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Etats-Unis : les interlocuteurs américains de Guyot et de Delouvrier (André Meyer,<br />

Donald Swatland ou Sigmund Warburg) sont pour la plupart de amis de longue date de<br />

Monnet. C’est par l’intermédiaire de ces hommes éminents que la CECA va lancer le<br />

premier emprunt de la Haute Autorité. Jean Guyot se rend <strong>à</strong> New York avec Monnet en<br />

1954. Comme Wall Street se méfie de ce « cartel européen de l’acier », Monnet et Guyot<br />

s’orientent vers un emprunt auprès de l’Export-Import Bank, qui dépend du<br />

gouvernement américain. Grâce <strong>à</strong> l’action d’André Meyer, la Haute Autorité obtient une<br />

petite baisse du taux d’intérêt, qui a cependant une importance symbolique, car elle<br />

permet d’affirmer le crédit de la CECA. Les sommes récoltées sont ensuite prêtées aux<br />

entreprises du charbon et de l’acier.<br />

C’est dans le cadre de ces activités que Jean Guyot fait la connaissance d’André Meyer et<br />

de Pierre-David Weill, qui, <strong>à</strong> l’automne 1954, lui proposent de rejoindre la Banque Lazard<br />

<strong>à</strong> Paris. Comme il l’a raconté <strong>à</strong> Benjamin Chassaing, Guyot demande conseil <strong>à</strong> Monnet,<br />

qui lui répond : « Allez-y si ça vous intéresse. Partez ! Faites-le ! ». Cela représente un<br />

autre élément de ressemblance dans la carrière <strong>des</strong> deux hommes. De même qu’en<br />

1947, Monnet a poussé Delouvrier <strong>à</strong> quitter le Plan pour rejoindre le cabinet de René<br />

Mayer, il encourage Guyot <strong>à</strong> travailler avec André Meyer. En d’autres termes, Monnet<br />

n’hésite pas <strong>à</strong> se séparer de deux collaborateurs qu’il estime, pour les « recaser » auprès<br />

<strong>des</strong> deux Ma(e)yer (René et André), qui sont <strong>des</strong> amis proches. Loin de s’opposer <strong>à</strong> cette<br />

séparation, Monnet l’encourage, vraisemblablement pour deux raisons : d’un côté, il<br />

songe <strong>à</strong> la carrière de ses deux collaborateurs ; de l’autre, il sait que, même <strong>à</strong> distance,<br />

ils continueront <strong>à</strong> travailler avec lui, dans le cadre de ces réseaux que Pascal Fontaine a<br />

bien décrit dans sa thèse 41 .<br />

Lorsque Guyot manifeste son désir de quitter Luxembourg (automne 1954), Monnet<br />

pense <strong>à</strong> Paul Delouvrier pour lui succéder. Cette demande ne va pas de soi, car au sein<br />

de l’Inspection <strong>des</strong> Finances, il existe une sorte de hiérarchie <strong>à</strong> l’ancienneté.<br />

Rétrospectivement, Paul Delouvrier a considéré que « cette demande était un peu<br />

pittoresque, car Guyot était plus jeune que [lui] ». En apprenant cette nomination, Jean<br />

Guyot est lui aussi étonné car Delouvrier « était engagé dans une lourde tâche et était<br />

plus âgé que lui ». En février 1955, Guyot et Delouvrier travaillent ensemble pendant<br />

quelques semaines, le temps d’assurer la « passation <strong>des</strong> pouvoirs ».<br />

Dans les trois années suivantes, l’activité et la structure de la Division <strong>des</strong> finances<br />

demeurent quasiment inchangées. Delouvrier se passionne pour les questions techniques<br />

d’emprunt et de financement. Guyot a raconté que de temps en temps, Delouvrier lui<br />

envoyait un télégramme pour lui dire qu’il avait conclu une opération : « Par personne<br />

interposée, j’ai su qu’il avait pris beaucoup d’autorité ». En particulier, les banquiers<br />

américains apprécient beaucoup la chaleur et le franc parler de Delouvrier. Ces qualités<br />

vont être décisives pour le succès du deuxième et du troisième emprunt de la CECA (en<br />

avril 1957 et en juin 1958) qui, contrairement au premier, vont faire appel aux capitaux<br />

privés sur la place de Wall Street.<br />

Parcours <strong>à</strong> distance<br />

À partir de 1955, les routes <strong>des</strong> deux hommes divergent. Jean Guyot entre dans le<br />

monde de la Finance, où il restera jusqu’<strong>à</strong> la fin de sa vie, tandis que Paul Delouvrier se<br />

consacre au service public. Après avoir quitté la CECA en 1958, il entame une longue<br />

carrière qui le mène en Algérie, au District de la région parisienne, <strong>à</strong> l’EDF et <strong>à</strong> la Villette.<br />

S’ils ne se voient pas souvent, Guyot et Delouvrier continuent <strong>à</strong> entretenir <strong>des</strong> contacts<br />

sur le plan professionnel et associatif. Le premier cadre de ces contacts est le Comité<br />

pour les Etats-Unis d’Europe que Monnet a créé en 1955 après son départ de la CECA. Ni<br />

Guyot ni Delouvrier n’en font directement partie, mais Monnet les consulte souvent. Jean<br />

41 Pascal Fontaine : « Le Comité d'Action pour les Etats-Unis d'Europe de Jean Monnet » 1974, 248 p.<br />

Thèse publiée par la Fondation Jean Monnet pour l'Europe - Lausanne<br />

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