Voilà qui n’a rien que de f<strong>la</strong>tteur de pouvoir adhérer à une doctrine comme celle-là ! Etl’ego n’y est menacé ou mis en cause que théoriquement. On proc<strong>la</strong>me son inanité, son irréalité,son inexistence ; par conséquent le problème est résolu et un mental, un ego, peuttrès bien trouver son compte à dire : « Je suis brahman, je suis Shiva, je ne suis pas ce corpsmortel, je ne suis pas ces émotions, ni ce mental, ni ces koshas (ces “revêtements” <strong>du</strong> <strong>Soi</strong>), jene suis pas celui qui mange, ni celui qui est mangé ni l’acte de manger ; je ne suis ni le sacrifice,ni le mantram (ni rien de ce qui compose <strong>la</strong> vie d’un hindou), je suis Shiva, je suis Shiva.» Seulement, cette doctrine de <strong>la</strong> non-<strong>du</strong>alité (Un-sans-un-second) implique que, si jesuis Shiva, tous les autres sont aussi Shiva. Si je suis brahman, tous les autres sont aussibrahman. Par conséquent, si je suis brahman (première équation), si l’autre est brahman(deuxième équation), il en résulte que l’autre est moi-même ou que je suis l’autre, que l’autreet moi nous ne sommes qu’un. Sinon, il y a un, qui est moi, et un second, qui est l’autre ; ettout l’édifice de <strong>la</strong> non-<strong>du</strong>alité s’écroule. Et voilà qui nous touche et nous concerne beaucoupplus directement.Ce<strong>la</strong> ne change rien à mon existence d’affirmer que ce monde est irréel, que je ne suispas ce corps mortel, ni ces émotions passagères, ni ces pensées changeantes, que je suis purebéatitude, que je suis Shiva. Mais ce qui met directement en cause toute mon existence dansle re<strong>la</strong>tif, c’est d’affirmer que l’autre c’est moi, que je suis l’autre, que nous sommes un, unsans un second. À ce moment-là, comment puis-je être en re<strong>la</strong>tion d’amour ou de haine,d’attraction ou de répulsion, avec ce qui n’est pas un autre que moi, mais moi-même ? Immédiatement,c’est toute mon existence, tous les désirs, toutes les peurs, toutes les pensées etsurtout toutes les émotions qui se trouvent mis au défi, mis en question.De même, si je dis : « Tout cet Univers est brahman », je ne peux pas faire d’exception àcette affirmation. Tout cet Univers est brahman... sauf ma belle-mère. Non ! Ou sauf mesennemis personnels, ou sauf les partis opposés à celui auquel j’adhère moi-même. Tout cetUnivers est brahman, y compris les C.R.S. et les gauchistes, y compris les fascistes et les révolutionnaires.Tout cet Univers est brahman, et je suis brahman, et je suis le C.R.S., et jesuis le gauchiste, et je suis le fasciste, et je suis le révolutionnaire ; et le fasciste, c’est moi, etle gauchiste, c’est moi, et le révolutionnaire, c’est moi, et le C.R.S., c’est moi. Je prends desexemples concrets : nous ne sommes plus dans <strong>la</strong> métaphysique hindoue <strong>du</strong> VIII e siècle, maisdans <strong>la</strong> réalité quotidienne. L’Advaïta Vedanta ne peut pas être bafoué et profané comme ill’est à longueur d’existence par ceux qui vivent encore, en fait, dans <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité. La <strong>du</strong>alitéconcrète, celle devant <strong>la</strong>quelle nous sommes obligés de nous situer, existe-t-elle encore pournous ou non ? Ce n’est pas d’abord <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité entre Dieu et moi, le Créateur et <strong>la</strong> créature.C’est <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité entre moi et tout ce qui m’entoure, tout ce qui constitue « l’autre » ou le« non-moi ».Voilà une grande question. Si, vraiment, il n’y a que le brahman, que tout est brahman etque je suis brahman, comment pouvez-vous être en re<strong>la</strong>tion de peur, de désir, de conflit,d’attraction, de répulsion, avec quoi que ce soit d’autre ? Du matin au soir, l’existence vousrappelle que vous vivez encore dans <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité ou au contraire ne vous rappelle plus que vousvivez encore dans <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité. Et ce n’est pas en décidant que cette existence est « tout juste lemonde phénoménal, purement évanescent, complètement irréel », que vous aurez résolu leproblème. La preuve <strong>la</strong> plus f<strong>la</strong>grante que le problème n’a pas été résolu, qu’il existe encoreun ego vivant dans <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité, voyant en face de lui autre chose que le brahman, autre choseque lui-même, et réagissant, ce sont les émotions. Brahman n’est jamais affecté.58
