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CENTRE DE RECHERCHES ET D'ETUDES SUR LES ... - CREDHO

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L’applicabilité de l’article 6 à l’espèce dépend du point de savoir s’il s’y trouvait une décision sur<br />

le bien-fondé d’une accusation en matière pénale. Le gouvernement contestait cette applicabilité et<br />

qualifiait d’administratives l’accusation, les investigations, la Commission de la concurrence, la<br />

décision ministérielle et la sanction. A l’opposé, la requérante soutenait l’applicabilité et<br />

considérait comme pénales l’accusation d’infraction économique -même si la sanction prise par le<br />

ministre est économique- et la décision ministérielle refusant l’amnistie. La Commission confirme<br />

l’applicabilité en se référant à la jurisprudence de la Cour. Le mot “accusation” doit se comprendre<br />

au sens de la Convention” (arrêt Neumeister du 27 juin 1968), et l’ “accusation en matière pénale”<br />

se définit “aux fins de l’article 6 § 1” “comme la certification officielle émanant de l’autorité<br />

compétente, du reproche d’avoir accompli une infraction pénale” (arrêt Deweer du 27 février<br />

1980), même en l’absence d’arrestation ou d’inculpation. Et elle reprend à cette jurisprudence trois<br />

critères du caractère pénal, l’un formel et les autres matériels (arrêt Engel du 8 juin 1976, arrêt<br />

Oztürk du 21 février 1984). Ces critères ne semblent pas réunis pour le gouvernement, mais le sont<br />

aux yeux de la Commission.<br />

Le premier critère est constitué par la définition interne, la qualification, pénale ou non, de<br />

l’infraction. Or la définition française des sanctions pécuniaires est contradictoire : les sanctions<br />

pécuniaires prises par le ministre contre des personnes morales ne sont pas pénales pour le Conseil<br />

d’Etat (arrêt du 22 juin 1984). Mais les sanctions infligées par des organes administratifs<br />

indépendants de caractère non juridictionnel, tels que le Conseil de la concurrence établi par une<br />

ordonnance du 1er décembre 1986, se rattachent au droit pénal pour le Conseil constitutionnel<br />

(décision du 23 janvier 1987). Mais ces définitions internes n’ont pour la Commission qu’une<br />

valeur relative et ne sont pas déterminantes aux fins de la Convention ; elles ne peuvent écarter le<br />

jeu de l’article 6.<br />

Les deux autres critères sont matériels et analysent “les réalités de la procédure en litige”. C’est<br />

d’abord la nature de l’infraction (l’ordonnance de 1945 visait un but d’intérêt général : la libreconcurrence)<br />

normalement protégée par le droit pénal ; il visait des “infractions” et permettait au<br />

ministre de saisir le parquet aux fins de poursuites pénales, ou de sanctionner lui-même. C’est<br />

aussi la nature et la sévérité de la sanction. Suivant la Cour, “relèvent en général du droit pénal les<br />

infractions dont les auteurs s’exposent à des peines destinées à exercer un effet dissuasif et qui<br />

consistent d’habitude en des mesures privatives de liberté et des amendes” (arrêt Oztürk). La<br />

Commission estime que la sanction prise par le ministre est ici dissuasive et lourde.<br />

La Commission déduit de ce faisceau d’indications que la décision ministérielle infligeant une<br />

sanction pécuniaire constitue bien, au regard de la Convention, une décision sur le bien-fondé<br />

d’une accusation pénale et présente le caractère d’une sanction pénale. Mais une dernière condition<br />

de la responsabilité pénale a trait à la personne en cause, s’agissant en l’espèce d’une personne<br />

morale. La responsabilité pénale des personnes morales est niée par le gouvernement, mais elle est<br />

admise ici par la Commission, en ce que la Convention n’en dit rien et que le droit français ménage

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