trahison, sa mort prochaine, sa ruine, il demeure parfaitement serein, même si les spectateurssont bouleversés par son jeu. Sinon, aucun acteur n’aurait jamais accepté de jouer unrôle tragique, en disant : « Non, je souffre trop », alors que les rôles tragiques sont très volontiersacceptés par les comédiens. De <strong>la</strong> même façon, l’homme qui a complètement dépasséle p<strong>la</strong>n de <strong>la</strong> motivation indivi<strong>du</strong>elle vit dans cette paix perpétuelle, <strong>du</strong> fait de cette adhésionparfaite au mouvement général de l’univers. Et cette adhésion est possible. « Je fais ceque je veux » est devenu « Je veux ce que je fais » ; et ce que je fais, c’est ce qui doit être fait.Quand le mental et les émotions ont disparu, ce qui doit être fait est évident, certain. Il n’y aplus aucune appréhension pour l’avenir, aucune crainte. Quelles que soient les conséquencesdes actions, elles sont d’avance acceptées, parce qu’il n’y a aucune peur, aucun conflit. L’adhésionà ce mouvement général de l’univers et à <strong>la</strong> demande qui va m’être faite à chaquemoment est si totale que l’acteur, l’agissant, se trouve en parfaite sécurité comme le comédienqui joue un rôle.On peut aller plus loin dans cette comparaison. Si le mental a totalement disparu, il n’y amême plus, selon l’expression traditionnelle, « l’épaisseur d’un cheveu » entre moi et lemonde, entre ma volonté et <strong>la</strong> marche de l’univers : les deux ne font plus qu’un. Je me trouvealors dans <strong>la</strong> situation de l’auteur-acteur, qui joue un rôle dans une pièce qu’il a composéelui-même et dont il a écrit tous les rôles. Si un auteur-acteur a écrit une pièce dans <strong>la</strong>quelle iljoue un rôle, mais qu’il a aussi écrit les autres rôles, quand le personnage dont il a écrit le rôlelui vole <strong>la</strong> moitié de sa fortune, ou quand <strong>la</strong> femme dont il a écrit le rôle le trompe oul’abandonne, il demeure en parfaite harmonie. Tous ceux dont l’ego s’est effacé, qui ont atteintl’état-sans-ego (egoless state), se trouvent dans cette situation. L’accord est si parfait avecle cours des choses, que l’on se trouve autant d’accord que si l’on était soi-même l’auteur de<strong>la</strong> grande comédie universelle. Et absolument d’accord pour toute réplique qui puisse êtredite par qui que ce soit. Tout événement qui vient m’atteindre, j’y adhère de façon parfaite.Je suis dans l’instant, il n’est plus question de <strong>du</strong>rée, de passé ou de futur. Je suis, d’instant eninstant, d’accord, totalement d’accord. Je ne me situe plus au cœur d’un ego indivi<strong>du</strong>alisé,limité, comme il y en a quatre milliards à <strong>la</strong> surface de <strong>la</strong> p<strong>la</strong>nète (bientôt sept), je me situenon plus au centre d’un ego, mais au centre de <strong>la</strong> marche même de l’univers, dans le AUMou le Amen permanent. Karta, l’agissant, a fait p<strong>la</strong>ce à mahakarta, le Grand-Agissant, qu’onappelle aussi, d’une façon également juste, le Non-Agissant. Le facteur indivi<strong>du</strong>el a disparu,l’impression d’être là à devoir agir, à porter le fardeau et <strong>la</strong> responsabilité de ses propres actions,avec un élément de crainte : « Qu’est-ce qui va se passer ? Que va-t-il m’arriver ?... »ont disparu. Toutes ces émotions qui sont le pain quotidien de l’existence humaine ont disparu.Au cœur même de l’action se trouvent <strong>la</strong> paix et le repos de <strong>la</strong> non-action, parce quetoute crainte a disparu. Ceci doit être fait, ce<strong>la</strong> doit être fait, c’est tout. Ceci doit être accomplimaintenant, c’est tout. Il n’y a plus « l’épaisseur d’un cheveu » par où le mental quinous sépare <strong>du</strong> reste de l’univers pourrait encore s’insérer.Tout ce que je dis là est surprenant. Je ne l’ai pas compris, <strong>la</strong> première fois qu’un doigt apointé pour moi dans cette direction. C’est un aspect de renseignement de Swâmiji que j’aientrevu peu à peu et qui ne devient expérience vécue que comme fruit d’une transformationradicale de sa façon de percevoir ou de sentir le monde. Swâmiji disait : « Complete s<strong>la</strong>very isperfect freedom » : « l’esc<strong>la</strong>vage complet, c’est <strong>la</strong> liberté parfaite. » Voilà une parole qui peutparaître incompréhensible, mais j’ai essayé de vous en faire entrevoir le sens réel. Qu’est-cequi vous interdit cette parfaite liberté qui est <strong>la</strong> parfaite soumission et aussi <strong>la</strong> paix et <strong>la</strong> joie164
