54 Chapitre 2. Généralités sur le transport électronique2.3.2 E<strong>et</strong> Hall quantique dans le graphène <strong>et</strong> le graphène multicouchesComme ce<strong>la</strong> a été montré dans le chapitre 1.1.3, <strong>la</strong> séquence des niveaux deLandau du graphène est diérente de celle des gaz 2D conventionnels. De plus <strong>pour</strong>le graphène multi-feuill<strong>et</strong>, le nombre de couches inuence fortement <strong>la</strong> quanticationen niveaux de Landau. On peut donc s'attendre à ce que l'e<strong>et</strong> Hall quantique quidécoule directement de <strong>la</strong> quantication en niveaux de Landau soit diérent <strong>pour</strong>chacun de ces systèmes. La gure 2.17 montre de manière schématique <strong>la</strong> densitéd'états d'un semi-conducteur 2D conventionnel, du graphène <strong>et</strong> du graphène bicoucheà un champ magnétique constant, ainsi que <strong>la</strong> conductance de Hall qui endécoule. Comme décrit dans <strong>la</strong> partie précédente, chaque niveau de Landau rempliva contribuer à <strong>la</strong> conductance à hauteur de ge 2 /h. A champ constant, les valeursde <strong>la</strong> conductance de Hall ne vont alors dépendre que du nombre d'états qui vontsuccessivement se remplir lorsque le niveau de Fermi sera modié. En considérantg = 4, c'est-à-dire un semi-conducteur possédant une dégénérescence de spin <strong>et</strong> devallée, on voit c<strong>la</strong>irement que <strong>la</strong> suite de facteur de remplissage <strong>pour</strong> <strong>la</strong> gure 2.17 (a)est donné par ν = ..., −12, −8, −4, 0, 4, 8, 12, .... Les p<strong>la</strong>teaux de conductance vontalors former une suite ininterrompue de marches équidistantes, séparées de 4e 2 /h.σ xy = 4n e2(2.41)hPour le graphène, en revanche, l'existence du niveau de Landau à énergie nullegénère une suite de facteurs de remplissage diérente du cas précédent, avec ν =..., −10, −6, −2, 2, 6, 10, ... (voir gure 2.17 (c)). Les p<strong>la</strong>teaux sont, comme dans lecas précédent, équidistants <strong>et</strong> séparés de 4e 2 /h. Par contre le p<strong>la</strong>teau de conductancecorrespondant au facteur de remplissage nul disparaît.(σ xy = 4 n + 1 ) e22 h(2.42)Le facteur 1/2 apparait car <strong>la</strong> moitié des états dégénérés du niveau d'énergie zérosont occupés par des trous <strong>et</strong> l'autre moitié par des électrons. La premiere observationde l'e<strong>et</strong> Hall quantique dans le graphène a été faite par K.S Novoselov <strong>et</strong>.al. en 2005 [Novoselov 2005a] sur un échantillon de graphène produit par exfoliationmecanique <strong>et</strong> deposé sur SiO 2 (voir <strong>la</strong> gure 2.18 (a)). La mobilité de l'échantillonétant d'environ 15000cm 2 /V.s, on voit c<strong>la</strong>irement apparaitre sur <strong>la</strong> gure 2.18 (a),<strong>pour</strong> un champ magn<strong>et</strong>ique de 14T, l'e<strong>et</strong> Hall quantique prédit theoriquement, avecl'apparition des p<strong>la</strong>teaux de resistance à des valeurs demi-entières de ν lorsque <strong>la</strong>dégénéresecence de 4 est prise en compte. C<strong>et</strong>te observation de l'e<strong>et</strong> Hall quantiqueentier dans le graphène a conrmé que les porteurs de charge dans le graphène sontbel <strong>et</strong> bien des fermions re<strong>la</strong>tivistes sans masse.Dans le cas du graphène bi-couche, le niveau zéro n'est plus constitué d'un niveaumais de deux, sa dégénérescence est donc double g n=0 = 8, partagée entre trous <strong>et</strong>électrons. A champ magnétique identique <strong>la</strong> densité d'états du niveau n = 0 du
2.3. E<strong>et</strong> Hall quantique 55graphène bi-couche est donc deux fois plus importante que celle du graphène (voirgure 2.17). La suite de facteur de remplissage décou<strong>la</strong>nt de <strong>la</strong> présence d'un telniveau est donc ν = ..., −12, −8, −4, 4, 8, 12, .... La quantication des p<strong>la</strong>teaux estdonc identique à celle obtenue <strong>pour</strong> un gaz 2D conventionnel, mis à part que lep<strong>la</strong>teau de conductance nulle disparaît. La conductance eectue entre le premierniveau de trou <strong>et</strong> le premier niveau électronique un saut de 8e 2 /h.Figure 2.17 Schéma de l'e<strong>et</strong> Hall quantique entier (a) gaz 2D conventionnel (b)graphène bi-couche (c) graphène. La conductance est en unité de ge 2 /h, les niveauxde Landau sont tracés en fonction du facteur de remplissage nh/geB. Adapté de[Novoselov 2006].Expérimentalement c'est en 2006 que l'e<strong>et</strong> Hall quantique entier a été mesuré<strong>pour</strong> <strong>la</strong> première fois dans le graphène bi-couche [Novoselov 2006]. La gure 2.18(b) montre <strong>la</strong> résistance de Hall à deux champs magnétiques dièrents 12T <strong>et</strong> 20T,<strong>pour</strong> des valeurs de densité de porteur al<strong>la</strong>nt de −5×10 −12 cm −2 a −5×10 −12 cm −2 .Comme attendu, les p<strong>la</strong>teaux de conductance apparaissent à des valeurs entières,mais le dernier p<strong>la</strong>teau à conductance nulle n'est pas présent. C<strong>et</strong>te mesure conrmeque les porteurs de charge dans le graphène bi-couche sont chiraux comme ceux dugraphène, mais possèdent une masse (dispersion parabolique a faible énergie).Comme nous l'avons vu dans le chapitre 1.2.4, <strong>la</strong> dégénérescence du niveaud'énergie nulle <strong>pour</strong> le graphène tri-couche est égale à g = 12 <strong>et</strong> ce quelque soitle type d'empilement (A-B-C ou A-B-A). Le dernier p<strong>la</strong>teau de <strong>la</strong> séquence d'e<strong>et</strong>Hall quantique est donc celui correspondant à ν = 6.2.3.2.1 Levée de dégénérescenceLa séquence de p<strong>la</strong>teaux de <strong>la</strong> conductivité de Hall exposée dans <strong>la</strong> sectionprécédente décrit l'e<strong>et</strong> Hall quantique entier dû à <strong>la</strong> formation des niveaux de Landau<strong>pour</strong> un gaz d'électron de Dirac possédant une dégénérescence de spin <strong>et</strong> devallée. L'application d'un champ magnétique intense sur des échantillons de fortes