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— Prenez votre chapeau et votre manteau pour venir avec moi. Je n’ai pas ma trousse de<br />
tortionnaire. Tous mes appareils sont au <strong>commis</strong>sariat. Vous avez <strong>le</strong>s menottes, F<strong>le</strong>tcher ?<br />
— Oui, monsieur.<br />
Mitzi avait reculé de quelques pas.<br />
— Mais je ne veux pas vous suivre !<br />
— Alors, il faut répondre poliment aux questions qu’on vous pose poliment.<br />
El<strong>le</strong> mit son rou<strong>le</strong>au à pâtisserie sur la tab<strong>le</strong>, s’essuya <strong>le</strong>s mains avec un torchon et s’assit,<br />
avant de dire, d’un ton maussade :<br />
— Qu’est-ce que vous vou<strong>le</strong>z ?<br />
— Que vous me racontiez ce qui s’est passé ici hier soir.<br />
— J’ai voulu m’en al<strong>le</strong>r. Est-ce qu’el<strong>le</strong> vous l’a dit ? Quand j’ai vu que <strong>le</strong> journal annonçait<br />
un <strong>meurtre</strong> qui aurait lieu ici, j’ai voulu partir. El<strong>le</strong> s’est arrangée pour me retenir. Mais je<br />
savais, moi, ce qui arriverait et que je <strong>sera</strong>is assassinée...<br />
— Mais on ne vous a pas assassinée, il me semb<strong>le</strong> !<br />
El<strong>le</strong> en convint à regret.<br />
— Alors, reprit Craddock, racontez-moi ce qui s’est passé ?<br />
— J’étais nerveuse, terrib<strong>le</strong>ment nerveuse... Avec tous ces gens dans la maison... A<br />
commencer par cette Mrs. Haymes, qui est arrivée par la petite porte, sous prétexte qu’el<strong>le</strong><br />
ne voulait pas salir <strong>le</strong>s marches de l’entrée. Comme si el<strong>le</strong> se souciait de ça ! El<strong>le</strong> s’en fiche<br />
bien ! Cette femme-là me regarde du haut de sa grandeur comme si j’étais de la boue…<br />
— Laissons Mrs. Haymes de côté, vou<strong>le</strong>z-vous ?<br />
— Pour qui se prend-el<strong>le</strong> ? El<strong>le</strong> n’est qu’une vulgaire salariée, qui bêche <strong>le</strong>s plates-bandes<br />
et tond la pelouse. Alors, pourquoi prétend-el<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong> est une dame ?<br />
— Je vous ai dit de laisser Mrs. Haymes de côté. Continuez !<br />
— Je porte <strong>le</strong> xérès et <strong>le</strong>s verres au salon, ainsi que <strong>le</strong>s bons petits gâteaux que j’avais<br />
préparés. Puis, on sonne et je vais à la porte. Je retourne à la cuisine et ça recommence ! Je<br />
vais de nouveau à la porte, je ne sais combien de fois... C’est humiliant, mais je <strong>le</strong> fais !<br />
Après, je regagne l’office et je me mets à astiquer <strong>le</strong>s cuivres et, pour être sûre de pouvoir<br />
me défendre si quelqu’un vient pour me tuer, je garde à portée de la main un grand couteau<br />
à découper, bien affûté.<br />
— <strong>Un</strong>e sage précaution...<br />
— Et puis, tout à coup, j’entends des coups de feu. Je me dis : « Ça y est ! », je cours à la<br />
sal<strong>le</strong> à manger et je reste là à écouter. Alors, il y a un second coup de revolver et un grand<br />
bruit dans <strong>le</strong> vestibu<strong>le</strong>, comme quelque chose qui tombe. Je tourne <strong>le</strong> bouton de la porte,<br />
mais el<strong>le</strong> est fermée de l’autre côté. Je suis comme une souris prise au piège. Alors, je crie,<br />
je crie, de toutes mes forces, tout en tapant sur <strong>le</strong> panneau ! Enfin, j’entends bouger <strong>le</strong><br />
verrou et on me délivre ! J’apporte des bougies, beaucoup de bougies... Et puis, la lumière<br />
revient et je vois du sang... Du sang ! Ach ! Gott in Himmel ! Ce n’est pas la première fois<br />
que je vois du sang... Mon jeune frère, je l’ai vu assassiner sous mes yeux... J’ai vu du sang<br />
dans <strong>le</strong>s rues... J’ai vu des hommes tomber sous <strong>le</strong>s bal<strong>le</strong>s du peloton d’exécution, j’ai vu...<br />
— Merci.<br />
— Et maintenant, arrêtez-moi et conduisez-moi en prison !<br />
— Pas aujourd’hui ! répondit l’inspecteur.<br />
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