Quelle place pour la puissance publique - Claude Rochet

IHESI – 14 ème SNE – 2002/2003 – GDS n° 1 : "Entreprises et intelligence économique –
Quelle place pour la puissance publique ?"
« Nous devons construire un système économique global qui travaille pour les États-
Unis… Une responsabilité du Département d’État consiste à observer si les intérêts des
firmes américaines sont traités correctement et à faire en sorte que les obstacles
inéquitables à la compétition soient levés » (Madeleine ALBRIGHT, ancien Secrétaire
d'État).
L’État est donc placé en première ligne, mais l’intention est claire, il ne s’agit pas d’une
position défensive, bien au contraire le dispositif est résolument offensif et conquérant.
Pour en avoir la certitude, il suffit de relire une déclaration de janvier 1995 de Stuart
ELZENSTAT, alors Sous-Secrétaire d’État au commerce : « Notre administration jette
désormais tout son poids derrière des firmes américaines pour obtenir des contrats à
l’étranger ».
La culture américaine est fortement imprégnée de l’influence anglaise qui dans son
histoire a toujours engagé ses moyens (militaires et diplomatiques) pour défendre ses
intérêts économiques à la fois pour l’extension de son empire et la préservation de ses
échanges commerciaux. Le but de la politique est la supériorité économique et
commerciale, selon l’aphorisme « l’Angleterre se bat pour commercer, la France
commerce pour se battre ». Les Etats-Unis, devenus à partir de la deuxième moitié du
XX ème siècle première puissance économique mondiale, se sont ouverts à la conquête
d’autres marchés que ceux du continent.
Le but recherché est de permettre aux entreprises américaines de conquérir les marchés
internationaux en leur offrant l’aide de l’ensemble de l’administration américaine en
s’attaquant si nécessaire à leurs compétiteurs directs comme les principaux pays
européens (France, Allemagne, Royaume-Uni) ainsi que le Canada et le Japon.
Aujourd’hui il ne fait plus aucun doute que les États-Unis mettent en œuvre une
stratégie d’intelligence économique d’État, sur le théâtre mondial où se joue la guerre
économique.
La concurrence est inévitable. Pour y faire face une politique d’ensemble tant en matière
de défense du patrimoine que de conquête de marchés est indispensable. Le système
américain intègre cette globalité à la fois par l’adoption d’une loi protectrice contre
l’espionnage économique (« The Economic Espionage Act du 11 octobre 1996 » et par
la recherche de prise de contrôle de technologies étrangères), des actions offensives
contre des firmes développant des technologies non contrôlées par les États-Unis
comme cela a été récemment le cas avec des entreprises françaises comme GEMPLUS
ou encore à l’encontre d’ALTRAN, après que celle-ci eut fait l’acquisition de la firme
mère des sociétés de conseil en stratégie américaines, Arthur D. Little (ADL).
Pour tout Américain il s’agit d’œuvrer pour son pays, l’encouragement venant du plus
haut niveau de l’État : c'est ainsi que le Président Bill CLINTON pouvait affirmer que
« Tous les emplois de haute technologie devront rester aux États-Unis où tout devra être
fait pour les rapatrier s’ils ne s’y trouvent pas déjà ». En conséquence, une entreprise est
américaine dès lors qu’elle sert les intérêts des États-Unis…
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