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70 LES TEXTURES MODIFIÉES, MODE D’EMPLOI<br />
ADAPTER L’AIDE AUX REPAS<br />
Céline Jeannier, diététicienne, nous détaille l’importance de<br />
l’aide au repas et notamment le rôle de la cuillère dans <strong>les</strong> institutions<br />
gériatriques.<br />
« L’aide au repas : un soin à part entière<br />
La qualité de l’aide au repas influence le taux de consommation<br />
alimentaire et par là même le statut nutritionnel. Un certain<br />
savoir être et savoir-faire est alors primordial.<br />
Face à l’augmentation de la dépendance dans <strong>les</strong> institutions<br />
gériatriques, donner à manger une alimentation de texture modifiée<br />
à une personne âgée fait souvent partie du quotidien des<br />
soignants.<br />
Pour autant, cet acte ne doit devenir ni routinier ni anodin mais<br />
au contraire maintenir le résident en position de sujet et non<br />
d’objet. En effet, devant la répétitivité de cette activité, le temps<br />
imparti pour la réaliser, la fatigue, le stress…, le risque pour le<br />
soignant est de procéder avec le plus grand soin et <strong>les</strong> plus<br />
grandes précautions, tout en oubliant d’entrer en relation avec<br />
la personne qui se retrouve alors davantage réifiée, chosifiée.<br />
Aussi, il convient de prendre en compte l’impact psychologique<br />
de ce soin pour le résident qui cumule le handicap de la perte<br />
d’autonomie à celui de difficultés de déglutition et/ou mastication<br />
ne lui permettant plus de manger une alimentation ordinaire.<br />
Cela peut engendrer un sentiment de frustration voir de<br />
révolte car la personne âgée n’ayant bien souvent plus le choix<br />
de ce qu’elle mange, ni la façon dont elle mange, le repas n’est<br />
alors plus synonyme de moment de plaisir. En outre, en raison<br />
de la dépendance physique, le sentiment de perte de dignité<br />
peut s’installer.<br />
La cuillère en question<br />
Dès lors que l’alimentation est de texture mixée ou moulinée,<br />
la cuillère est un couvert particulièrement adapté pour l’aide au<br />
repas contrairement à la fourchette.<br />
Dans le cas d’une aide uniquement partielle, l’usage de la<br />
grosse cuillère peut être intéressant dans un souci de maintien<br />
de l’autonomie. En effet, certaines personnes présentent des<br />
troub<strong>les</strong> praxiques (1) , il est alors plus aisé pour el<strong>les</strong> de prendre<br />
et de porter à leur bouche <strong>les</strong> aliments réduits sous forme de<br />
purée avec une grosse cuillère plutôt qu’avec une petite. Le soignant<br />
aide la personne à initier à nouveau le mouvement et peut<br />
se retrouver ainsi à donner à manger à la grosse cuillère ou tout<br />
simplement aider la personne à terminer son assiette en regroupant<br />
« <strong>les</strong> restes ».<br />
Lorsque l’aide au repas s’accentue, cette « grosse cuillère » est<br />
délaissée au profit de la « petite cuillère ». En effet, de par sa<br />
taille, la grosse cuillère est vite agressive, intrusive. Non seulement<br />
elle peut b<strong>les</strong>ser la bouche et <strong>les</strong> lèvres de la personne<br />
alimentée mais peut aussi entraîner un certain inconfort responsable<br />
de consommations moindres : il n’est pas aisé à déglutir<br />
le contenu d’une grosse cuillère bien remplie lorsque la consistance<br />
du plat mixé est un peu trop épaisse ou pâteuse. La petite<br />
cuillère est alors le couvert le mieux adapté auquel il convient<br />
d’associer un certain savoir être et savoir-faire. Elle favorise <strong>les</strong><br />
consommations alimentaires garantes de la prévention de la<br />
dénutrition chez des personnes déjà fragilisées.<br />
S’il ne nous viendrait pas à l’idée de donner à manger à un<br />
enfant avec une grosse cuillère, ou d’y avoir recours pour nous<br />
même, cette pratique est loin d’être bannie de toutes <strong>les</strong> unités<br />
de soins gériatriques.<br />
(1) incapacité partielle à effectuer des mouvements coordonnés