Et ce qui fera souffrir un aveugle, ce n’est pas d’être aveugle, ce sera d’autres désirs dont il sedit que ceux-là pourraient être satisfaits.Si j’ai réellement tenté de satisfaire mon désir, si j’ai fait tout ce que je pouvais, si j’ai vuqu’il ne pouvait pas être satisfait, alors, à ce moment-là, j’abandonnerai le combat sans regret.Trop souvent, vous savez que vous n’avez pas essayé de faire vraiment ce que vous vouliez.Vous sentez que vous avez été inhibé par des défenses extérieures – mes parents qui s’ysont opposés – ou inhibé par des mécanismes intérieurs – je portais en moi cette capacité,j’aurais pu « faire », mais ma timidité m’en a empêché, mes complexes m’en ont empêché,mes faiblesses m’en ont empêché. Et on se révolte. Mais ces nœuds peuvent être dénouéspar certaines méthodes. Alors restent les vrais désirs simples et je sens que rien ne m’empêched’essayer de les satisfaire. J’essaie. Je n’y arrive pas. Eh bien, au bout de quelque temps,j’abandonne. J’accepte, je suis sans regret. Je n’ai pas pu. Rien ne m’a empêché d’essayer. Jene garde pas ce contentieux : « Ah j’aurais pu, si... si les conditions avaient été différentes, sije n’avais pas été traumatisé par mon père, si je n’avais pas été complètement étouffé parmon é<strong>du</strong>cation trop religieuse, si... etc. » Tant que ces récriminations demeurent, il n’y a pasde satisfaction des désirs, pas d’accomplissement, pas de libération de l’ego. Si ces mécanismesartificiels tombent, on en arrive aux vrais désirs qui correspondent vraiment à notre natureet qui nous sont réels. Je ne me sens plus empêché de les réaliser par des obstacles que jeressens comme surajoutés. Je me sens empêché par des obstacles que je reconnais réels etconcrets. Et je dis : « Ce n’est pas possible. » Comme un montagnard qui voit : « Non, sanspiolet, sans crampons, sans corde, pas de possibilité de monter cette paroi absolument verticale.»Et on peut parfaitement renoncer à des désirs qu’on n’a pas accomplis, parce qu’on esttout à fait convaincu que ce n’est pas possible. J’abandonne. Il n’y a pas frustration.Si nous essayons réellement de satisfaire un désir, c’est-à-dire si nous sommes prêts ànous donner le mal nécessaire pour ce<strong>la</strong>, nous devons accepter les conséquences de cette tentativede satisfaction. Par exemple, si j’ai un désir de voyage, si je voyage et que j’attrape unema<strong>la</strong>die tropicale, je dois l’accepter. Si nous essayons réellement de satisfaire un désir, nouspouvons voir qu’en ce qui nous concerne, il ne peut pas l’être ou qu’il peut l’être. Et, si nousvoyons et reconnaissons que ce désir ne peut pas être satisfait parce que nous avons fait toutce que nous pouvions et que ce<strong>la</strong> n’a pas été possible, nous commençons à dépasser cet attachement– à nous trouver un jour dans <strong>la</strong> situation de celui qui ne risque pas de souffrirparce qu’il est incapable de s’envoler comme un oiseau ou de vivre sous l’eau comme un poisson.Seulement, le mental reste toujours flou, ne fait jamais de mise au point rigoureuse. Et ilvit dans son monde où tout, en effet, peut être imaginé ; d’où les souffrances et les regrets.Parce qu’on n’a pas dépassé le flou <strong>du</strong> mental et qu’on reste dans les émotions. J’ai connubeaucoup d’artistes professionnels, d’écrivains qui ne sont pas édités, d’auteurs de pièces quine sont jamais jouées, d’acteurs convaincus qu’ils ont le talent de Jean Gabin mais qui n’ontjamais pu dire quinze lignes dans un an, de peintres invendables qui savent que les directeursde galerie et les critiques se sont toujours trompés (<strong>la</strong> preuve : Van Gogh, qui n’a été célèbrequ’après sa mort). En restant dans le mental, on peut souffrir toute sa vie de désirs non réalisés.Les désirs de réussite artistique sont des sources sans fond de souffrances et de regrets.Si l’on dépasse le p<strong>la</strong>n <strong>du</strong> mental et si l’on accède à celui de <strong>la</strong> buddhi, à celui de <strong>la</strong> vraie intelligence,on peut sortir de ce flou illusoire et, avec une attitude a<strong>du</strong>lte, voir : « Oui ou non,116