Il existe encore une autre <strong>du</strong>alité, qui est bien là comme un défi à mes adhésions métaphysiques,c’est <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité entre moi et moi, chaque fois que je suis en conflit avec moimême.S’il n’existe qu’Un-Seul-sans-un-second, et que tout est brahman, mes souffrancessont brahman, mes peurs sont brahman, mes angoisses sont brahman, mes douleurs physiquessont brahman, tout, absolument tout, est manifestation ou expression de l’Unique Réalité.Sinon, je rétablis immédiatement un <strong>du</strong>alisme. Le chemin vers le non-<strong>du</strong>alisme, c’estl’effacement <strong>du</strong> <strong>du</strong>alisme, sa disparition. Je citerai ici une parole de mon propre gourou. Ellea de quoi faire hurler tous les puristes de <strong>la</strong> métaphysique qui vont ricaner et demandercomment on peut dire une énormité pareille. Shri Swâmi Prajnânpad m’écrivait : « Complètementdeux, un peu moins deux, encore un peu moins deux, presque plus deux, un, oneness.» Du point de vue re<strong>la</strong>tif, c’est tout à fait juste. Bien sûr, l’orthodoxie métaphysiqueconsiste à dire : ou il y a deux – <strong>du</strong>alité –, ou il n’y a pas deux. Pas de demi-mesure. Et ce« tout à fait deux, un peu moins deux » ne signifie rien. Eh bien, si ! Ce n’est pas une phrasede philosophe, c’est une phrase de gourou, et elle est riche de sens. Même si ce monde estirréel et l’ego une illusion, s’il existe des enseignements, des gourous et des <strong>yoga</strong>s, c’est pourceux qui sont soumis à cet irréel, à cette illusion, qui sont encore dans le rêve et ne s’en sontpas encore éveillés. Et, en effet, on est éveillé ou on ne l’est pas. Mais l’éveil se prépare lentement.Et l’effacement de <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité se prépare, jusqu’au jour où une bascule définitives’opère à l’intérieur de nous, qui ensuite portera ses fruits dans toutes nos fonctions, basculedéfinitive par <strong>la</strong>quelle on peut dire qu’on est passé <strong>du</strong> sommeil à l’éveil ou de <strong>la</strong> perceptionde <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité à <strong>la</strong> perception de <strong>la</strong> non-<strong>du</strong>alité.La non-<strong>du</strong>alité, c’est aussi <strong>la</strong> prétention de l’ego. L’ego voudrait bien être le nombril <strong>du</strong>monde, que tout soit un alter ego et qu’il n’y ait vraiment que lui, sans un autre que lui : sevoir indéfiniment partout, projeté partout, de manière à ce que sa volonté à lui s’accomplisse,qu’il ne soit jamais perturbé, contesté, frustré par l’autre. L’ego est prêt à proc<strong>la</strong>mer : « Il n’ya que moi. » C’est sa grande revendication. Et le sage peut dire aussi : « Il n’y a que moi. »Mais <strong>la</strong> perspective est strictement inversée.La revendication de l’ego est sans cesse mise en question, par conséquent l’ego est sanscesse dans les émotions et dans <strong>la</strong> souffrance, alors que <strong>la</strong> réalisation <strong>du</strong> sage n’est plus jamaismise en question et que <strong>la</strong> paix <strong>du</strong> sage n’est plus jamais perturbée. Le chemin consistedonc à prendre, avant tout, conscience que vous vivez dans <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité mais que vous pouvez<strong>la</strong> dépasser jusqu’à ce que se réalise l’unité, et que vous vivez aussi d’abord en <strong>du</strong>alité avecvous-même. Le chemin consiste à effacer cette <strong>du</strong>alité. Il peut, à partir de là, vous apparaîtred’une façon très c<strong>la</strong>ire et concrète, et l’expérience immédiate, quotidienne, de chaquehomme tel qu’il est situé aujourd’hui, au p<strong>la</strong>n de conscience, au niveau d’être où il se trouveaujourd’hui, peut être reliée à <strong>la</strong> plus haute perspective métaphysique.Si cette non-<strong>du</strong>alité est réalisable, si les affirmations <strong>du</strong> vedanta, <strong>du</strong> bouddhisme zen, <strong>du</strong>bouddhisme tibétain, <strong>du</strong> wahdat alwudjud soufi, de Maître Eckhart sont véridiques, <strong>la</strong> distinction<strong>du</strong> moi et <strong>du</strong> non-moi, <strong>du</strong> sujet et de l’objet, peut être dépassée. Mais elle ne le serapas brusquement, par un coup de baguette magique. Ou alors, c’est tellement l’exception quiconfirme <strong>la</strong> règle : un homme sur cinq cents millions à chaque génération ! Je parle d’un effacementdéfinitif ; non d’une expérience, inoubliable peut-être, mais avec <strong>la</strong>quelle <strong>la</strong> pratique,<strong>la</strong> réalité de l’existence quotidienne ne s’harmonisent plus, expérience qui n’a pas été<strong>du</strong>rable. Je parle de ce que les hindous appellent sahaja state, l’état naturel dans lequel il n’estquestion ni d’entrer ni de sortir. Ce n’est pas comme un samadhi momentané, mesurable59
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tent l’opposition et vous ne fere
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est soumis à l’alternance de l
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un mensonge, tous les enseignements
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