Exode (des Kurdes d'Irak) - Institut kurde de Paris
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Par dizaines <strong>de</strong> miUiers, les Kur<strong><strong>de</strong>s</strong> irakiens fuient par tous les moyens la répression <strong><strong>de</strong>s</strong> troupes <strong>de</strong> Saddam Hussein.<br />
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La gran<strong>de</strong> débâcle <strong><strong>de</strong>s</strong> pechmergas<br />
SILOPI<br />
(frontière turco-irakienne)<br />
<strong>de</strong> nos envoyés spéciaux<br />
X. G.AUTIER et CI. LORI EUX<br />
En un week-end, du vendredi soir<br />
au lundi, le fragile mais tenace espoir<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> Kur<strong><strong>de</strong>s</strong> <strong>d'Irak</strong> s'est effondré.<br />
L'armée <strong>de</strong> Saddam Hussein avançait<br />
simultanément sur plusieurs<br />
fronts d'est en ouest: Kirkouk, Erbil<br />
et Dohouk. Toutes les routes, et en<br />
partiçulier les voies d'accés à Erbil,<br />
siégE~<strong><strong>de</strong>s</strong> autorités provinciales, et<br />
Dohouk, étaient envahies par un flot<br />
continu <strong>de</strong> dizaines <strong>de</strong> milliers <strong>de</strong><br />
réfugiés'. Les familles, parfois accompagnées<br />
<strong>de</strong> pechmergas (combattants<br />
kur<strong><strong>de</strong>s</strong>), fuyaient, terrorisées"<br />
<strong>de</strong>vant elles, vers la<br />
montagne.<br />
Une jeune femme, encore sous le<br />
choc, rencontrée à un carrefour<br />
au-<strong><strong>de</strong>s</strong>sus <strong>de</strong> Dohouk, criait à qui<br />
voulait entendre : " Ils bombar<strong>de</strong>nt<br />
avec <strong><strong>de</strong>s</strong> avions et <strong><strong>de</strong>s</strong> hélicoptères!<br />
'" Tous les véhicules en état <strong>de</strong><br />
marcl,e semblaient mobilisés : camions,<br />
taxis Volkswagen, tracteurs<br />
agricoles, bulldozers dont la benne<br />
abritait une famille et ses baluchons,<br />
accompagnés parfois <strong>de</strong> troupeaux<br />
<strong>de</strong> chévres et <strong>de</strong> vaches.<br />
Mais la plupart n'aVaient que<br />
leurs pieds pour fuir : ce pére qui<br />
portait sur son dos le berceau <strong>de</strong><br />
bois <strong>de</strong> son bébé; cette gamine <strong>de</strong><br />
13 ans à peine, en costume multicolore<br />
traditionnel <strong>kur<strong>de</strong></strong>, trainant une<br />
Kalachnikov plus gran<strong>de</strong> qu'elle; ce<br />
grand-pére en pantalon bouffant et<br />
keffieh enturbanné ti rant la patte<br />
<strong>de</strong>rriére les siens.<br />
Il y a moins d'un mois, tout un<br />
peuple courageux prenait les armes<br />
contre" le dictateur Saddam ". C'est<br />
désormais ce même peuple au <strong><strong>de</strong>s</strong>tin<br />
tragique qui reprend le chemin<br />
<strong>de</strong> l'exo<strong>de</strong>. Les femmes et les enfants<br />
étaient <strong>de</strong>ux fois plus nombreux<br />
que les hommes. Par petits<br />
groupes, les pechmergas, armés <strong>de</strong><br />
fusils d'assaut et <strong>de</strong> lance-missiles<br />
SAM 7, suivaient la débâcle. D'autres<br />
combattaient encore, mais <strong>de</strong><br />
plus en plus faiblement, à Dohouk.<br />
Sur trois fronts<br />
Les trois fronts sur lesquels les<br />
forces irakiennes ont lancé leur<br />
contre-offensive dans le nord donnent<br />
tous les signes <strong>de</strong> l'effondrement.<br />
Kirkouk. Samedi aprés-midi,<br />
Massoud B3rzani, le chef <strong><strong>de</strong>s</strong> Kur<strong><strong>de</strong>s</strong>,<br />
nous déclarait que ses forces<br />
contrôlaient toujours une partie <strong>de</strong><br />
Kirkouk, mais qu'elles n'étaient pas<br />
parvenues à déloger l'armée irakienne<br />
renforcée par <strong><strong>de</strong>s</strong> moudjahidin<br />
du peuple iraniens, ces mercenaires<br />
<strong>de</strong> Saddam. accrochés à la<br />
localité <strong>de</strong> Altun Kapre qui contrôle<br />
la route d'Erbil à Kirkouk.<br />
Erbil. Samedi soir, malgré un<br />
