Le Monde de Sophie - Jostein Gaarder (En pdf) - Oasisfle
Le Monde de Sophie - Jostein Gaarder (En pdf) - Oasisfle
Le Monde de Sophie - Jostein Gaarder (En pdf) - Oasisfle
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
56 LE MONDE DE SOPHIE<br />
pastèque, même si <strong>de</strong> nombreuses langues l'appellent<br />
« melon d'eau », car même une pastèque était composée<br />
d'autre chose que simplement <strong>de</strong> l'eau. Mais si elle en était si<br />
convaincue, n'était-ce pas parce qu'on le lui avait dit? Auraitelle<br />
vraiment su que la glace n'est que <strong>de</strong> l'eau, si elle ne<br />
l'avait pas appris? N'aurait-elle pas dû sinon étudier très précisément<br />
le phénomène <strong>de</strong> l'eau qui commence par geler<br />
avant <strong>de</strong> fondre et re<strong>de</strong>venir eau ?<br />
<strong>Sophie</strong> essaya <strong>de</strong> penser par elle-même sans se référer à ce<br />
qu'elle avait appris.<br />
Parméni<strong>de</strong> avait refusé <strong>de</strong> reconnaître toute forme <strong>de</strong> changement.<br />
Plus elle y réfléchissait, plus elle était obligée<br />
d'admettre qu'il y avait du vrai dans ce qu'il disait. Son bon<br />
sens lui interdisait d'accepter l'idée que « quelque chose »<br />
puisse d'un seul coup <strong>de</strong>venir « quelque chose <strong>de</strong> complètement<br />
différent ». Il n'avait pas manqué <strong>de</strong> cran, car il avait<br />
été obligé <strong>de</strong> réfuter dans le même temps les phénomènes<br />
naturels que chacun pouvait constater par soi-même. Tout le<br />
mon<strong>de</strong> avait dû se moquer <strong>de</strong> lui.<br />
Empédocle aussi avait été assez astucieux pour affirmer<br />
que l'univers ne saurait être composé d'un seul mais <strong>de</strong> plusieurs<br />
éléments. De cette façon, tout changement dans la<br />
nature était rendu possible sans pour autant transformer quoi<br />
que ce soit.<br />
<strong>Le</strong> vieux philosophe grec avait abouti à ces conclusions en<br />
raisonnant et en étudiant la nature, mais sans toutefois pouvoir<br />
se livrer à <strong>de</strong>s analyses chimiques comme le font les<br />
scientifiques aujourd'hui.<br />
<strong>Sophie</strong> ne savait pas au juste si elle <strong>de</strong>vait vraiment<br />
croire que la terre, l'air, le feu et l'eau étaient à l'origine <strong>de</strong><br />
tout ce qui est créé dans la nature. Mais au fond, quelle<br />
importance? Sur le principe, Empédocle ne s'était pas<br />
trompé. La seule possibilité que nous ayons d'accepter<br />
toutes les transformations que nos yeux perçoivent sans<br />
pour autant perdre le nord, c'est d'introduire plus d'une<br />
substance élémentaire.<br />
<strong>Sophie</strong> trouva que la philosophie, c'était vraiment génial,<br />
LES PHILOSOPHES DE LA NATURE<br />
car elle pouvait suivre toutes ces idées avec sa propre raison,<br />
sans avoir besoin <strong>de</strong> se rappeler ce qu'elle avait appris en<br />
classe. Elle en vint à la conclusion que la philosophie n'était<br />
pas vraiment quelque chose qu'on peut apprendre, mais<br />
qu'on pouvait peut-être apprendre à penser <strong>de</strong> manière philosophique.<br />
57