>la</strong> selle. « Piquez encore ! leur criait le faux mendiant, toujours assis sur sa souche,<br />

vous n’avez plus qu’un petit chemin à faire ! » Mais, <strong>de</strong> plus en plus, les chevaux<br />

s’enfonçaient dans <strong>la</strong> vase, tandis que ceux qui les montaient se sentaient <strong>de</strong> plus en plus<br />

inquiets. Et ils eurent bien du mal à atteindre <strong>la</strong> terre ferme, et ils étaient en si piteux état<br />

qu’il leur fallut entièrement changer <strong>de</strong> vêtements.<br />

Pendant ce temps-là, <strong>la</strong> reine Yseult était arrivée au bord du Mal Pas. Elle ne put retenir<br />

sa joie en voyant se débattre les trois <strong>chevaliers</strong> félons dans le bourbier. Mais Dinas <strong>de</strong><br />

Lidan, qui l’accompagnait, lui dit : « Reine, voici qui est fâcheux. Tu ne pourras pas franchir<br />

ce gué sans salir et abîmer tes vêtements. Je serais vraiment désolé si tu te présentais<br />

<strong>de</strong>vant le roi Arthur avec ta robe gâtée. Il vaudrait mieux perdre un peu <strong>de</strong> temps et passer<br />

par un autre chemin. – Si tu en trouves un autre, je le veux bien », répondit <strong>la</strong> reine. Mais, en<br />

disant ces mots, elle cligna <strong>de</strong> l’œil. Dinas le vit bien et, entraînant ses compagnons avec lui,<br />

il rebroussa chemin à travers <strong>la</strong> forêt.<br />

Yseult était restée seule. De l’autre côté du Mal Pas se tenaient les <strong>de</strong>ux rois et les barons<br />

qui <strong>la</strong> regardaient. Alors, elle sauta <strong>de</strong> son palefroi, en ôta le frein qu’elle disposa sous <strong>la</strong><br />

selle, s’approcha du gué en tenant sa robe relevée, puis, cing<strong>la</strong>nt l’animal d’un coup sec, elle<br />

le fit partir à travers le marais. Le coursier eut tôt fait <strong>de</strong> gagner l’autre rive. L’assemblée<br />

regardait faire sans comprendre. La reine portait une chemise <strong>de</strong> soie <strong>de</strong> Bagdad fourrée<br />

d’hermine et un manteau à traîne. Ses cheveux sortaient <strong>de</strong> <strong>de</strong>ssous sa guimpe en <strong>de</strong>ux<br />

longues tresses galonnées <strong>de</strong> b<strong>la</strong>ncs cordons et <strong>de</strong> fils d’or, et retombaient avec élégance sur<br />

ses épaules. Un cercle d’or ceignait sa tête <strong>de</strong> part et d’autre. Et chacun, parmi les barons,<br />

admirait <strong>la</strong> beauté et l’élégance <strong>de</strong> cette femme.

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