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LA SCIENCE ARABE

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§ 32 L'AIGUILLE AIMANTÉE 161<br />

Selon Heinrich Winter (voir par exemple son résumé, Der Stand der Kompassforschung<br />

mit Bezug auf Europa, Forschungen und Fortschritte, XII, 1936, p. 287),<br />

l'indication la plus ancienne serait celle contenue dans le Manuscrit N° 6556 de la<br />

Bibliothèque Nationale. Ce manuscrit, du XlVe reproduit siècle, un ouvrage du<br />

XIe siècle, qu'un historien de la géographie bien connu, le portugais Santarem cite<br />

sous le titre inexact Cosmographia Asaphi Judaei; en réalité il s'agit sans doute<br />

d'une élaboration tardive d'un ouvrage de cet auteur, un médecin qui vivait au IXe<br />

siècle ou peu après (on possède sous son nom un traité médical en hébreu).<br />

Mais la première mention explicite de l'aiguille et de son usage (en des termes<br />

peu différents de ceux qu'on rencontre chez Baylak) se trouve dans le De natura<br />

rerum (cap. 98) et dans le De utensilibus d'Alexander Neckam (1157—1217 ou<br />

1227). Une description littéraire occasionnelle, mais très intéressante, se trouve peu<br />

après dans le poème satirique la Bible, composé en 1205 par Guyot de Provins,<br />

alors très âgé.<br />

En nous limitant aux savants, nous signalerons qu'après la mention faite par<br />

Thomas de Cantimpré dans sa De natura rerum de 1256, ouvrage qui jouit d'une<br />

très grande diffusion, on trouve des indications sur l'aiguille aimantée et sur son<br />

usage par les marins, dans le Spéculum naturale de Vincent de Beauvais et dans<br />

le De mineralibus d'Albertus Magnus. Or ces deux auteurs se réfèrent sur ce point<br />

à Gherardo di Cremona, c'est-à-dire à des traductions de l'arabe faites par cet<br />

auteur qui, notons le bien, était mort en 1187. Cela nous montre clairement que<br />

leurs sources étaient arabes et du Xlle siècle sinon du précédent. Nous en tirerons<br />

plus loin les conclusions. Enfin, une étude fondamentale, qui ouvre des voies<br />

scientifiques nouvelles et prépare, peut-on dire, l'invention de la boussole véritable,<br />

se trouve dans la célèbre épître De magnete écrite par Petrus (Peregrinus) de<br />

Maricourt en 1269 pendant le siège de Lucera par Carlo d'Angiô. (Une étude très<br />

soigneuse de la lettre de Petrus Peregrinus et une reproduction partielle, en italien,<br />

se trouvent dans les deux volumes de Mario Gliozzi, L'elettrologia fino al Volta,<br />

Napoli, 1937).<br />

11 nous reste à dire un mot sur l'usage de l'aiguille aimantée chez les marins<br />

nordiques, auxquels certains auteurs voudraient attribuer tous les mérites. La<br />

base principale de cette présomption dérive d'un passage de YHistoria Islandica<br />

écrite en 1108. On y peut lire: „Klocke Vilgardarson, le troisième découvreur de<br />

cette île [l'Islande]... partit vers 868 de Rogland en Norvège pour découvrir<br />

Gardasholm [l'Islande]. Il porta avec lui trois corbeaux, qui devaient lui indiquer<br />

le chemin... parce qu'alors les navigateurs dans les mers nordiques n'avaient pas<br />

aimantée]."<br />

de Leiderstein [le nom donné dans le nord à l'aiguille<br />

De tout ce qui précède nous croyons pouvoir conclure ce qui suit. Les arabes<br />

ignoraient certainement jusqu'à la fin du Xe siècle les propriétés de l'aiguille<br />

aimantée et à plus forte raison l'usage n'en était pas connu des marins. Le fait<br />

qu'aucune mention n'en soit faite chez al-Mascudî en donne une preuve décisive.<br />

Par contre l'usage dans la navigation en est prouvé par des documents explicites<br />

du XlIIe siècle. Les textes cités plus haut et les relations que nous possédons<br />

encore montrent d'ailleurs qu'il s'agit d'un usage déjà établi depuis assez longtemps.<br />

Les indications qu'on trouve chez Gherardo di Cremona, non seulement nous confir<br />

ment ce que nous savons par les sources arabes, mais nous obligent à faire remonter<br />

ces connaissances au moins au début du Xlle siècle. Il est même possible que les<br />

arabes aient découvert ces propriétés dans la première moitié du Xle siècle. Il<br />

est donc extrêmement probable, à mon avis, que la découverte a été faite dans<br />

le monde islamique, et qu'elle a été connue, grâce à eux, des chinois et des peuples<br />

chrétiens du bassin de la Méditerranée. Tout au plus pourrait-on admettre que les<br />

norvégiens, possédant chez eux de nombreuses mines de pierres magnétiques,<br />

aient fait indépendamment la même découverte. Sur ce sujet on peut voir l'article<br />

Mieli, Science Arabe

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