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AM 435-436

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RÉCIT<br />

Hamza Hraoui<br />

« La compagnie joue<br />

dans la cour des grands »<br />

Expert en aviation et directeur général<br />

du cabinet d’affaires publiques MGH Partners<br />

<strong>AM</strong> : Comment décryptez-vous le succès,<br />

et surtout la résilience d’Ethiopian Airlines<br />

face aux crises successives ?<br />

Hamza Hraoui : Sa robustesse remonte aux origines.<br />

Elle devait surtout assurer le désenclavement d’une<br />

Éthiopie sans aucun débouché maritime. Avec cet ADN<br />

de « libérateur », en quelque sorte, l’État a mobilisé des<br />

moyens considérables. On a aussi vu à quelle vitesse la<br />

compagnie s’est adaptée aux crises successives. En pleine<br />

pandémie de Covid-19 notamment, Ethiopian a maintenu<br />

une cadence opérationnelle presque au niveau normal.<br />

Principalement grâce au fret. Avec une fiabilité reconnue<br />

par les opérateurs transcontinentaux et les<br />

organisations internationales. Autre point<br />

fort à relever, son ambition stratégique<br />

transcontinentale : elle s’est dotée de<br />

moyens pour assurer des liaisons régulières<br />

vers l’Europe, l’Asie, l’Amérique du Nord.<br />

Elle a même préempté des routes négligées<br />

par les autres compagnies, comme<br />

Afrique-Amérique du Sud. Enfin, la bonne<br />

gouvernance est l’élément clé. Même si<br />

l’État est actionnaire à 100 %, la gestion<br />

de l’entreprise est sanctuarisée. Celui-ci ne<br />

subventionne pas directement mais accorde<br />

des prêts bonifiés, lui octroie une marge<br />

de manœuvre très large pour gérer les<br />

bénéfices, et ne réclame pas de dividendes.<br />

Qui peut la concurrencer<br />

sur le continent ?<br />

Sur le plan africain stricto sensu, quand on parle<br />

d’Ethiopian, on pense instinctivement à Royal Air Maroc<br />

(R<strong>AM</strong>) et à South African Airways. La première a été<br />

fortement freinée par le contexte pandémique, et a vu<br />

son plan de développement être transformé en plan de<br />

renflouement par l’État. La relance économique qui a<br />

accompagné la levée des boucliers sanitaires a fait du<br />

bien, mais on attend toujours un plan stratégique de<br />

renouvellement pour une ambition transcontinentale. Sa<br />

rentabilité s’appuie essentiellement sur des destinations<br />

européennes ainsi que sur quelques routes ouestafricaines.<br />

La seconde, South African Airways, n’a pas<br />

mieux encaissé le choc sanitaire et reste engluée dans<br />

des problèmes de gouvernance. Sa privatisation partielle<br />

(51 %) donnera certainement une bouffée d’air à ses<br />

finances, qui avaient besoin de 3,5 milliards de dollars<br />

pour la réalisation de son plan de sauvetage. Mais d’autres<br />

compagnies mondiales ont désormais un point de vue<br />

différent sur le vaisseau amiral éthiopien. Avec une taille<br />

combinée de leurs flottes de plus de 500 avions, Qatar<br />

Airways et Emirates veulent régner sans partage sur le<br />

marché asiatique. La bataille du ciel<br />

« La bonne<br />

gouvernance<br />

est l’élément<br />

clé. Même<br />

si l’État est<br />

actionnaire<br />

à 100 %, la<br />

gestion de<br />

l’entreprise est<br />

sanctuarisée . »<br />

sera rude pour Ethiopian, car elle joue<br />

maintenant dans la cour des grands.<br />

Quel regard portez-vous<br />

sur la compagnie, sa flotte<br />

et les services qu’elle propose ?<br />

Concernant la qualité de sa flotte,<br />

Ethiopian Airlines marque des points.<br />

C’est la première compagnie africaine à<br />

opérer avec les dernières technologiques<br />

embarquées, comme sur le dernier né<br />

d’Airbus, l’A350, ou encore le 737 Max,<br />

même si parfois, cela représente des<br />

risques (comme le crash du vol 302 le<br />

10 mars 2019). Elle assure deux centres<br />

de maintenance de rang mondial, et<br />

c’est l’une des rares qui est capable de<br />

fournir des services « lourds » sur des<br />

A350, B73, B757, B767, B777-200/300 ou B787. Enfin, la<br />

société a compris qu’une refonte de l’expérience client – le<br />

parent pauvre de son offre – était cruciale. Cela démarre<br />

dès le premier contact, et très souvent, il intervient sur le<br />

site Internet – lequel devra être amélioré prochainement.<br />

Quant au hub de Bole, il connaîtra un trafic beaucoup<br />

plus important lors des cinq prochaines années. Là aussi,<br />

il s’agira d’être à la hauteur des ambitions, en proposant<br />

une meilleure expérience pour les passagers. ■<br />

DR<br />

74 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>435</strong>-<strong>436</strong> – DÉCEMBRE 2022-JANVIER 2023

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