qui demeurent ? Ce sont le mental et les émotions. Qu’est-ce qui vous interdit l’accès définitifà cette liberté ? Ce sont le mental et les émotions, qui vous ramènent dans <strong>la</strong> <strong>du</strong>alité, dans<strong>la</strong> peur, dans les désirs, dans <strong>la</strong> crainte et l’anxiété, dans <strong>la</strong> projection <strong>du</strong> passé sur le futur.Un jour, cette soumission ou, si ce mot sonne mal à vos oreilles, cette adhésion à <strong>la</strong> réalitédeviendra évidente. Qu’est-ce qui doit être fait ? Quelle est l’action juste maintenant ? Oùl’anxiété, où <strong>la</strong> crainte, où l’appréhension pourraient-elles trouver p<strong>la</strong>ce ? Vous jouez le rôledans lequel vous êtes distribué. Et pas le rôle <strong>du</strong> voisin, ni un rôle idéal, imaginaire, de votrecru, dans lequel vous seriez supposé plus intelligent qu’Einstein, plus efficace en affairesqu’Onassis, plus beau qu’A<strong>la</strong>in Delon, etc. Non, non : dans le re<strong>la</strong>tif, à votre limite, le rôledans lequel vous êtes distribué, c’est tout.Toute crainte disparaît, parce que le mental n’a plus <strong>la</strong> possibilité d’intervenir. Il n’y aplus « mais... », « si... », « mais qu’est-ce qui va se passer ?... » Tous les « mais » ont disparu.Je suis fatigué ? Je suis fatigué. Je suis ma<strong>la</strong>de ? Je suis ma<strong>la</strong>de. Je suis d’accord, toujoursd’accord, et dans cet accord parfait se trouve <strong>la</strong> paix. Il se peut que je sente que l’action quim’est demandée est de me soigner, ou que l’action qui m’est demandée n’est pas maintenantde me soigner, que quelque chose d’autre doit être fait d’abord. Mais alors, ma santé ? Mama<strong>la</strong>die va s’aggraver ? Ce<strong>la</strong> n’a aucune importance. Il vaut mieux être ma<strong>la</strong>de et heureuxqu’en bonne santé et malheureux. Il vaut mieux être ruiné et heureux que prospère et malheureux.Et je vous affirme qu’il est possible d’être heureux dans des circonstances qu’autrefoisnous aurions considérées comme adverses. D’ailleurs, tout le monde le sait : qui n’a paseu sous les yeux l’exemple d’un homme ou d’une femme apparemment comblé, et qui se senthorriblement malheureux ; celui d’une femme ou d’un homme apparemment frappé par ledestin et parfaitement serein ? Je vous ai déjà parlé d’un soufi que j’ai connu au Maroc et qui,dans sa jeunesse, était si intelligent qu’il était chargé de cours à <strong>la</strong> Sorbonne et si beau qu’onl’avait pris comme vedette pour <strong>la</strong> version marocaine d’une copro<strong>du</strong>ction dont <strong>la</strong> vedettefrançaise était Georges Marchal. Il était devenu intégralement paralysé, à part l’avant-brasdroit. Sa mâchoire ne lui permettait d’émettre que des sons incompréhensibles, on lui mettait<strong>la</strong> nourriture dans <strong>la</strong> bouche, il remuait seulement <strong>la</strong> main droite et l’avant-bras droit...Son regard était aussi lumineux que celui de Ramana Maharshi ! Alors ? Pourquoi pasmoi ?... A ce moment, bien sûr, l’ego s’affole et hurle : je veux ma santé, je veux ma capacitéà faire des conférences, je veux mes succès féminins, je veux...Aujourd’hui, dans le contexte qui est le nôtre, quand on dit de quelqu’un qu’il joue unrôle, c’est sans nul doute péjoratif. En Inde, c’est extrêmement favorable. On joue le rôledans lequel on est distribué ; le brahmane, celui <strong>du</strong> brahmane ; le guerrier, celui <strong>du</strong> guerrier.En outre, chacun est distribué dans le rôle bien particulier qui est le sien selon son svadharma.Jouer un rôle avec autant de conscience professionnelle et de talent qu’un comédien, etautant de non-identification et de liberté intérieure que lui. Ceux qui connaissent un peu lesgens de théâtre savent que les rôles marqués par <strong>la</strong> souffrance sont tout aussi appréciés queles rôles gais. Dites à un acteur : « Est-ce que tu es libre pour jouer un rôle dans un film pour<strong>la</strong> Télé ? » – « Ce serait pour quand ? C’est difficile, je n’ai pas signé de contrat mais je suismoralement engagé : je dois faire un juge dans un nouveau film de Cayatte. » –« Dommage ! C’était un rôle assez beau. C’est quelque chose sur <strong>la</strong> tragédie imp<strong>la</strong>cable <strong>du</strong>monde moderne, où les gens sont broyés ; au début, tu es en pleine santé, très riche, tout teréussit, tu es très aimé par une femme et à <strong>la</strong> fin de l’histoire, tu meurs d’un cancer, complètementseul, tout le monde t’a abandonné parce que tu es ruiné. » – « Ah ! ça, c’est un rôle165
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