Catalogue festival Guédiguian 2012 - Ciné Meaux Club
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une unité de production de l’armée américaine.<br />
Deux séries sont supervisées par Frank<br />
Capra, assisté d’Anthony Veiller pour le scénario<br />
ou la réalisation (Capra en réalise lui-même<br />
un certain nombre), Anatole Litvak (id.), Walter<br />
Huston pour la narration, Tiomkin pour la musique<br />
: Pourquoi nous combattons et Know Your<br />
Enemy sont de remarquables exemples de cinéma<br />
documentaire de propagande. Certains<br />
épisodes destinés uniquement aux soldats<br />
sont jugés tellement bons qu’ils sortent aussi<br />
pour le grand public.<br />
A son retour du service (1946), le colonel Capra<br />
fonde, avec ses confrères William Wyler et Georges<br />
Stevens, Liberty Films Inc. C’est au sein des<br />
studios de la RKO qu’il réalise le premier fi lm de<br />
cette nouvelle compagnie de production indépendante<br />
: James Stewart, Lionel Barrymore et<br />
la jeune Donna Reed en sont les vedettes. Ce<br />
fi lm, le préféré de Capra, qui porte ses thématiques<br />
et son esthétique au plus haut point, n’est<br />
pourtant plus en phase avec le public. Le succès<br />
est médiocre et Capra ne retrouvera plus la<br />
popularité qui fut la sienne avant guerre : son<br />
idéologie gentiment utopiste et un peu surannée<br />
après les horreurs de la guerre n’accroche<br />
plus le public qui fait un triomphe au fi lm Les<br />
Plus belles années de notre vie (1946, 10 Oscars)<br />
de son ami William Wyler, qui fait du traumatisme<br />
des soldats son sujet principal. Capra persévère<br />
et parvient à monter un projet avec l’aide<br />
de Spencer Tracy qui veut absolument faire un<br />
fi lm avec lui : L’Enjeu (1948) obtient un si médiocre<br />
succès que Liberty doit être revendue<br />
à la Paramount. Non content de devoir vendre<br />
sa précieuse collection d’éditions originales de<br />
Dickens, son écrivain préféré, Capra est en plus<br />
obligé de signer un contrat auprès de la fi rme<br />
au cercle d’étoiles pour laquelle il est à deux reprises<br />
contraint de « servir de serpillière » à l’insupportable<br />
crooner Bing Crosby (1949-1950).<br />
Les temps ont vraiment changé : si les studios<br />
paraissent encore aux mains des moguls, les<br />
fi lms sont aux mains des vedettes. Capra tourne<br />
encore quelques fi ctions pour la United Artists,<br />
après quelques documentaires scientifi ques<br />
pour la télévision (1952-1956), mais là encore,<br />
il n’a plus la main sur la réalisation qui est vampirisée<br />
par des stars impossibles à diriger, Frank<br />
Sinatra (1959) d’abord, puis Glenn Ford (1961).<br />
Un dernier fi lm avec John Wayne ne se fait pas<br />
et Capra ne dirigera plus jamais. Commence<br />
pour lui un purgatoire qui s’achève avec la publication<br />
triomphale de son autobiographie<br />
BIOGRAPHIE FRANK CAPRA<br />
85<br />
en 1971 (premier dossier jamais consacré à<br />
Capra dans une revue française, Positif n°133,<br />
décembre 1971, ouvert par l’édito de Michel<br />
Ciment, Soleil et pluie sur Frank Capra). Entre<br />
temps, son fi lm La Vie est belle est devenu<br />
un classique de la télévision, une manière de<br />
conte de Noël du petit écran et le nom de Capra<br />
revient sur toutes les lèvres. Les universités<br />
américaines lui assurent des tournées de conférences<br />
enthousiastes. Capra s’éteint en 1991 en<br />
Californie.<br />
Son oeuvre présente une cohérence unique.<br />
Elle refl ète l’adhésion pleine et entière du petit<br />
immigré italien aux valeurs américaines<br />
moyennes apprises dans les livres d’histoire et<br />
symbolisées par Jeff erson et Hamilton. L’individualisme<br />
forcené tempéré par l’idéologie du<br />
bon voisinage, la liberté d’entreprendre ou de<br />
vivre comme on l’entend, le droit à la poursuite<br />
du bonheur qui ne doit pas être corrompu par<br />
l’obsession de l’argent, le culte de la petite ville<br />
vécue comme une americana urbaine, les valeurs<br />
chrétiennes du mariage et de la famille,<br />
c’est tout cela qui fonde l’univers très manichéen<br />
des fi lms de Capra, à la fois très proche<br />
du conte (la fi gure de Cendrillon homme ou<br />
femme revient souvent et permet d’abolir la<br />
lutte des classes) et très soucieux de réalisme<br />
(chaque personnage, même secondaire, est extrêmement<br />
précis). Ce populisme, à entendre<br />
au sens premier du terme, où l’innocent (fi gure<br />
christique) fi nit toujours par triompher du mal<br />
par l’exemple de sa bonté, pourrait apparaître<br />
un peu désuet. Il n’en est rien tant Capra se<br />
montre un metteur en scène vigoureux, au service<br />
de l’action, un directeur d’acteur hors pair<br />
et dont le montage est toujours serré au plus<br />
près des réactions attendues du public (il les<br />
enregistrait lors des avant-premières). C’est à<br />
ce titre, grand metteur en scène, que Capra doit<br />
d’être encore visible aujourd’hui.<br />
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