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Soulagé, je tournai les talons, très conscient du fusil qui visait mon dos. Dès que l’allée fut passée, je
me détendis.
Pourtant, ma tête bourdonnait de questions. Pourquoi un loup- garou était-il venu voir Seamus afin de
le mettre en garde contre nous ? Comment savait-il pour les parents de Seamus ? La vengeance avait été
familiale. Enfin, pourquoi ce dernier avait-il peur au point d’avoir bardé son jardin de pièges à loup et
recevait les visiteurs avec un fusil ?
Je m’enfonçai dans les bois en trottinant. Une vingtaine de minutes plus tard, j’allais enjamber une
souche lorsque je m’arrêtai.
Ce n’était pas seulement de moi que Seamus avait eu peur.
Il avait aussi peur de celui qui s’était transformé devant lui. Mais pourquoi ? Quel était le lien entre
ce loup-garou et Seamus ? Était- ce parce qu’il était le père de Katerina et qu’il voulait se venger ?
Avait-il un rapport avec l’accident ? Cela me frappa comme un boulet de canon. Il était en train de se
passer quelque chose et je ne comprenais pas. Je me pris la tête entre les mains, tiraillé par toutes les
questions, Seamus, le mystérieux loup-garou, les pièges, Katerina, la voiture de Tyler.
Je suppose que je dus disjoncter et que mon organisme dut en avoir assez. Je ressentis soudain un
terrible vertige tandis que le monde se brouillait tout autour de moi.
Je m’éclipsai.
Je ne saisis pas tout de suite ce qui se passait. Il faisait nuit. Je flottais au-dessus de l’université.
Devant moi, évitant les gardiens, quelqu’un montait sur l’échafaudage. Qui était intact, comme s’il ne
s’était rien passé.
Mes neurones se remirent en place. Je compris. Je venais de remonter le temps.
La dernière fois avait été si courte, si angoissante que je n’avais pas réalisé à quel point c’était
exaltant. J’étais là. Personne ne pouvait me voir. C’était incroyable. Il suffisait que je pense à avancer
pour avancer immédiatement vers où je voulais aller. Et là, j’avais la ferme intention de savoir qui était
le salopard qui avait essayé de me tuer.
Le cœur battant – car je ressentais les sensations de mon corps même s’il était invisible – je suivis
l’homme qui grimpait comme un singe. Son visage était masqué par une cagoule.
Il démonta habilement les écrous qui maintenaient les poutrelles, à chaque étage. C’était discret,
précis, quasiment invisible. Le type était un pro, pas de doute là-dessus.
Ensuite, il enduisit tout ce qu’il avait touché d’une poudre rouge. Le mélange qui avait certainement
bousillé le flair de Chuck. Il ébranla la structure. Qui vacilla. Il termina de masquer ce qu’il avait fait. Il
avait bien minuté son travail. Nos enquêteurs ont appris que les ouvriers avaient reçu un appel de leur
contremaître, disant qu’il manquait des éléments et qu’il était donc inutile de venir le lendemain matin. Ce
dernier avait juré n’avoir jamais passé cet appel. Soudain, comme un film qui accélère, je le vis
descendre de l’échafaudage, partir vers la route et disparaître dans les bois. Il n’avait pas utilisé de
voiture et il se faufilait avec aisance entre les arbres. Était- ce un loup ?
Enfin, alors que je flottais au-dessus de lui, il retira sa cagoule et je sursautai.
Pas un loup. Un soldat.