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Novembre

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sécurité, les blanchissant ainsi malgré de nombreuses incohérences. Ces « révélations » mettent<br />

en cause ceux qui tentent encore de témoigner : les ONG de défense des droits humains, les<br />

journalistes et les humanitaires.<br />

Les repentis sont des individus qui ont appartenu à des groupes de jeunes armés, se seraient<br />

rendus aux autorités et qui avouent des crimes incriminant l’opposition. D’après les enquêtes<br />

menées par nos organisations, certains repentis travaillent formellement pour le SNR. Des sources<br />

bien informées ont confié à la mission que ces « repentis » ont généralement été arrêtés, puis<br />

torturés, parfois payés par des agents des services de sécurité ou du SNR qui réussissent de la<br />

sorte à les convaincre par la menace de renoncer à leur cause et de devenir leurs informateurs.<br />

Depuis le début de l’année 2016, plusieurs « repentis » ont fait des « révélations » à la télévision ou<br />

à la radio 183 accusant les groupes rebelles d’avoir commis des exactions. Ils accusent également<br />

différentes organisations, notamment des organisations ayant dénoncé la répression des autorités,<br />

de soutenir voire de travailler avec les « criminels armés » et de diffuser de fausses informations.<br />

Le 19 mars, deux repentis, Epitace Ningabire, et Clovis Kwizera, alias « Désiré », ont fait de telles<br />

révélations à la RTNB.<br />

Clovis Kwizera, le premier à prendre la parole, révèle de façon approximative et hésitante, dans un<br />

récit parsemé d’erreurs factuelles, avoir commis divers crimes sur ordre d’Alexis Sinduhije, fondateur<br />

du parti d’opposition MSD et bête noire du régime. Il aurait été envoyé par Alexis Sinduhije incendier<br />

un magasin chinois en septembre 2015 avec d’autres hommes formés au Rwanda. Pourtant, les<br />

résultats de l’enquête menée par les autorités burundaises avaient révélé que l’incendie n’était pas<br />

d’origine criminelle mais avait été déclenché par un court-circuit. Notons que dans la vidéo, Clovis<br />

Kwizera confond le magasin chinois T2000 avec le marché central. Il déclare ensuite avoir luimême,<br />

avec d’autres hommes, assassiné trois sœurs italiennes en septembre 2014, toujours sur<br />

ordre d’Alexis Sinduhije 184 . Pourtant, Clovis Kwizera n’a pas été arrêté par les autorités burundaises,<br />

et mène même des activités pour le compte du service national de renseignement, d’après deux<br />

sources crédibles. Il déclare enfin qu’une vidéo de Reuters, montrant des rebelles armés dans<br />

le quartier de Jabe, a été tournée par une équipe de journalistes, « des Blancs », parmi lesquels<br />

Jean-Philippe Rémy et Philipp Moore 185 qui n’étaient pas au Burundi à ces dates. Clovis Kwizera<br />

soutient qu’il faisait lui-même partie de ces jeunes armés et que cette équipe était envoyée, encore<br />

une fois, par Alexis Sinduhije. Le Monde a publié de très nombreux articles sur la crise burundaise<br />

depuis avril 2015 – dont beaucoup font état des violations des droits humains perpétrées par les<br />

autorités burundaises – ce qui laisse penser que le but non avoué de ce récit est de discréditer<br />

le journal en l’accusant de travailler avec un opposant considéré par le pouvoir comme l’un des<br />

artisans de la rébellion armée.<br />

183. Voir les paragraphes suivants.<br />

184. L’assassinat de ces trois sœurs avait bouleversé le monde en septembre 2014. Deux d’entre elles avaient été<br />

égorgées dans la journée du 7 septembre et la troisième la nuit même, alors que le couvent était gardé par la<br />

police burundaise. Les autorités avaient d’abord privilégié la piste d’un « désœuvré » avant que la troisième sœur<br />

ne soit assassinée selon le même modus operandi. Cette affaire est restée non élucidée. Bob Rugurika, le président<br />

de la très populaire Radio publique africaine et très populaire au Burundi, a mené des enquêtes à la suite de cet<br />

assassinat et diffusé le témoignage d’un des supposés assassins des trois sœurs qui avait révélé que le chef<br />

du SNR de l’époque, Adolphe Nshimirimana, était impliqué dans ce triple meurtre. Cela avait valu à Bob Rugurika<br />

d’être arrêté en janvier 2015 puis libéré en février et d’être érigé en héros national de la liberté d’expression. Ces<br />

révélations n’ont cependant pas fait avancer l’enquête sur le meurtre des sœurs italiennes, qui n’a jamais abouti.<br />

Sur la libération de Bob Rugurika, voir notamment FIDH, « Bob Rugurika libéré : une première étape pour la liberté<br />

d’expression au Burundi mais le combat continue », le 24 février 2015, https://www.fidh.org/fr/regions/afrique/<br />

burundi/17048-bob-rugurika-libere-une-premiere-etape-pour-la-liberte-d-expression-au<br />

185. Jean Philippe Rémy est correspondant du journal le Monde en Afrique, et Philip Moore un photographe britannique.<br />

Ils sont arrêtés à Bujumbura le le 28 janvier 2016 puis relâchés le lendemain. Voir notamment Le Monde, « Les<br />

envoyés spéciaux du Monde au Burundi ont été libérés », le 28 janvier 2016, http://www.lemonde.fr/afrique/<br />

article/2016/01/29/ce-que-nous-savons-de-l-arrestation-de-nos-envoyes-speciaux-au-burundi_4855931_3212.<br />

html<br />

FIDH - BURUNDI : Répression aux dynamiques génocidaires 101

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