est-ce que ce désir peut être réalisé ? » – Et je vous affirme que si vous avez <strong>la</strong> convictionabsolue : « Ce désir ne peut pas être réalisé, je l’ai vu », vous pourrez le dépasser. Ce qui faitsouffrir, c’est le désir dont on n’est pas convaincu qu’il est irréalisable et qui, malgré tout,d’année en année, ne se réalise pas, même avec tous les conditionnels, tous les « si ». Trèssouvent, inversement, quand une épreuve ne peut plus être évitée, elle est vraiment acceptée.C’est quand on croit qu’on va pouvoir encore l’éviter, qu’on souffre. C’est <strong>la</strong> même réalitévue sous l’autre face. Il y a beaucoup de désirs dont le mental pense qu’ils n’ont pas été satisfaits,mais en dépassant le mental avec rigueur, ces désirs peuvent disparaître.Quant à <strong>la</strong> satisfaction des désirs nécessaire pour que l’ego ne soit pas seulement un cride frustration, elle doit être une satisfaction consciente et unifiée. Si, au moment même oùje satisfais un désir, une part de moi n’est pas d’accord, il n’y aura pas satisfaction. Le désirne sera jamais satisfait. On peut avoir fait l’amour cinq fois par semaine toute sa vie avec leshommes les plus sé<strong>du</strong>isants ou les femmes les plus belles, et à soixante-cinq ans, être encorelà à regarder avec trouble des photos dans Lui ou P<strong>la</strong>yboy. Des hommes séniles et sans aucunepossibilité d’activité sexuelle après avoir fait une carrière de sé<strong>du</strong>cteur, ont encore unesexualité dans le mental. Je prends cet exemple, car c’est le plus f<strong>la</strong>grant. Mais il y en a d’autres: désir insatiable de succès, de gloire, d’argent, parce qu’en fait, le véritable désir n’a jamaisété satisfait. Un désir doit être satisfait consciemment. De même que pour agir, il fautqu’il y ait un agissant – to do, there must be a doer – un karta ; pour avoir l’expérience d’unesatisfaction, il faut qu’il y ait un sujet conscient, un appréciateur, un bhokta.Quand on a vraiment et pleinement l’expérience d’une chose, on est en mesure de se libérer<strong>du</strong> désir. Jusque-là, non, parce qu’il reste dans l’inconscient <strong>la</strong> certitude qu’on n’a pasvraiment connu cette chose et qu’il faut absolument <strong>la</strong> connaître. Cette question de bhokta,celui qui a l’expérience, est très importante. To do, there must be a doer, « pour agir consciemment,il faut quelqu’un qui soit là ». Et pour avoir l’expérience de <strong>la</strong> vie, l’expérience dessatisfactions et des souffrances, pour avoir une vie pleine et savoir vraiment ce que c’est quece monde et cette existence, il faut qu’il y ait aussi un sujet, et non rien, personne, a nonentity,comme disait Swâmiji. You are nowhere, « vous n’êtes nulle part ». Si le désir est satisfaitsur un fond de « sentiment de culpabilité », aucune satisfaction ne sera possible. Au-delàde karta et bhokta, il y a mahakarta et mahabhokta. Je vous en reparlerai.Swâmiji m’a raconté plusieurs fois (et à tous ses disciples, autant que j’ai pu en juger) <strong>la</strong>même histoire, toute simple, une histoire à <strong>la</strong>quelle il paraissait attacher une grande importanced’enseignement. Il passait très peu de monde à l’ashram de Swâmiji. C’était un ashramretiré des circuits <strong>du</strong> Gange ou de l’Hima<strong>la</strong>ya, mais dans tous les vil<strong>la</strong>ges avoisinants, on savaitqu’il y avait un ashram ; et un jour y arriva un jeune sannyasin, un homme qui avait renoncéà tout, y compris à son identité, et qui al<strong>la</strong>it de temple en temple, de lieu de pèlerinageen lieu de pèlerinage, complètement abandonné, recevant ce qu’on lui donnait, couchantoù on lui donnait <strong>la</strong> possibilité de coucher et pratiquant sa discipline particulière. Lessannyasins peuvent rester trois nuits sous le même toit mais pas plus. Comme il n’y avait à cemoment-là qu’un ou deux disciples dans l’ashram de Swâmiji, celui-ci reçut lui-même cebrahmachari. « He was so earnest », disait Swâmiji : « Il était si consciencieux, si sérieux. » Lesannyasin déc<strong>la</strong>ra à Swâmiji : « Swâmiji j’ai un problème. » Ce problème va faire sourire desOccidentaux, mais essayez de vous mettre à <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce d’hindous encore imprégnés d’une civilisationoù Dieu tenait une si grande p<strong>la</strong>ce. Le jeune sannyasin était plus désireux de Dieuqu’un jeune homme français aujourd’hui n’est désireux de l’amour ou de <strong>la</strong> gloire ou de l’ar-117
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