Catalogue festival Guédiguian 2012 - Ciné Meaux Club
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donne lieu à un jaillissement d’autant plus heureux<br />
ou plus neuf, apparaît ici, comme dans<br />
Arsenic et vieilles dentelles (Arsenic and Old<br />
Lace, 1941) où se succèdent les ouvertures et<br />
les entrebâillements, comme un élément essentiel<br />
de la vision propre à Capra : fente d’une<br />
robe de chambre, d’une surface glacée ou dansante,<br />
précipice, toute vacuité ouvre fi nalement<br />
sur un plein, sauvetage, fête, amour ou salut. Il<br />
n’y a que cette maison délabrée dont le vide,<br />
cette fois, signifi e le néant. Ne lui jetait-on pas<br />
pourtant des pierres, brisant les vitres pour faire<br />
des vœux ? Lors de la nuit de noces de George<br />
et de Mary, n’avait-elle pas été transformée en<br />
hôtel de luxe par deux pittoresques importuns<br />
? Mieux encore : l’ingénieuse rôtissoire<br />
musicale n’était-elle pas l’exploitation la plus<br />
adroite de ses ruines désertes ?<br />
Roland Barthes prétendait que les amoureux se<br />
disent toujours des bêtises. C’est avoir une idée<br />
bien pauvre de l’intelligence ou du sentiment,<br />
et la comédie américaine s’est consacrée à inventer<br />
des dialogues d’idylles particulièrement<br />
plaisants où les amants ne sont pas toujours<br />
les dupes d’un ridicule dont ils s’accommodent<br />
avec un humour d’autant plus léger qu’il participe<br />
lui-même de l’érotisme, en manifestant<br />
le triomphe de la fantaisie passionnée sur les<br />
règles sociales. Dans la scène lunaire comme<br />
dans la demande en mariage, La Vie est belle<br />
utilise ce procédé, car les amoureux savent bien<br />
la pièce qu’ils se jouent, et n’ignorent pas que<br />
le tiers, imaginaire ou présent, voisin ou mère,<br />
fi ancé à l’autre bout d’une ligne téléphonique<br />
ou auditoire d’un théâtre chimérique, n’est que<br />
le fâcheux nécessaire aux dépens duquel le<br />
plaisir s’affi che et devient sensible. De même<br />
que la faille sert les desseins de l’être, le surcroît<br />
a son rôle dans la perfection.<br />
La mise en scène de Capra, par son animation,<br />
son ouverture perpétuelle à l’incident, dont le<br />
petit drame de la pharmacie donne un modèle<br />
parfait, ne se contente pas de répondre aux<br />
voeux d’une esthétique populiste, elle incarne<br />
avec justesse une métaphysique de la plénitude.<br />
Mais voilà ! les critiques de cinéma n’aiment pas<br />
les familles nombreuses.<br />
BIOGRAPHIE FRANK CAPRA<br />
83<br />
FRANK CAPRA<br />
(18 mai 1897 - 3 septembre 1991)<br />
Traversant l’histoire du cinéma,<br />
du muet au <strong>Ciné</strong>mascope en couleur,<br />
la vie de Capra fait fi gure de<br />
Hollywood Story typique : parti<br />
de rien, le petit rital devient l’un des maîtres de<br />
l’industrie cinématographique avec « son nom<br />
au-dessus du titre », comme plus tard Alfred<br />
Hitchcock, Howard Hawks, John Ford ou Ernst<br />
Lubitsch, et dont il deviendra le fer de lance du<br />
patriotisme américain. Pas seulement et peutêtre<br />
surtout pas un maître de la comédie américaine,<br />
même si ses plus gros succès relèvent<br />
du genre, Frank Capra est fi nalement un auteur<br />
plus complet et complexe.<br />
Frank Capra naît Francesco Rosario Capra en Sicile<br />
en 1897, non loin de Palerme. Ses parents,<br />
Salvatore et Seridda, paysans déshérités et illettrés,<br />
ont une nombreuse progéniture dont un<br />
aîné parti en Amérique. En 1903, ils se résolvent<br />
à leur tour au départ et après la traditionnelle et<br />
spartiate traversée en bateau, poussent jusqu’à<br />
Los Angeles. Là, ils s’intègrent rapidement. Le<br />
petit Cicco décide qu’il ne sera plus jamais pauvre<br />
et ignorant ; il embrasse l’idéologie américaine<br />
de la poursuite du bonheur, de la réussite<br />
sociale et matérielle. Dans son autobiographie<br />
(Hollywood Story, 1971), Frank Capra élabore sa<br />
légende : tandis qu’il va à l’école, redoublant<br />
d’eff ort pour grimper sur l’échelle sociale, il occupe<br />
quantité de petits boulots pour subvenir<br />
en partie aux besoins de sa famille. Il intègre<br />
bientôt l’université technologique de Pasadena,<br />
avec une bourse, tandis que ses parents ont<br />
acquis une petite ferme de citronniers. Il écrit<br />
quelque nouvelles pour le journal universitaire<br />
et s’intéresse déjà au cinéma, même s’il affi rme<br />
le contraire dans ses mémoires. Diplômé ingénieur<br />
chimiste en 1918 mais ne trouvant pas de<br />
travail, il préfère s’engager dans l’armée dont<br />
il est bientôt démobilisé après avoir enseigné<br />
la balistique. Il obtient donc sa naturalisation,<br />
sous le nom de Frank Russell Capra (1920), et se<br />
fait engager au culot comme réalisateur par un<br />
petit studio. Il tourne un premier fi lm d’après<br />
un poème de Kipling et décide de se perfectionner.<br />
Il est embauché comme accessoiriste,<br />
monteur, puis assistant. Finalement, il signe un<br />
contrat de gagman au sein des célèbres productions<br />
Hal Roach. Tout ce qu’il écrit passe par<br />
les fourches caudines de Mack Sennett (1924)<br />
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