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PERSPECTIVES<br />
dangers qui menaçaient alors se sont,<br />
depuis, réalisées », écrit-il. « Nous avions<br />
mis l’accent sur la rapide croissance de<br />
la population », et avions « posé cette<br />
alternative » : « instruire la jeunesse et<br />
diversifier l’économie pour lui fournir<br />
du travail », ou ne rien faire et « endurer<br />
l’onde de choc d’une bombe démographique<br />
». Résultat : « Rien n’a été fait,<br />
et la bombe démographique a explosé »,<br />
fulmine-t-il. L’universitaire remarque<br />
également que, dès les années 1990, lui<br />
et ses confrères avaient pointé le « risque<br />
de conflit croissant entre pastoralisme et<br />
agriculture dans la région de la Middle<br />
Belt » et d’une « pression islamiste au<br />
Sahel ». Des menaces qualifiées, se souvient-il,<br />
de « pure spéculations » ! « Tout<br />
est pire qu’avant », cingle le professeur.<br />
L’économie demeure largement rentière,<br />
dépendante du pétrole et de son cours<br />
fluctuant. Le pays exporte des produits<br />
bruts et importe des produits transformés,<br />
malgré de récents et louables<br />
efforts de diversification économique,<br />
menés notamment par le conglomérat<br />
du milliardaire Aliko Dangote [voir notre<br />
numéro 401, février 2020].<br />
PIPELINES ILLÉGAUX<br />
ET AVOIRS CAPTIFS<br />
En 2050, avec 450 millions d’habitants<br />
en prévision, le Nigeria pourrait<br />
devenir le troisième pays le plus peuplé<br />
au monde, derrière l’Inde et la Chine…<br />
Aujourd’hui incapable de nourrir ses<br />
210 millions d’habitants, il devrait en<br />
abriter plus du double dans moins de<br />
trente ans ! Pourtant, le pays, 131 e sur<br />
190 sur l’indice Doing Business de la<br />
Banque mondiale, ne prend pas le chemin<br />
d’un changement de cap. L’environnement<br />
n’est guère propice aux affaires.<br />
Un récent exemple : peinant à rapatrier<br />
ses gains du Nigeria, conservés par les<br />
autorités locales en mal de devises étrangères,<br />
la compagnie aérienne Emirates a<br />
annoncé fin octobre la suspension de ses<br />
liaisons vers Lagos et Abuja ! La prestigieuse<br />
société des Émirats arabes unis<br />
se déclare dans l’incapacité de maintenir<br />
ses coûts opérationnels et sa viabilité<br />
commerciale dans le pays. Début septembre,<br />
elle avait déjà suspendu ses<br />
vols. Dix jours plus tard, les autorités lui<br />
avaient restitué 256 millions de dollars,<br />
environ la moitié de la somme totale.<br />
Mais faute de solution à long terme,<br />
Emirates a préféré jeter l’éponge. Au<br />
lieu de temporiser, le ministre de l’Aviation,<br />
Hadi Abubakar Sirika, s’est montré<br />
narquois : « Nous n’allons pas nous laisser<br />
intimider. Nous sommes le plus gros<br />
marché d’Afrique », laissant entendre que<br />
la compagnie du Golfe n’aurait d’autre<br />
choix que de revenir. Ce départ ne va<br />
pas améliorer la réputation du Nigeria,<br />
écornée depuis deux décennies par<br />
les méfaits internationaux de la mafia<br />
(arnaques sur Internet, prostitution, stupéfiants…).<br />
Par leur retentissement, ces<br />
scandales éclipsent les atouts du géant<br />
ouest-africain, comme sa bouillonnante<br />
créativité, qui s’expriment notamment<br />
dans les start-up et les arts (tels l’afrobeat<br />
et Nollywood).<br />
Autre exemple calamiteux : les autorités<br />
ont annoncé en octobre la découverte,<br />
dans l’État du Delta, au sud, d’un<br />
« pipeline illégal » de 4 kilomètres de<br />
long, qui dérobait du pétrole depuis une<br />
dizaine d’années, rapporte la plate-forme<br />
AUDU MARTE/AFP<br />
52 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>435</strong>-<strong>436</strong> – DÉCEMBRE 2022-JANVIER 2023