Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris

REVUE DE PRESSE-PRESS REVIEW-BERHEVOKA ÇAPÊ-RWISTA
STAMPA-DENTRO DE LA PRENSA-BASIN ÖZETi
Jeudi 18 novembre: succédant à
l'opération anti-FIS de la semaine
précédente, le ministère de l'Intérieur
déclenche une descente du
même type contre des Kurdes. Nous ne
savions pas que cette communauté
comptait au nombre des cibles prioritaires
des services antiterroristes. Jusqu'à
ces derniers événements, les Kurdes
étaient présentés comme un peuple sans
Etat, victimes séculaires de sanglantes
répressions (lire également, page 20,
• Comprendre la question kurde").
Vendredi 19 novembre: la majorité des
médias français titrent: • Terrorisme ",
« Un véritable racket organisé ", • Ils
s'apprêtaient à frapper en France "
accusant directement les Kurdes. Une
providentielle • Note confidentielle remise
aux membres du Conseil interministériel
de sécurité" autorise soudain un
grand nombre de nos confrères à devenir
« bien informés ". Déjà 48 et 72 heures
auparavant, l'annonce de la grande rafle
était connue. Tous les paparrazi se trouvaient
à l'affût.
les quelques feuillets de la DST
ne pouvait suffire à déclencher
une telle opération
Six heures du matin, menottes aux
poignets, les • méchants " sont conduits
sans ménagement, et parfois très brutalement,
au Quai des Orfèvres. l1affaire peut
commencer. Bilan de la rafle: 110 arrestations,
dont les dirigeants présumés du
• redoutable " Parti des travailleurs du
Kurdistan (PKK), en France. Quelques
heures avant son arrestation, nous avions
rencontré Gultekin Kavak sous le nom de
Said Botan. Nous ne pensions pas nous
adresser à un redoutable « terroriste ",
présenté 24 heures plus tard comme « le
chef du PKK ". La discussion porta principalement
sur la culture ancestrale du
peuple kurde, ses racines, sa langue interdite
par les autorités turques.
La jeune fille aux grands yeux tristes
qui nous servait d'interprète s'appelait
Rojine Ayaz. Elle fut arrêtée le lendemain
matin, comme tous les membres du
Comité du Kurdistan présents ce matin-là
au siège de la rue La Fayette. Alijourd'hui,
Rojine est en résidence surveillée à Saint-
Pardoux dans les Deux-Sèvres, objet d'un
décret ministériel en « urgence absolue "
dont le motif n'est tolijours pas connu!
Elle n'était, au sein du Comité du Kurdistan,
qu'une simple collaboratrice chargée
de la communication. Délit d'informer?
Dossier vide tout autant que celui des
21 dernières personnes gardées en détention
ou en résidence surveillée.
Accusation de racket? Faux. Nous
avons interrogé plus de 130 commerçants
kurdes et turcs dans Paris en une semaine.
Tous, y compris des associations
turques, déclarent être solidaires de la
cause de leurs compatriotes qui luttent au
Kurdistan contre la répression du gouvernemellt
d'Ankara et contribuer volontairement
à leur apporter, dans la mesure de
leurs possibilités, un soutien financier, si
faible soit-il. I1Union de solidarités des
commerçants affirme • qu'il est totalement
faux de vouloir faire porter des
accusations de racket contre le PKK " tout
en précisant • que les services secrets
français et l'ambassade de Turquie à
Paris ont également tenté de produire de
faux témoignages par des commerçants
contre les personnes arrêtées dernièrement
". Il est vrai que la communauté
kurde est loin d'être riche et organisée.
Transport d'armes en relation avec une
entreprise terroriste? Faux. Au point
qu'un haut fonctionnaire de police ayant
suivi l'opération nous a déclaré: « Nous
actions les plus spectaculaires ont été
dirigées contre la Banque du Bosphore et
une d'elles ne fit que deux blessés. Il est
vrai que certains bruits ont pu courir
faisant état de tentatives probables d'attentats
contre des personnalitPs turques
en France. La première cible aurait été le
ministre turc des Transports. Mais, là
encore: aucune preuve.
la France et la Turquie
viennent de signer un
important marché d'armement
Le rapport de quelques feuillets réalisé
par la Direction de la surveillance du
territoire (DST) ne pouvait suffire à
déclencher une telle opération de police
au plan national. Mais alors, qui donc a pu
informer et • convaincre " les services
français de la préparation d'un complot
imaginaire?
La prochaine visite du premier ministre
turc Tansu Ciller en France a très certainement
offert l'occasion d'« échanges
d'informations privilégiées " entre Paris
19 novembre,
le jour
se lève,
menottes
aux poignets,
les membres
du Parti des
travailleurs
du Kurdistan
sont arrêtés.
Invités par
le Quai
des Orfèvres,
les médias
étaient
sur place.
Photos Gilles
Bassignac!
Gamma.
n'avons trouvé en tout et pour tout que et Ankara. D'autant que le récent marché
quelques pistolets à grenaille. Ce n'est pas d'armement signé entre la France et la
sérieux. Sij'avais les services turcs à mes Turquie a pu être utilisé par Ankara
trousses, je pense que j'aurais d'autres comme monnaie d'échange contre une
calibres sur moi. " Par ailleurs, au lende- opération «antikurde " en France; celle-ci
main de la rafle, plusieurs policiers tombant à pic pour favoriser la réélection
s'étonnaient d'avoir eu à mener des per- du premier ministre turc en confirmant le
quisitions domiciliaires parfois brutales prétendu. succès" de sa politique extédans
le cadre juridique limité d'une sirn- rieure. Le matraquage médiatique de la
pie information préliminaire. télévision turque relayant toutes les heu-
Ils allaient frapper? Rien pour le prou- res l'opération française permet à tout le
ver. Les Kurdes, en France, sont davan- moins de le penser.
tage considérés par les services de police Les Kurdes étaient-ils vraiment dangecomme
« remuants" que dangereux. Les reux? Non, mais ce type d'opération est
Humanité Dimanche N° 196 - 16/12/1993 au 22/12/1993 7
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