aspect encore normal, la ville était<br />
fébrile. Le commandant en chef, Abdullah<br />
Cosrat. n'écartait pas une<br />
possible attaque <strong><strong>de</strong>s</strong> laubourgs <strong>de</strong> la<br />
ville pour les heures suivantes. On<br />
<strong>de</strong>vait apprendre. sur la route,<br />
qu'elle etait tombée sans coup férir<br />
Dohouk. La ville du nord a été<br />
attaquée par <strong><strong>de</strong>s</strong> hélicoptéres toutle<br />
week-end, provoquant la luite éperdue<br />
<strong>de</strong> la population <strong>de</strong> celte agglomération<br />
proche <strong>de</strong> la Turquie et ses<br />
villages voisins. Un mé<strong>de</strong>cin ramenant<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> blessés graves, lemmes et<br />
enlants, <strong>de</strong> Kirkoud à Zahro, parlait<br />
<strong>de</strong> " pilonnages continus, y compris<br />
au naoalm et au phosphore" entre<br />
samedi à la tombée <strong>de</strong> la 'nuit et<br />
dimanche à l'aube. Mais Dohouk,<br />
selon eux, était toujours aux mains<br />
<strong><strong>de</strong>s</strong> pechmergas. Pour combien <strong>de</strong><br />
temps?<br />
Au centre, autour <strong>de</strong> Mossoul,<br />
dont les lorces gouvernementales<br />
n'ont jamais perdu le contrôle, la<br />
situation semblait moins claire. En<br />
revanche, vendredi soir, un peloton<br />
<strong>de</strong> chars a pilonné les positions<br />
pechmergas, à l'est <strong>de</strong> la métropole<br />
pétroliére du nord irakien, causant,<br />
selon le témoignage d'un Kur<strong>de</strong><br />
. blessé griévement à l'hôpital d'Erbil,<br />
<strong>de</strong> lour<strong><strong>de</strong>s</strong> pertes aux forces rebelles<br />
qui ne pouvaient pas risposter,<br />
les pechmergas manquant tragiquement<br />
<strong>de</strong> puissance <strong>de</strong> feu.<br />
La bataille <strong>de</strong> Kirkouk<br />
En outre, le chel du PDK (parti<br />
démocratie du Kurdistan) reconnaissait<br />
que <strong><strong>de</strong>s</strong> miliciens kur<strong><strong>de</strong>s</strong>, apparemment<br />
ralliés à la révolte, avaient<br />
<strong>de</strong> nouveau retourné leur veste. Ils<br />
avaient ainsi permis aux forces irakiennes<br />
<strong>de</strong> prendre la petite ville <strong>de</strong><br />
Shakham.<br />
Samedi aprés-midi. alors que<br />
l'exo<strong>de</strong> massil commençait sur les<br />
routes reliant Erbil à la montagne<br />
<strong>kur<strong>de</strong></strong>, Barzani déclarait : " Nous<br />
avons abandonné <strong><strong>de</strong>s</strong> positions pour<br />
épargner <strong><strong>de</strong>s</strong> civils. " La bataille <strong>de</strong><br />
Kirkouk - la ville a été libérée par<br />
les pechmergas le 21 mars, pèrdue<br />
puis reprise le 28 - a déjà coOté<br />
beaucoup <strong>de</strong> vies innocentes. On se<br />
battrait désormais dans plusieurs'<br />
quartiers <strong>de</strong> la ville. Mais Massoud<br />
Barzani prévenait: " Les forces <strong>de</strong><br />
Saddam ne pourront jamais se rappe/er<br />
avoir pu se dèp/acer facilement<br />
dans notre Kurdistan. "<br />
Cependant, le rêve qui avait commencé<br />
le 11 mars avec la " libération<br />
" d'Erbil est en train <strong>de</strong> s'écrouler.<br />
Comme au début <strong><strong>de</strong>s</strong> années 60 !<br />
Comme en 1975! Calme mais amer,<br />
Massoud Barzani déclarait samedi:<br />
" Personne, aucun pays du mon<strong>de</strong><br />
ne nous ai<strong>de</strong>. "<br />
Sur les bords <strong>de</strong> la route poussiéreuse,<br />
à quelques kilométres <strong>de</strong><br />
Dohouk. un vétéran <strong><strong>de</strong>s</strong> trois guerres<br />
kurdo-irakiennes laissait éclater<br />
son désespoir : " Hadji Bush, où<br />
es-tu donc? " Et levant un gamin <strong>de</strong><br />
cinq ans terrorisé à bout <strong>de</strong> bras :<br />
" Tu nous avait promis ton secours.!<br />
Maintenant. lui et ses frères vont<br />
être massacrès par Saddam !"<br />
X. G. etC. L.<br />
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