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CENTRE DE RECHERCHES ET D'ETUDES SUR LES ... - CREDHO

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L'affaire Tomasi c. France<br />

par<br />

Maître Richard Sédillot<br />

Avocat à la Cour de Rouen<br />

L'arrêt Tomasi est un arrêt particulièrement intéressant rendu par la Cour européenne parce qu'il<br />

traite de trois problèmes fondamentaux évoqués par la Convention, qui sont le problème d'une part<br />

du délai raisonnable pour être entendu par un juge ou par un tribunal, d'autre part du problème de<br />

la détention provisoire et de la durée de cette détention, et puis enfin des traitements inhumains qui<br />

sont le cas échéant et en l'espèce c'est ce que M. Tomasi a connu, les traitements inhumains qui<br />

sont infligés pendant la période de garde à vue. Alors M. Tomasi est un Corse, ce qui semble avoir<br />

été aux yeux de nombreux magistrats français une circonstance plus qu’aggravante. Et on le<br />

suspecte très rapidement d'avoir participé à un attentat qui avait été revendiqué très peu de temps<br />

après sa commission par l'ex V.L.C. dont M. Tomasi ne faisait pas partie mais il militait auprès<br />

d'une association indépendantiste. Raison pour laquelle sans doute certains magistrats ont pensé<br />

qu'il était affilié au parti susdit. M. Tomasi va donc être inculpé par le juge d'instruction par un<br />

Pemier magistrat-instructeur, un magistrat corse qu'on va dessaisir de l'affaire à la demande du<br />

Parquet pensant qu'il règne dans l'île un climat qui n'est pas propre à la sérénité de la justice. Et un<br />

second magistrat-instructeur sera alors désigné, un magistrat de Bordeaux qui va mettre un certain<br />

temps à entendre pour la première fois l'inculpé. Alors M. Tomasi va introduire pendant toute la<br />

durée de la procédure vingt demandes de mise en liberté. Une dizaine devant les deux juges<br />

d'instruction, et un petit peu moins devant la Cour d'Appel de Bastia et devant la Cour d'Appel de<br />

Bordeaux. Et systématiquement dans les motivations des décisions rendues soit par les magistratsinstructeurs,<br />

soit par la Chambre d'Accusation, les mêmes motifs reviennent. Et on fait référence<br />

systématiquement à la gravité des faits reprochés à M. Tomasi, d'une part, et à la notion<br />

d'embrouille publique. Et puis parfois, mais de façon tout à fait accidentelle et anecdotique<br />

presque, les magistrats font référence à un danger de fuite sans jamais s'expliquer sur l'aspect<br />

concret de ce danger. Un certain nombre de pourvois vont également être formés par M. Tomasi à<br />

l'encontre des décisions qui refusent sa mise en liberté. Et systématiquement la Cour de Cassation<br />

refusera de remettre en cause les décisions des juges du fond. Seul un arrêt de la Chambre<br />

d'Accusation de la Cour d'Appel de Bordeaux sera cassé mais au motif que l'avocat de la défense<br />

n'avait pas eu la parole en dernier. Donc un motif parfaitement indépendant de la longueur de la<br />

détention. Il y a d'ailleurs un arrêt que j'ai eu la curiosité d'aller voir, rendu par la Chambre<br />

criminelle dans cette affaire, parce que (on le verra plus tard) M. Tomasi reprochait également aux<br />

forces de police de l'avoir torturées pendant la garde à vue. C'est le deuxième problème soulevé par<br />

cet arrêt. Et la Cour de Cassation dit "oui, effectivement c'est bien possible qu'il ait été torturé.<br />

Mais de toute façon, ça ne change pas grand chose parce qu'il a plus ou moins renouvelé ses

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