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Le Conte

Tout sur les contes

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DESCRIPTION SÉMIOTIQUE D'UN CONTE PHILOSOPHIQUE : CANDIDE<br />

de I a XVII-XVIII le contenu topique est inversé et que de XVIII à XXX, le contenu<br />

topique est posé.<br />

1. LE CONTENU CORRELE INITIAL<br />

L'univers proposé au lecteur possède des traits structurels caractéristiques du<br />

conte merveilleux :<br />

- le « chronotope » (Bakhtine) c'est-à-dire l'espace-temps est faiblement<br />

indicié (« Westphalie » temporellement indéterminée).<br />

- c'est un univers axiologique contenant des valeurs prescrites que partagent<br />

les individus de la communauté.<br />

Ex. : fermeture de la famille du baron et par extension de la noblesse (cf.<br />

« <strong>Le</strong>s soixante et onze quartiers ») (p. 143, I) ; cf. le rôle d'idéologue de<br />

Pangloss qui justifie l'ordre social (« _ le château de monseigneur le baron<br />

était le plus beau des châteaux et madame la meilleure des baronnes<br />

possibles » (p. 144, I).<br />

- c'est un monde stabilisé comme « euphorique » (Greimas) qui a toutes les<br />

apparences d'un paradis (il sera d'ailleurs dénommé ainsi au début du chapitre). <strong>Le</strong><br />

château de M. le Baron est « le plus beau des châteaux » et Mme la baronne est « la<br />

meilleure des baronnes ». Monde clos, hiérarchisé, ordonné, sans histoires et hors de<br />

l'histoire, ce microcosme projette ses qualités sur l'univers entier. Pangloss, par<br />

exemple, en est le plus grand philosophe et « par conséquent de toute la terre ».<br />

Mais à la différence des contes merveilleux traditionnels, le narrateur<br />

énonciateur ne fait pas « partie, sociologiquement, de la société du destinataire dont<br />

il représente le point de vue » (Greimas).<br />

Au contraire, il intervient à plusieurs reprises pour indiquer que ce monde est<br />

placé sous le signe de l'illusion, du paraître :<br />

Ex. : l'argument qui justifie la puissance du baron est contraire à la thèse<br />

affirmée (« _car son château avait une porte et des fenêtres_ »)<br />

Ex. : le discours de Pangloss. Il fonctionne par enthymènes fantaisistes où la<br />

majeure n'est jamais explicitée mais remplacée par un « il est démontré que ».<br />

L'accumulation de morphèmes tels que « car, par conséquent,<br />

nécessairement » masque sous l'apparence de la rigueur, l'illogisme des<br />

raisonnements téléologiques. Une seule phrase échappe au syllogisme : « _ le<br />

plus grand des barons doit être le mieux logé ». Assertative, elle illustre le rôle<br />

d'idéologue de Pangloss.<br />

Ex. : l'usage de l'italique de mention (« dans le petit bois qu'on appelait<br />

parc_ » (p. 145, I) qui signale une disjonction de point de vue entre celui de la<br />

commuanuté noble et celui du narrateur.<br />

Cette rupture par rapport à l'énonciation des contes merveilleux rend compte<br />

de l'enjeu philosophique du conte de Volaire. Elle est à analyser au niveau de<br />

la dimension cognitive du récit, sachant que celle-ci est elle-même saisissable<br />

à deux niveaux :<br />

1) externe : un faire persuasif (celui de Voltaire) qui utilise une fiction pour<br />

argumenter son lecteur.<br />

2) interne : cette fiction comprend un acteur, représentant figuratif du<br />

système philosophique de <strong>Le</strong>ibniz (« il prouvait admirablement qu'il n'y a point<br />

d'effets sans causes, et que, dans ce meilleur des mondes possibles _ » (p. 144, I)<br />

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