86 Chapitre 4. Magnéto-transport dans le graphène désordonnéde porteurs est plus importante, ces conditions sont vériées. Le coecient α peuts'écrire alors simplement comme α(V g , B) = 2R xy (V g , B)e 2 /h. On remarque que<strong>la</strong> transition entre le régime de conduction électronique (α = −1) <strong>et</strong> le régime deconduction de trous, devient plus "douce" sous champ magnétique intense. Ainsi,quelque soit <strong>la</strong> valeur de <strong>la</strong> tension de grille, entre 20T <strong>et</strong> 55T, α est réduit. Onvoit aussi que <strong>la</strong> valeur de <strong>la</strong> tension de grille <strong>pour</strong> <strong>la</strong>quelle α = 0, (c'est-à-dire quen e = n h ) passe de 52V à champ nul, à 49V à 55T. Pour c<strong>et</strong> échantillon l'applicationd'un champ magnétique supérieur à 30T induit donc de profondes modications duratio électrons-trous.La partie supérieure de <strong>la</strong> gure 4.10 (a) est une vue schématique de <strong>la</strong> surfacede l'échantillon. Les zones bleues (rouges) représentent le potentiel électrostatiquenégatif (positif) à longue portée des impur<strong>et</strong>és chargées. La partie inférieure de <strong>la</strong>gure 4.10(a) illustre les modu<strong>la</strong>tions spatiales, décou<strong>la</strong>nt de <strong>la</strong> présence de ces impur<strong>et</strong>és,de l'équipotentielle d'énergie nulle E 0 au sein de l'échantillon [Gal<strong>la</strong>gher 2010].Quand un champ magnétique est appliqué perpendicu<strong>la</strong>irement au p<strong>la</strong>n de graphène,<strong>la</strong> quantication en orbite cyclotron se produit. La variation spatiale du potentielélectrostatique induit <strong>la</strong> formation "d'échelles de Landau" spatialement ségréguées,dont l'énergie re<strong>la</strong>tive varie les unes par rapport aux autres en fonction du dopagelocal de l'échantillon. L'énergie du niveau n = 0, E 0 , suit les variations du potentielélectrostatique [Sarma 2009]. A l'exception du niveau n = 0, l'énergie des niveauxde Landau (n > 1) va augmenter avec le champ magnétique. Lorsque ν = 2, seulle niveau n = 0 se situe encore en dessous du niveau de Fermi. La gure 4.10 (b)illustre <strong>la</strong> dépendance en champ magnétique de <strong>la</strong> densité d'états <strong>pour</strong> trois zonesarbitraires de l'échantillon qui sont respectivement : (3) dopée en électron, (2) dopéeen trous, <strong>et</strong> (1) neutre, lorsque le niveau de Fermi est à énergie nulle (0.0 sur<strong>la</strong> gure 4.10 (a) inférieure). Le niveau de Fermi est choisi de telle manière qu'àchamp magnétique nul, seul des électrons sont présents dans le système. Le champmagnétique B1 est choisi assez grand <strong>pour</strong> que tous les porteurs de charges soitdistribués dans le niveau n = 0 <strong>pour</strong> les trois zones. Trois règles nous perm<strong>et</strong>tentde prédire l'e<strong>et</strong> du champ magnétique sur ce système : (i) l'énergie des niveauxde Landau n = 0 dans les trois zones, notée E 0 sur le schéma, ne varie pas avecle champ magnétique <strong>et</strong> est seulement déterminée par le potentiel électrostatiquelocal dans l'échantillon, (ii) <strong>la</strong> dégénérescence orbitale des niveaux de Landau n = 0augmente avec B <strong>et</strong> (iii) le niveau de Fermi est uniforme sur l'échantillon. On endéduit donc que quand le champ magnétique passe de B1 à B2 (B2 > B1) , l'énergiede Fermi diminue <strong>pour</strong> accommoder l'augmentation de <strong>la</strong> densité d'états à E 0dans les trois zones. Pour les champs magnétiques assez intenses, <strong>la</strong> densité d'étatsdu niveau de Landau n = 0 de <strong>la</strong> zone (3) devient susamment importante <strong>pour</strong>accommoder l'intégralité des porteurs. L'énergie du niveau de Fermi converge doncvers le niveau n = 0 de plus basse énergie (celui de <strong>la</strong> zone (3)). L'énergie du niveaude Fermi est alors inférieure à E 0 <strong>pour</strong> les zones (1) <strong>et</strong> (2). La conséquence évidented'un tel processus est l'apparition d'états de trous au dessus du niveau de Fermidans les zones (1) <strong>et</strong> (2). Ces états de trous peuplés ont un impact direct sur l'e<strong>et</strong>Hall : les deux types de porteurs sont présents dans le système, il en découle une
4.2. Impact du désordre sur le p<strong>la</strong>teau ν = 2 dans le régime d'e<strong>et</strong> Hallquantique 87Figure 4.10 (a) Partie supérieure : schéma 2D représentant en échelle de couleurle potentiel électrostatique local sur un échantillon de graphène. La couleur vertereprésente les zones neutres, les impur<strong>et</strong>és chargées sont représentées par les pointsrouges (positives) <strong>et</strong> bleus (négatives). Partie inférieure : modu<strong>la</strong>tion spatiale del'équipotentielle d'énergie nulle induite par les impur<strong>et</strong>és chargées. La ligne rougecontinue représente un niveau de Fermi arbitraire dans le cas d'un échantillon dopéen électron. La ligne noire pointillé représente le niveau d'énergie zéro <strong>pour</strong> le graphènepristine. (b) Densité d'états au voisinage de zéro <strong>pour</strong> trois zones sélectionnéesde l'échantillon à diérents champs magnétiques. L'énergie du niveau de Fermi estmarquée par une ligne rouge.diminution de <strong>la</strong> résistance de Hall dans le régime des champs magnétiques intensescomme ce<strong>la</strong> est observé expérimentalement. Nous remarquerons ici que, bien que,par commodité nous ayons choisi de décrire sur <strong>la</strong> gure 4.10 un échantillon initialementdopé en électron, le même raisonnement s'applique à un échantillon qui seraitinitialement dopé en trous. Dans le modèle présenté ici, <strong>la</strong> coexistence électronstrousinduite par le champ magnétique est directement reliée à <strong>la</strong> conguration dudésordre dans l'échantillon. Ceci est en accord avec <strong>la</strong> valeur unique de ν c reportéeexpérimentalement quelque soit <strong>la</strong> concentration de porteurs <strong>pour</strong> une congurationde désordre donnée. Ce scénario valide aussi <strong>la</strong> valeur de ν C plus faible quand <strong>la</strong>force du désordre est réduite. Proche du point de neutralité de charge, quand lesélectrons <strong>et</strong> les trous coexistent à champ nul, l'explication proposée reste valide <strong>et</strong>le champ magnétique tend à équilibrer les deux densités de porteurs. Notons toutde même que <strong>la</strong> légère variation de <strong>la</strong> valeur du point de neutralité de charge avecle champ magnétique est inattendue dans le modèle présenté ci-dessus (voir gure4.9). Ce<strong>la</strong> est susceptible d'être expliqué par une légère asymétrie entre électrons <strong>et</strong>trous à basse énergie. Les e<strong>et</strong>s des contacts sur le dopage local des porteurs peuvent