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Chapitre 9Humaines interdites<br />
Dans la Rolls, je dus me battre contre moi-même pour ne pas penser à maman et à <strong>ce</strong> qui venait de se<br />
passer. Elle ne risquait rien et n’était pas vraiment prisonnière, elle que personne ne pouvait arrêter.<br />
Mais la savoir à la merci des loups qui la nourrissaient et la lavaient me retournait le cœur.<br />
Les fées voletèrent <strong>au</strong>tour de la voiture, formant un étin<strong>ce</strong>lant cortège <strong>au</strong>tour de nous. Très maigres,<br />
les os creux, un corps d’humaine et des ailes de libellules, les fées sont de petites pestes qui adorent faire<br />
des far<strong>ce</strong>s <strong>au</strong>x humains. Avec les loups, elles sont bien plus circonspectes. En gober une de temps en<br />
temps ne dérangeait pas la meute. Beurk.<br />
 notre retour, grand-mère fit son habituel débriefing à Karl, mon grand-père, et un jour de plus fila.<br />
Puis il y eut la dernière convocation. Cette fois-ci, mes grands- parents étaient seuls dans le salon<br />
bleu. Le crépuscule tombait juste, <strong>ce</strong>tte heure entre chien et loup comme on dit, lorsque le monde retient<br />
son souffle avant de plonger dans la nuit.<br />
Leurs visages étaient graves. Je me raidis. Que se passait-il ?<br />
— Assieds-toi, Indiana, gronda ma montagne de grand-père, nous avons quelque chose à te dire.<br />
Intimidé, mal à l’aise, je me posai sur l’extrême bord d’un f<strong>au</strong>teuil bleu et or.<br />
— Grand-père, grand-mère, que se passe-t-il ?<br />
— Nous t’avons convoqué par<strong>ce</strong> que nous devons te parler d’une chose très importante, commença<br />
mon grand-père.<br />
Oui, ça je m’en doutais. C’était curieux, par<strong>ce</strong> qu’il avait l’air <strong>au</strong>ssi mal à l’aise que moi.<br />
— Oh, Karl, s’exclama grand-mère tandis que le silen<strong>ce</strong> s’installait, vas-y donc, tu vas faire mourir de<br />
curiosité <strong>ce</strong> garçon si tu ne continues pas !<br />
Grand-père grommela. Puis se pencha vers moi, pour <strong>au</strong>tant que sa vaste bedaine le lui permît.<br />
— Tu n’es pas un loup-garou, dit-il.<br />
Je ne répondis rien. C’était une éviden<strong>ce</strong>.<br />
— Nous pensions que l’union d’un loup avec une humaine n’<strong>au</strong>rait pas de conséquen<strong>ce</strong>s néfastes pour<br />
notre meute. Jusqu’à présent, les enfants de telles unions avaient toujours été des loups.<br />
Tiens, il ne parlait pas des « <strong>au</strong>tres », <strong>ce</strong>s bébés trop humains qui n’avaient pas eu le droit de vivre.<br />
— Mais pas moi, soulignai-je et je tentai de gommer l’amertume de ma voix.<br />
— Non. Pas toi, reprit grand-mère. Nous ne savons pas si <strong>ce</strong>la est dû <strong>au</strong>x gènes de rebrousse-temps de<br />
ta mère ou d’<strong>au</strong>tre chose. Mais <strong>ce</strong> n’est pas par<strong>ce</strong> que tu ne l’es pas que tes enfants ne le seront pas. Et<br />
c’est pour <strong>ce</strong>la que nous devons t’ordonner quelque chose.