Catalogue festival Guédiguian 2012 - Ciné Meaux Club
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L’insuccès public de ces œuvres personnelles<br />
conduit le cinéaste à accepter des commandes<br />
pour le meilleur (After Hours, variation brillante<br />
sur la nuit de Gethsemani et le chemin de croix)<br />
et le pire (le très didactique et glacé La Couleur<br />
de l’argent). Le déclin semble consommé avec<br />
les deux naufrages de deux projets personnels<br />
à la gestation complexe que sont La Valse des<br />
pantins (lugubre satire dérythmée de l’univers<br />
de la télévision, avec un Jerry Lewis raide et<br />
mécanique) et La Dernière Tentation du Christ<br />
(grotesque galerie sulpicienne enveloppée<br />
d’une bande son world, dans une ambiance<br />
défi lé Benetton, assurément le pire fi lm de<br />
Scorsese). Le réalisateur de Mean Streets opère<br />
un salvateur retour aux sources en 1990 avec<br />
Les Aff ranchis, fi lm d’initiation sur fond de<br />
mafi a new yorkaise, aux dialogues percutants<br />
et à l’énergie fi évreuse, qui laisse augurer le<br />
meilleur pour la décennie suivante.<br />
Celle-ci voit alterner un grand fi lm (Le Temps<br />
de l’innocence, adapté d’un roman d’Edith Warton),<br />
un chef-d’œuvre (Casino, magnifi é par<br />
l’incandescence d’une Sharon Stone au sommet<br />
de son art) et les faux-pas (Les Nerfs à vif,<br />
calamiteux remake grimaçant de Cape Fear, de<br />
Jack Lee Thomson, ou Kundun, fi lm au ton emprunté<br />
et démonstratif sur le bouddhisme et le<br />
dalaï lama, qui confi rme que Scorsese échoue<br />
à traduire littéralement et frontalement le spirituel,<br />
là où parabole et allégorie transcendent<br />
son discours).<br />
À partir de 2002, avec Gangs of New York, qui<br />
conte les aff rontements homériques de deux<br />
clans dans le New York de 1870, s’ouvre une nouvelle<br />
période : Scorsese rencontre l’incontournable<br />
Leonardo DiCaprio, rajeunit son public et<br />
oriente son cinéma vers la surenchère spectaculaire.<br />
Le soutien de la star de Titanic permet<br />
de débloquer un fi nancement jugé impossible<br />
– au prix de notables aménagements du scénario<br />
pour étoff er le rôle de la jeune vedette.<br />
Daniel Day Lewis signe une composition mémorable<br />
de boucher vindicatif, virtuose dans le<br />
maniement des hachoirs et autres merlins. Trois<br />
ans plus tard, une biographie aseptisée de Howard<br />
Hughes, Aviator, infl échit défi nitivement<br />
les orientations artistiques de Scorsese vers un<br />
art tout public et consensuel. La maîtrise de la<br />
mise en scène demeure intacte mais ne peut<br />
transcender l’invraisemblance et l’inintérêt<br />
des scénarios. Qu’ importe : à près de soixante-dix<br />
ans, le cinéaste est comblé d’honneurs<br />
BIOGRAPHIE / FILMOGRAPHIE MARTIN SCORSESE<br />
96<br />
(Oscar 2007 du meilleur fi lm pour Les Infi ltrés,<br />
remake d’Infernal Aff airs d’Andrew Mak) et de<br />
succès (Shutter Island représente son plus gros<br />
score au box offi ce). On attend avec une impatience<br />
toute modérée son biopic sur Sinatra,<br />
annoncé pour la fi n de <strong>2012</strong>.<br />
Débutant sa carrière sous les auspices du cinéma<br />
contestataire et indépendant du Nouvel<br />
Hollywood (il est l’exact contemporain de<br />
Coppola, Friedkin, De Palma, Bogdanovitch et<br />
Cimino), Scorsese est le seul cinéaste de cette<br />
génération à ne pas avoir connu de réelle éclipse<br />
ni perdu le contact avec le public, au prix<br />
peut-être de quelques compromis toujours<br />
en rapport avec sa passion pour le cinéma des<br />
origines (Hugo Cabret), destinés à lui éviter une<br />
fi n de carrière à la Monte Hellman… <strong>Ciné</strong>phile<br />
devant l’éternel, il n’a jamais cessé de proclamer<br />
et de payer sa dette aux grands maîtres de sa<br />
jeunesse, coproducteur des dernières œuvres<br />
de Kurosawa puis conservateur et restaurateur,<br />
par l’intermédiaire de sa World Cinema Foundation,<br />
de splendeurs visuelles telles que Le<br />
Narcisse noir, Soy Cuba et Les Chaussons rouges.<br />
À ce titre, il mérite notre reconnaissance<br />
éternelle…<br />
FILMOGRAPHIE SÉLECTIVE (LONG MÉTRAGES)<br />
1969 : Who’s That Knocking At My Door – 1970:<br />
Street Scenes – 1972 : Bertha Boxcar / Boxcar<br />
Bertha – 1973 : Mean Streets – 1974 : Alice<br />
Doesn’t Live Here Anymore / Alice n’est plus<br />
ici – 1976 : Taxi Driver – 1977 : New York, New<br />
York – 1978 : The Last Waltz – 1980 : Raging<br />
Bull – 1983 : The King of Comedy / La Valse des<br />
pantins – 1985 : After Hours – 1986 : The Colour<br />
of Money / La Couleur de l’argent – 1988 :<br />
The Last Tempation of Christ / La Dernière Tentation<br />
du Christ – 1989 : New York Stories (un<br />
épisode : Life Lessons) – 1990 : The Godfellas<br />
/ Les Aff ranchis – 1991 : Cape Fear / Les Nerfs<br />
à vif – 1993 : The Age of Innocence / Le Temps<br />
de l’innocence – 1995 : Casino – 1997 : Kundun<br />
– 1999 : Bringing Out The Dead / À tombeau<br />
ouvert – 2002 : Gangs of New York – 2005 : Aviator<br />
; No Direction Home, Bob Dylan – 2007 : The<br />
Departed / Les Infi ltrés – 2008 : Shine a Light<br />
– 2010 : Shutter Island – 2011 : George Harrison,<br />
Living in a Material World ; Hugo Cabret.<br />
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