Télécharger ce livre au format PDF

Et la bière. Cela devait leur coûter cher. D’accord, ce n’était pas ce que j’avais cru. En fait, d’une
certaine façon, c’était pire. Je lâchai le volant avant de casser quelque chose. L’ordure. Tyler était en
train de l’acheter. Tout à fait dans le style des Brandkel.
— Cela fait combien de temps que tu le connais ? demandai-je les dents serrées.
— Comme toi. Trois mois.
— Et en trois mois il est tombé raide dingue de toi au point de te dépanner de la modique somme de
quinze mille dollars ?
— Treize mille, rectifia-t-elle. Oh, Indiana, je te considère comme mon meilleur ami. Avant nous
habitions près de Telora Spring mais...
Je la dévisageai.
— Tu habitais près de Telora Spring ? Mais c’est près de la propriété de...
Je m’interrompis, horrifié.
— De la propriété de qui ?
— De... d’un ami, terminai-je en balbutiant.
J’avais failli dire « de mes grands-parents ». Mon nom à moi n’apparaissait nulle part heureusement,
donc on pouvait me « googler » à perdre haleine, j’étais un fantôme. Mais celui de mes grands-parents
était célèbre et tout le monde les connaissait dans la région. Ainsi, Katerina était l’une de nos voisines !
Cela me faisait tout bizarre.
— Donc tu habitais à Telora Spring ? lui rappelai-je bravement.
— Oui, mon grand-père possédait une propriété là-bas. Ce n’était pas un très bon gestionnaire, il a
réussi à tout perdre. Mon père a vendu ce qui nous restait pour payer mes études. Il a été blessé à la tête
lors de la première guerre du Golfe. Lorsqu’il est revenu... il n’était pas bien. Cela ne se voit plus, je
veux dire, physiquement ça va, mais parfois, il oublie où il est ou se croit encore au Koweït. Entre son
allocation d’invalidité de guerre et le reliquat de la vente de la maison, on a suffisamment pour vivre et
rembourser le prêt. On a acheté cette... baraque... en attendant que je termine mes études.
Je comprenais mieux son acharnement. Elle était reconnaissante envers son père. Même si celui-ci
était un ivrogne.
Elle m’indiqua la route de sa main fine.
— Indiana, je t’en prie, allons-y. Tu sais à quel point je déteste arriver en retard !
Je repris la route, totalement écœuré. En dépit des exigences de grand-père, je n’étais pas rentré pour
le 11 novembre, mais je n’allais pas réussir à couper à Thanksgiving. Il m’envoyait l’hélicoptère. D’ici
quelques heures, j’allais quitter Katerina pendant plusieurs jours et cela me déchirait. D’autant qu’elle
m’annonçait que mon ennemi venait de placer un pion majeur sur l’échiquier. Juste au moment où je
devais partir. Je roulais en silence, torturé, et pensais avoir plus ou moins maîtrisé les envies de meurtres
qui m’avaient assailli lorsque je remarquai quelque chose de curieux.
Je sentais Katerina. Pas son odeur. Non. Tout. J’entendais les battements de son cœur, ce qui ne