Catalogue festival Guédiguian 2012 - Ciné Meaux Club
Catalogue festival Guédiguian 2012 - Ciné Meaux Club
Catalogue festival Guédiguian 2012 - Ciné Meaux Club
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
endant visite au réalisateur à Moscou en 1926,<br />
lui assurent qu’il est le bienvenu à Hollywood.<br />
En 1929, Joseph Schenck, pour la United Artists,<br />
offi cialise l’invitation du couple tandis que<br />
La Ligne générale sort enfi n, tronqué et aff ublé,<br />
sur l’ordre de Staline lui-même, d’un titre plus à<br />
la mode : L’Ancien et le Nouveau.<br />
Eisenstein, prestigieux porte-parole d’un pays<br />
en cours de reconnaissance internationale,<br />
peut partir pour un long voyage d’étude avec<br />
ses deux collaborateurs et amis fi dèles, le chef<br />
opérateur Edouard Tissé et l’assistant réalisateur<br />
de toujours, Grigori Alexandrov. Des conférences,<br />
des rencontres avec des célébrités (Shaw,<br />
Pirandello, Aragon, Eluard, Colette, Cocteau,<br />
Gance) n’empêchent pas les incidents diplomatiques<br />
d’émailler son périple en Occident.<br />
L’Amérique accueille enfi n le cinéaste ; Paramount<br />
lui signe un contrat mirifi que mais on<br />
refuse tous ses projets, dont notamment une<br />
adaptation d’Une tragédie américaine de Theodore<br />
Dreiser. Upton Sinclair, un écrivain socialiste,<br />
crée une maison de production pour permettre<br />
à son illustre invité de tourner un projet<br />
au Mexique. Sergueï Eisenstein voyage donc<br />
avec toute son équipe de fi dèles, exalté par<br />
le peuple et l’art mexicains, en élaborant une<br />
grande fresque historique sur le Mexique. Mais<br />
en janvier 1932, devant les métrages énormes<br />
déjà tournés (32 000 m) et les coûts gigantesques<br />
du projet, Sinclair se défi le et stoppe le<br />
tournage de ce qui n’est que l’ébauche d’un<br />
fi lm : Que viva Mexico ! (1932). De multiples<br />
montages des plans tournés par Eisenstein et<br />
Tissé sortiront mais aucun n’est conforme à<br />
l’esprit du scénario d’Eisenstein (Tonnerre sur le<br />
Mexique ou La Kermesse funèbre).<br />
L’épisode mexicain a laissé des séquelles : de<br />
retour en U.R.S.S., Eisenstein se relève péniblement<br />
de son échec. Il commence à écrire<br />
et à répéter avec ses amis Maxime Strauch et<br />
sa femme, Judith Glizer, une comédie burlesque<br />
et satirique sur Intourist : Maxime Maximovitch<br />
Maximov. Mais le régime, manquant<br />
cruellement d’humour, lui conseille de changer<br />
de sujet . D’autres sujets sur le roi Christophe<br />
d’Haïti ou une adaptation de La Condition<br />
humaine de Malraux ne sont pas davantage<br />
acceptés. Eisenstein entreprend alors ce qui<br />
doit être son premier fi lm parlant, Le Pré de<br />
Béjine (1935), d’après un récit de Tourgueniev.<br />
Las, les incultes qui gèrent le cinéma soviétique<br />
le taxent de « déviationnisme esthétique<br />
». Le fi lm, repris quelques temps en 1936,<br />
BIOGRAPHIE SERGUEÏ EISENSTEIN<br />
108<br />
restera inachevé. Il n’en subsiste d’ailleurs que<br />
quelques photogrammes. Pour ajouter au malheur<br />
d’Eisenstein, sa mauvaise santé chronique<br />
commence à peser sur son travail : une pernicieuse<br />
variole l’aff ecte cette année-là.<br />
Il décide de se ranger pour pouvoir tourner de<br />
nouveau, et fait publiquement son autocritique.<br />
Il se relance grâce à l’amitié artistique et<br />
esthétique d’un des plus grands compositeurs<br />
du XX ème siècle, Serge Prokofi ev, qui lui permet<br />
de mettre à l’épreuve sa nouvelle théorie du<br />
montage sonore contrapuntique de l’image.<br />
En 1938, sur la musique du même Prokoviev,<br />
il réalise Alexandre Nevski, dont Nikolaï Tcherkassov<br />
interprète le rôle titre, fi lm qui lui vaut<br />
de revenir en grâce auprès du régime : sujet patriotique<br />
et historique, ampleur et maîtrise de<br />
réalisation lui assurent le succès.<br />
La guerre déclarée, Eisenstein et tout le cinéma<br />
soviétique se replient vers l’est, à Alma-Ata (Kazakhstan).<br />
Ainsi y entreprend-il ce qui doit être<br />
son œuvre majeure. La préparation commence<br />
en 1941 : Ivan le terrible – de nouveau Tcherkassov<br />
– doit comprendre trois parties. La première<br />
partie sort en 1944. La deuxième partie,<br />
terminée en 1945, ne sort pas et la troisième<br />
voit son tournage interrompu. La censure stalinienne<br />
a vu des allusions et analogies par trop<br />
transparentes entre le premier tsar et le petit<br />
père des peuples. A juste titre, semble-t-il !<br />
Début 1946, Eisenstein est terrassé par un<br />
infarctus. Alité plusieurs mois à l’hôpital du<br />
Kremlin, il profi te de l’occasion pour rédiger ses<br />
Mémoires où se révèlent son sens du cocasse,<br />
son humour et un savoir borgésien. Mais si l’esprit<br />
fonctionne encore, le corps est épuisé. Eisenstein<br />
meurt à Moscou, le 11 février 1948.<br />
Son œuvre fi lmique, assez maigre en quantité<br />
(six longs métrages), continue d’alimenter les<br />
études cinématographiques et d’occuper le<br />
haut du pavé : Eisenstein ne quitte jamais les<br />
premières places du palmarès des meilleurs<br />
réalisateurs (sondage British Film Institute) avec<br />
le Cuirassé Potemkine ou Octobre. Son œuvre<br />
écrite, peut-être aussi importante que ses fi lms,<br />
reste méconnue : Eisenstein fut un graphomane<br />
permanent. Quant à ses milliers de dessins, y<br />
compris érotiques, ils sont publiés petit à petit.<br />
<strong>Catalogue</strong> <strong>festival</strong>.indd 108 18/01/<strong>2012</strong> 02:06:58