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m’était jamais arrivé. Je décelais le parfum de sa peau, en dessous de celui de son savon. Je voyais le
moindre défaut de sa chair, le fin duvet de ses avant-bras, les pores de son nez, le plus petit de ses cils.
Pour la seconde fois, je pilai net. Il devait y avoir quelque part un dieu ou un ange gardien super
efficace qui veillait sur moi, parce que, de nouveau, il n’y avait personne derrière moi.
Effrayée, Katerina me regarda.
Au bord de la nausée, je jetai :
— Conduis !
— Comment ?
— Conduis. Je ne me sens pas bien.
Elle ne discuta pas. Elle bondit de son siège, fît le tour de la voiture, m’aida à m’extirper de ma
place, tremblant et couvert de sueur, m’installa, boucla ma ceinture et se mit au volant.
Elle conduisait bien, prudemment mais vite.
— Ça va ? me dit-elle très inquiète. Je t’ai déjà vu blanc, rouge, mais vert, c’est nouveau.
— Je ne sais pas ce que j’ai, sans doute un pancake qui passe mal, plaisantai-je.
— Dès que nous arrivons, tu vas à l’infirmerie. Pas question que je te laisse.
Je ne protestai pas. Je me sentais réellement très mal.
Je passai une heure à l’infirmerie à trembloter. Je réussis à convaincre Katerina d’aller en classe.
Elle ne voulait pas me quitter, mais je lui dis qu’elle devait prendre le cours pour nous deux. L’air
angoissé, elle m’abandonna à regret.
L’infirmière prit ma température. Les loups ont une température qui varie entre 38,5 °C et 38,8 °C.
Les loups-garous aussi. Mais moi qui n’en suis pas un, là, j’avoisinais les 39 °C. Pas normal.
Je me sentais brûlant. Comme si tous les muscles de mon corps étaient en train de se contracter en
même temps.
A mon grand désarroi, alors que j’étais rarement malade, cela ne passa pas. L’infirmière, qui m’avait
donné une aspirine après avoir vérifié que je n’étais pas allergique, me conseilla d’aller chez le médecin
ou à l’hôpital.
Oui, alors ça, certainement pas. Je ne savais pas au juste si mon sang était différent de celui des
humains pure souche, et n’avais aucune envie de le découvrir.
Nous avions nos propres médecins. Sauf que je ne connaissais pas celui de Missoula. J’allais devoir
demander à Nanny.
Je n’étais qu’une immense courbature lorsque Katerina revint. Elle me déposa une liasse de feuilles
qu’elle avait photocopiées, le double du cours.
— Merci, dis-je faiblement.