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ON EN PARLE<br />
VOYAGE<br />
LE COMMENCEMENT<br />
DE LA FIN<br />
Traduit en huit langues,<br />
un roman poétique et âpre<br />
sur la liberté et notre place<br />
dans le monde.<br />
LORSQUE Michael Kabongo,<br />
un enseignant anglo-congolais,<br />
arrive à l’aéroport de Londres Heathrow, il lui reste<br />
moins de 1 heure pour s’enregistrer, passer les contrôles<br />
de sécurité et monter à bord. Ce vol, il ne peut pas<br />
le rater. Il a décidé que les États-Unis, le mythique<br />
« pays de la liberté », accueilleraient son dernier voyage.<br />
Celui par lequel, d’un océan à l’autre, le sentiment<br />
de solitude, d'exclusion et d’injustice qui l’accable<br />
se métamorphoserait, peut-être, en une respiration<br />
rédemptrice. Une mise entre parenthèses des fractures<br />
de l’âme. De New York à San Francisco, le voilà en<br />
chemin, avec l’intention de vivre quelques rêves jusqu'à<br />
ce qu’il n’ait plus un sou. On retrouve dans la prose<br />
magnétique de JJ Bola les thèmes qu’il ne cesse d’explorer :<br />
la force destructrice de la masculinité et du racisme,<br />
versus la puissance de restauration de l’amour. ■ C.F.<br />
JJ BOLA, Le Chemin du retour,<br />
Mercure de France, 250 pages, 24 €.<br />
PREMIER ROMAN<br />
YIN ET YANG<br />
DE L’INCONSCIENT<br />
Un récit singulier, qui explore<br />
les richesses, les écueils et la magie<br />
de la transculturalité.<br />
DJINNS, faunes, génies ou démons,<br />
comment démêler le vrai du faux, le clair de l’obscur, le<br />
sensé du fou ? De ces variations, de ce flou, entre mondes<br />
visible et invisible, Seynabou Soko, écrivaine et musicienne<br />
franco-sénégalaise de 29 ans, tire un récit habité et<br />
questionnant. Car qu’est-ce qui détermine, ou non, une<br />
pathologie psychique, une maladie de l’âme ou une<br />
hypersensibilité au tout et au rien, au rationnel et au<br />
surnaturel ? Ce n’est pas un hasard si Naboo (son pseudo<br />
de compositrice-interprète) cite le groupe de rap français<br />
PNL en exergue : « J’t’abîme, m’abîme, j’dois t’oublier /<br />
J’suis le djinn de mon djinn, j’suis bousillé. » Parce que les<br />
états de conscience ou les phénomènes surréels nous disent<br />
la dissemblance des sociétés et des cultures, la peur de la<br />
différence, la force des croyances et des représentations.<br />
Mais aussi, le lien et le pouvoir de l’imaginaire. Et surtout,<br />
la liberté d’être et l’acceptation de l’autre. ■ C.F.<br />
SEYNABOU SONKO, Djinns, Grasset, 180 pages, 18 €.<br />
INTERVIEW<br />
Oumy Bruni<br />
Garrel<br />
LE GRAND<br />
ÉCART<br />
Pour son premier grand<br />
rôle au cinéma, à 14 ans, la JEUNE<br />
ACTRICE CRÈVE L’ÉCRAN ! Née<br />
au Sénégal, fille adoptive de deux<br />
grands noms du cinéma d’auteur<br />
français, les comédiens et cinéastes<br />
Valeria Bruni Tedeschi et Louis<br />
Garrel, elle incarne avec aplomb<br />
dans Neneh superstar une fillette<br />
noire qui veut conquérir le monde<br />
très formaté de la danse classique…<br />
<strong>AM</strong> : Qui est Neneh ?<br />
Oumy Bruni Garrel : C’est une petite fille de 12 ans<br />
qui habite en banlieue et veut rentrer à l’Opéra de Paris, parce<br />
que c’est son plus grand rêve. Sauf que là-bas, les Noirs et les<br />
Arabes, jamais de la vie on va en voir ! Mais elle y rentre, et<br />
genre c’est incroyable, sauf qu’elle est en conflit avec une prof<br />
qui est super méchante avec elle, et on ne sait pas pourquoi<br />
elle déteste Neneh. Je fais de la danse tous les jours, je suis<br />
en sport-étude de danse, et je me suis bien vue dans cette<br />
petite fille. Mais il n’y a pas que de la danse classique dans<br />
le film, il y a aussi du hip-hop. Et ça montre que c’est difficile,<br />
qu’il y a plein de choses qui sont dures pour les danseuses.<br />
Est-ce que tu as rencontré les mêmes problèmes qu’elle ?<br />
Pas aussi fort, mais oui, bien sûr, parce que je suis<br />
noire, et qu’en France, les danseuses classiques noires,<br />
c’est vraiment hyper rare, parce que c’est un « monde<br />
de Blancs ». Par exemple, dans mon cours de danse<br />
classique, je suis la seule personne noire, alors que ce<br />
n’est pas le cas en hip-hop. Au départ, pour moi, c’était<br />
comme pour toutes les petites filles : les mères qui les<br />
poussent à aller à la danse, sauf que normalement,<br />
elles arrêtent au bout de cinq ans, et moi j’ai continué !<br />
À un moment, Neneh dit : « J’en ai marre d’être noire,<br />
je voudrais être blanche comme tout le monde »…<br />
DR (2) - MIKA COTELLON<br />
12 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>435</strong>-<strong>436</strong> – DÉCEMBRE 2022-JANVIER 2023