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Un meurtre sera commis le...

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douze ans. Pendant toutes ces années, j’ai eu, moi, <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures raisons du monde de tuer<br />

Mrs. Gœd<strong>le</strong>r. Seu<strong>le</strong>ment ça ne vous avance pas !<br />

— Je vous demande pardon de poser la question, miss Blacklock, mais Mrs. Gœd<strong>le</strong>r n’a-tel<strong>le</strong><br />

pas trouvé ces dispositions testamentaires assez... étranges ?<br />

— Inuti<strong>le</strong> de vous excuser ! Ce que vous vou<strong>le</strong>z savoir, en fait, c’est si j’ai ou non été la<br />

maîtresse de Randall Gœd<strong>le</strong>r. Eh bien ! non ! Je ne crois pas que Randall m’ait jamais aimée<br />

et, moi, je ne l ’ ai certainement jamais aimé, au sens où vous l’entendez. J’ai toujours eu<br />

beaucoup d’affection pour Bel<strong>le</strong>. C’est sa femme. Selon toute vraisemblance, c’est par<br />

reconnaissance qu’il a songé à moi dans son testament. Il faut que vous sachiez, inspecteur,<br />

que, tout au début de sa carrière, alors que sa situation était encore loin d’être assise,<br />

Randall, un jour, s’est trouvé à deux doigts de la culbute. Il ne lui fallait que quelques milliers<br />

de livres, mais il <strong>le</strong>s lui fallait tout de suite. J’avais, moi, des économies et je croyais à son<br />

étoi<strong>le</strong>. Je réalisai tout ce que je possédais et je lui donnai l’argent. Huit jours plus tard, il<br />

était à la tête d’une fortune colossa<strong>le</strong>. Dès lors, il me traita un peu comme une associée.<br />

Après un soupir, el<strong>le</strong> poursuivit :<br />

— Mon père mort, ma sœur étant malade sans espoir de guérison, je dus tout quitter pour<br />

m’occuper d’el<strong>le</strong>. Randall disparut deux ans plus tard. J’avais gagné beaucoup d’argent avec<br />

lui, du fait de notre association, et je ne m’attendais pas à ce qu’il me laissât quelque chose.<br />

Mais je fus très touchée – et, oui, très fière – d’apprendre que toute sa fortune me revenait si<br />

Bel<strong>le</strong> venait à mourir avant moi. Et el<strong>le</strong> était de santé précaire… J’imagine que <strong>le</strong> pauvre<br />

homme ne savait trop à qui laisser son argent. Bel<strong>le</strong>, qui est une créature adorab<strong>le</strong>, trouva<br />

tout cela fort bien. El<strong>le</strong> vit en Ecosse et je ne l’ai pas vue depuis des années, mais nous nous<br />

écrivons régulièrement à Noël. Il faut dire, juste avant la guerre, je suis allée m’instal<strong>le</strong>r en<br />

Suisse, avec ma sœur. Cel<strong>le</strong>-ci est morte là-bas, dans un sanatorium, et je ne suis rentrée en<br />

Ang<strong>le</strong>terre que l’an dernier.<br />

El<strong>le</strong> se tut et ce fut Craddock qui, <strong>le</strong> premier, rompit <strong>le</strong> si<strong>le</strong>nce.<br />

— Vous avez précisé tout à l’heure que bientôt peut-être vous seriez fort riche. Pourquoi<br />

« bientôt » ?<br />

— Parce que j’ai appris par la nurse qui la soigne que Bel<strong>le</strong> s’affaiblit de jour en jour. La fin<br />

ne <strong>sera</strong>it qu’une question de semaines...<br />

Amère, el<strong>le</strong> ajouta :<br />

— Cet argent, je ne peux même pas dire qu’il me fera plaisir ! J’en ai plus qu’il ne m’en faut<br />

pour mes besoins, qui sont modestes. En tout cas, inspecteur, vous voyez que, si Patrick et<br />

Julia avaient envie de me tuer pour mon argent, à moins d’être fous, ils attendraient<br />

quelques semaines.<br />

— C’est juste. Mais qu’adviendrait-il si vous veniez à disparaître avant Mrs. Gœd<strong>le</strong>r ? Où<br />

irait l’argent ?<br />

— C’est une question que je ne me suis jamais posée ! A Pip et Emma, j’imagine...<br />

Craddock ouvrait de grands yeux. El<strong>le</strong> sourit.<br />

— Si je meurs avant Bel<strong>le</strong>, la fortune ira aux légitimes héritiers de Sonia, la sœur unique de<br />

Randall. Il s’était brouillé avec el<strong>le</strong>, parce qu’el<strong>le</strong> avait épousé un homme qu’il tenait pour un<br />

escroc.<br />

— Et qui l’était ?<br />

— Incontestab<strong>le</strong>ment. C’était un Grec, un Roumain ou quelque chose comme ça... Il<br />

s’appelait... comment donc ?... J’y suis ! Stamfordis, Dmitri Stamfordis.

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