Le Monde de Sophie - Jostein Gaarder (En pdf) - Oasisfle
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318 LE MONDE DE SOPHIE<br />
— Mais si, ça tourne et ça tourne, mon enfant. Comme un<br />
globe ivre tournoyant autour d'un soleil en feu.<br />
— Et ce soleil, c'est le père <strong>de</strong> Hil<strong>de</strong>?<br />
— On peut présenter les choses comme ça.<br />
— Tu veux dire qu'il a été une sorte <strong>de</strong> Dieu pour nous ?<br />
— Oui, et sans en être le moins du mon<strong>de</strong> gêné. Quel<br />
culot !<br />
— Et Hil<strong>de</strong> dans tout ça ?<br />
— Elle est un ange, <strong>Sophie</strong>.<br />
— Un ange ?<br />
— Hil<strong>de</strong> est celle à qui s'adresse cet « esprit ».<br />
— Tu veux dire qu'Albert Knag parle <strong>de</strong> nous à Hil<strong>de</strong> ?<br />
— Ou qu'il écrit sur nous. Car, nous venons <strong>de</strong> le voir,<br />
comment pourrions-nous percevoir la matière <strong>de</strong> notre propre<br />
réalité? Nous ne pouvons savoir si notre réalité extérieure<br />
est faite d'on<strong>de</strong>s sonores ou <strong>de</strong> papier et d'écriture. Selon<br />
Berkeley, nous savons tout au plus que nous sommes faits<br />
d'esprit.<br />
— Et Hil<strong>de</strong> est donc un ange...<br />
— Oui. Arrêtons-nous là. Bon anniversaire, Hil<strong>de</strong> !<br />
À cet instant la pièce fut inondée d'une lumière bleutée et<br />
quelques secon<strong>de</strong>s plus tard ils entendirent gron<strong>de</strong>r le tonnerre<br />
qui secoua toute la maison.<br />
<strong>Le</strong> regard perdu, Alberto se taisait.<br />
— Il faut que je rentre, fit <strong>Sophie</strong> en se levant.<br />
Hermès qui dormait à son habitu<strong>de</strong> sous la pen<strong>de</strong>rie se<br />
réveilla quand elle ouvrit la porte d'entrée. Elle crut<br />
l'entendre lui dire :<br />
— À bientôt, Hil<strong>de</strong>.<br />
Elle <strong>de</strong>scendit l'escalier à toute allure et se retrouva dans la<br />
rue. Il n'y avait pas un chat. Il faut dire qu'il tombait <strong>de</strong>s cor<strong>de</strong>s.<br />
Quelques voitures glissaient sur l'asphalte mouillé, mais il<br />
n'y avait aucun bus en vue. Elle courut jusqu'à la place du<br />
Marché et retraversa toute la ville, avec une seule idée en tête.<br />
Demain, c'est mon anniversaire, réfléchissait-elle. N'étaitce<br />
pas un peu amer <strong>de</strong> se rendre compte la veille <strong>de</strong> ses<br />
quinze ans que la vie n'était qu'un songe? C'était comme<br />
BERKELEY 319<br />
rêver <strong>de</strong> décrocher le gros lot d'un million et comprendre<br />
juste au moment <strong>de</strong> toucher la somme que ce n'était que du<br />
vent.<br />
<strong>Sophie</strong> coupa par le sta<strong>de</strong> gorgé d'eau. Elle aperçut alors<br />
quelqu'un qui courait à sa rencontre. C'était sa mère. Plusieurs<br />
éclairs déchirèrent le ciel.<br />
Sa mère la serra violemment contre elle.<br />
— Mais qu'est-ce qui nous arrive, ma chérie?<br />
— Je ne sais pas, répondit <strong>Sophie</strong> en larmes, c'est comme<br />
un mauvais rêve.