Catalogue festival Guédiguian 2012 - Ciné Meaux Club
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QUELQUES MOTS...<br />
François Mitterrand a incarné la possibilité du<br />
socialisme en France et en Europe au moment<br />
même où les pays socialistes s’eff ondraient<br />
dans le monde entier. Il a, qu’on le veuille ou<br />
non, qu’elles qu’aient été, dans son destin, les<br />
parts de conviction et d’ambition personnelle,<br />
rendu le rêve socialiste crédible pendant une<br />
longue décennie. Cette décennie, je l’ai vécue<br />
avec obstination.<br />
Poser à nouveau, aujourd’hui, la question d’une<br />
alternative au capitalisme mondialisé à travers<br />
un personnage historique me semble être en<br />
droite ligne (devrais-je dire en gauche ligne)<br />
avec tout ce que j’ai tenté de faire jusqu’à pré<br />
ent : c’est-à-dire participer à travers le cinéma<br />
aux interrogations de notre époque.<br />
Le Promeneur du Champs de Mars est une<br />
fi ction librement adaptée du livre de Georges-<br />
Marc Benamou : Le Dernier Mitterrand.<br />
Ce récit était déjà une mise en forme artistique<br />
par sa construction et par son interprétation<br />
permanente des faits relatés.<br />
Par ailleurs, il permettait de développer en toute<br />
liberté le personnage du jeune journaliste<br />
dans lequel je pouvais m’investir face à un personnage<br />
plus contraignant par défi nition parce<br />
que historique.<br />
Enfi n et surtout, le livre contenait l’idée d’un<br />
“compte à rebours” face à la maladie et à la<br />
proximité de la mort.<br />
Le Promeneur du Champs de Mars tient tout<br />
entier dans la conversation-relation entre ce<br />
jeune homme en quête de certitude et ce vieil<br />
homme saisi d’eff roi devant sa prochaine disparition.<br />
Par ailleurs, le désir de m’éloigner de mon sentier<br />
battu me titillait depuis longtemps. Non<br />
pas que j’éprouve les moindres gêne ou empêchement<br />
à y cheminer mais… La curiosité…<br />
Il fallait pour cela un enjeu à la mesure de cette<br />
curiosité, un sentier très diff érent.<br />
C’est Frank Le Wita qui m’a proposé ce fi lm, assorti<br />
de la présence de Michel Bouquet. Et si<br />
le fi lm est une fi ction sur François Mitterrand,<br />
c’est aussi un document sur l’art de Michel Bouquet…<br />
Robert GUEDIGUIAN<br />
ARTICLE DANS POSITIF<br />
46<br />
ARTICLE DE JEAN A. GILI PARU DANS POSITIF N°528<br />
FÉVRIER 2005<br />
Le Promeneur du Champ de Mars<br />
Le vieil homme en son palais<br />
Après de nombreux fi lms explorant toujours<br />
la même veine, on ne s’attendait pas à voir Robert<br />
<strong>Guédiguian</strong> prendre en charge un projet<br />
controversé dès son annonce. Le cinéaste était<br />
conscient du caractère inattendu d’une telle<br />
entreprise lorsqu’il évoquait son désir, voire<br />
sa curiosité, de sortir des sentiers battus. Les<br />
gardiens du temple s’étaient insurgés contre<br />
l’idée même de porter à l’écran les derniers<br />
mois de la vie de Mitterrand, comme si l’image<br />
du président relevait d’une corporalité mystique<br />
impossible à incarner dans le corps d’un<br />
acteur. D’autres cinématographies ont depuis<br />
longtemps dépassé cet interdit pour aborder<br />
sans détour la question de la personnalisation<br />
du pouvoir. Les temps sont révolus où, pour<br />
exprimer la nature particulière d’un être exceptionnel,<br />
on ne pouvait qu’entrevoir son visage<br />
ou vénérer son ombre. La mise en oeuvre était<br />
délicate : partir d’un livre ayant soulevé beaucoup<br />
de critiques, pour tourner un fi lm qui devait<br />
éviter les écueils d’une vision trop négative<br />
du président ; ou au contraire d’une hagiographie<br />
à l’égard d’un personnage forcément fascinant<br />
en termes de mise en scène. De surcroît,<br />
la confrontation avec un acteur comme Michel<br />
Bouquet rendait impossible le mimétisme interprétatif<br />
qu’aurait pu apporter un comédien<br />
sosie ou un interprète caméléon pendant toute<br />
la projection (et il devait en aller de même au<br />
tournage), on a devant soi et « le président » et<br />
un acteur dans toute la subtilité de son art. À<br />
certains égards, c’est un fi lm à la fois sur Mitterrand<br />
et sur Bouquet, et ce sentiment est encore<br />
renforcé par le fait que <strong>Guédiguian</strong> a choisi<br />
(excepté Jalil Lespert) d’entourer le protagoniste<br />
de comédiens peu ou pas connus, donnant<br />
une sorte de neutralité non connotée à leurs<br />
diff érents rôles.<br />
Mitterrand tel qu’en lui-même... <strong>Guédiguian</strong><br />
s’approche avec modestie de cette sorte de<br />
monstre sacré qui a cristallisé autour de lui<br />
autant de passions que de haines. Le portrait<br />
qu’il dresse est celui d’un homme conscient du<br />
caractère unique de sa personne et de son parcours.<br />
À un tel degré de conscience, on mesure<br />
que les eff orts faits pour aller jusqu’au bout<br />
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