de l'exécution des peines à la centrale de Moulins, ce qui n'a pas été fait. Ils auraient dû ensuite dénoncer contre les juridictions judiciaires une voie de fait dirigée contre les mêmes magistrats et fonctionnaires, ce qui n'a pas été fait non plus. Telle a été la réponse du gouvernement français. La Cour n'a pas fait de réponse sur les arguments du gouvernement, il a seulement dit que l'usage, ininterrompu depuis le XIIème siècle, de la faculté d'opter entre la France et l'Espagne pour exécuter sa peine vaut Convention internationale (on retrouve plusieurs fois cet argument). Il n'y a donc pas eu de détention irrégulière ou arbitraire. On a parlé également de l'absence de contrôle de la régularité de la condamnation par la justice française. La Cour dit que la France peut assurer ce contrôle dans d'autres espèces. La Chambre d'accusation refusera une extradition dans le cas, par exemple, soit d’un délit politique, soit d’une expulsion vers un pays où la personne risque la peine de mort. La France est donc en mesure d’exercer ce contrôle, même si elle ne l'a pas fait en l'espèce. De plus, on fait argument de textes législatifs français applicables en l'espèce : la loi du 21 décembre 1984, qui existait au moment où les condamnés ont été expulsés vers les deux établissements pénitentiaires, et que l'on retrouve dans le Code de procédure pénale aux articles 713-1 à 713-8 ; dans la mesure où le transfert en France des détenus s’effectue selon des conventions internationales ou des accords internationaux, ici la coutume vaut également convention internationale. Les détenus andorrans sont donc incarcérés en France parfaitement légalement. Ce qui est intéressant dans cette espèce, c'est que les juges ne sont pas unanimes, et même si c'est pour la “beauté du geste”. Les opinions dissidentes et divergentes sont relativement denses, notamment sur la violation de l'article 5. Certains membres de la Cour européenne ont évoqué un problème d'illégalité indirecte de la peine, c'est-à-dire qu'à partir du moment où le Tribunal qui a prononcé cette peine a été manifestement partial, puisqu'un membre du pouvoir exécutif était présent dans la juridiction, on ne peut pas considérer que la peine est exécutée légalement en France. Il y a donc une illégalité indirecte : juridiction partiale, donc condamnation illégale. Le Tribunal aurait dû être déclaré partial et, par voie de conséquence, sa décision illégale. Le bâtonnier Pettiti exprimait ainsi son opinion divergente : “Pourquoi dire que la France et l'Espagne ne jouent aucun rôle en Andorre, alors qu'en définitive ils sont une partie prenante, bien sûr à 50/50 ”. Les deux pays prennent des décisions bien entendu exécutoires et applicables dans le territoire de la principauté d'Andorre. Notamment, toute la législation andorrane est faite soit par des magistrats français, soit par des administrations françaises ou espagnoles. Sur la violation de l'article 5, on a ensuite parlé des discriminations entre condamnés français et condamnés d'origine andorrane, dans la mesure où il existe une discrimination sur la libération conditionnelle, sur la grâce, sur l'amnistie. Le régime n’est pas exactement le même. Les opinions divergentes ont tout de même été remarquées et sont développées avec force dans la décision. C'est
donc une décision relativement originale dans la mesure où, surtout depuis le XIIème siècle, personne n'avait jamais osé contester cette détention arbitraire en France..., enfin soi-disant arbitraire, puisque la Cour a décidé, majoritairement, qu'elle nel’était pas. Il a fallu que la question soit soulevée dans cette espèce, extrêmement originale, et sur laquelle la Cour a été amenée à réfléchir.