une métaphysique de la nature, tantôt vers une métaphysique desmœurs». Mais <strong>Morpurgo</strong>-<strong>Tagliabue</strong> se fait encore plus explicite dansla note: «justement Saint Thomas tenait le faire artistique pour plusproche de l’action que de la connaissance: “Prudentia magis convenitcum arte quam habitus speculativi”. […] Au contraire, les modernesont adopté le principe aristotélicien du poiein […] plutôt comme unprincipe de connaissance, et cela surtout de manière à escamoter levéritable problème esthétique» 1 .Il ne s’agira certes pas pour moi de développer ces trois thèmesdans leur technicité chez le grand théoricien et le grand écrivain quenous fêtons aujourd’hui, mais bien plutôt d’essayer de dire commentils ont fécondé ma recherche. Et, dans cette perspective, je parleraisurtout de la théorie de l’acte esthétique que j’élabore si lentement etdifficultueusement, en ayant le sentiment qu’il est urgent de remédierensemble à cet “escamotage” du véritable problème esthétique, qu’évoque<strong>Morpurgo</strong>-<strong>Tagliabue</strong>.I – Rapprochement entre le sublime de Burke et le sublime de DémétriosLe sublime de Burke serait-il plus proche du sublime de Démétriosque du sublime de Longin? Démétrios qui consacra une longue analyseau Peri hermeneias? Cette filiation avait déjà été suggérée parWilliam Rhys Roberts, traducteur et commentateur en 1902 de Démétrios2 qui allait jusqu’à déclarer que la Philosophical Inquiry about theOrigin of our Ideas of the Sublime and the Beautiful de Burke n’aurait«aucune espèce de connexion» avec le texte de Longin. Il faut y regarderde plus près et la méthode que nous suggère <strong>Morpurgo</strong>-<strong>Tagliabue</strong>est d’abord comparative.De fait, dans sa préface de 1757, Burke ne se réfère pas à Démétrios,mais à Longin, dont il loue «l’incomparable discours», tout enregrettant qu’il ait «compris des choses totalement incompatibles sousla seule et commune dénomination de sublime». Rappelons que lesécrivains du XVIII e siècle anglais reprochaient à Longin de s’être cantonnéà la rhétorique et à la poétique et d’avoir négligé de chercher lelieu originel et le modèle du sublime dans la nature. Or, si Burketranspose le sublime dans l’ordre visuel, il est remarquable qu’il enprivilégie la manifestation dans la sphère de la poésie et de la rhétorique.Aussi bien faut-il beaucoup d’humour pour expédier sa Recherchephilosophique en la réduisant à une simple «exposition physiologique»,à l’instar de Kant.Burke fait grief à Longin d’avoir insuffisamment distingué les idéesdu beau et du sublime. Mais si le fil conducteur du traité Du sublimen’était assurément pas l’opposition du sublime au beau, Burke étaitparticulièrement sensible à la tension entre la définition de l’hupsoscomme «une certaine cime et éminence atteinte dans le discours» et88
son assimilation ultime à l’élément divin qui élève l’humanité au-dessusd’elle-même: «le cose utili o necessarie sono sempre accessibili agliuomini, mentre le cose straordinarie ne accendono la meraviglia» 3 . Jecite bien sûr la traduction de Lombardo. Et juste avant: «Ecco perchésiamo naturalmente portati ad ammirare non i piccoli corsi d’acqua –pur così limpidi e utili – ma il Nilo, l’Istro, il Reno e ancora di piùl’Oceano. È la fiamma che noi accendiamo e che sa conservare senzaspegnersi il suo chiarore non ci colpisce più dei fuochi celesti, che purespesso s’oscurano; né la consideriamo degna d’ammirazione più deicrateri <strong>del</strong>l’Etna, le cui eruzioni succhiano dall’abisso macigni e intererupi, riversando tavolta fiumi di quel fuoco spontaneamente natodalla terra». «Dante n’est pas moins à pic que l’Etna», écrit Hugo enécho à Longin. «L’art a, comme l’infini, un Parce-que supérieur à tousles Pourquoi». Le sublime trouve son emblème dans l’Etna, volcantoujours éruptible et dangereux, inexplicable comme tel, proche de lalaideur et formidablement beau.Ne négligeons donc pas l’influence si centrale de la pensée de Longinsur la Recherche philosophique de Burke. Mais il est facile de sauverLongin comme philosophe en oubliant qu’il est un philosophe de larhétorique. Vous n’imaginez sans doute pas à quel point une formationphilosophique vingtiémiste à la française insuffle le mépris de pareillediscipline: il faut dire que ce mépris porte la marque de fabrique dephilosophes aussi bien rationalistes qu’empiristes. Songeons seulementà Descartes et à la fin du Discours de la méthode I; à Hobbes et auLéviathan, IV et V; à Locke et à l’Essai sur l’entendement humain, III,X, 34, etc.: textes bien repérés en Italie sous l’influence notammentd’Ernesto Grassi. Aussi bien, grâce à <strong>Morpurgo</strong>-<strong>Tagliabue</strong> et, plusrécemment, grâce à Giovanni Lombardo, ai-je pu faire avec Démétriosune véritable cure me permettant de combattre l’anti-rhétorisme deprincipe et «la Terreur» qu’il fait régner dans les lettres (Jean Paulhan).A cet avantage s’en sont joints au moins trois autres. C’est chezDémétrios que j’ai compris la nécessité de distinguer grandeur et sublime(le charaktér megaloprepés et le charaktér deinós), la liaison –inaugurée par lui – entre le sublime et une certaine obscurité stylistique(asaphéia), mais surtout la synergie du sublime et de la grâce. Lesproblèmes épistémologiques que posent le sublime et la grâce sont àbien des égards connexes, puisqu’il s’agit dans les deux cas de valeursdynamiques et dynamogènes qui n’existent pas sub specie æternitatis,mais dans l’instant fugace de leur manifestation et dans l’effet qu’elleproduit. Nul académisme du gracieux et du sublime n’est donc envisageable.Comment accéder à ce qui est aussi évanescent et fuyant?Peut-on faire autre chose que décrire les effets du gracieux et du sublime?Leurs véhicules sont-ils repérables, leurs principes assignables?Démétrios va très loin en évoquant des grâces effrayantes et des grâ-89
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