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De l’éthique dans le sport : contexte historique et philosophique<br />

2. que le sport est le foyer de multiples contradictions (règle/aléa, liberté/<br />

nécessité, gratuité/utilité, mesure/démesure, jeu/réalité, corps/pensée)<br />

qui nous obligent non pas à les surmonter et les abolir mais au contraire<br />

à les maintenir lucidement et dialectiquement en introduisant en elles un<br />

fragile équilibre.<br />

Le sport possède une vertu éthique dans la mesure où toutes les activités de<br />

la vie quotidienne trouvent en lui un « déport » mais un déport qui doit être<br />

lui-même capable de se déporter, de se décentrer par rapport à lui-même.<br />

Par cette scission ou contradiction interne, le sport est éthique parce qu’il<br />

construit la liberté, la responsabilité et l’autonomie de la personne humaine<br />

non comme substance (qui est ce qu’elle est) mais comme ce qui par principe<br />

est toujours et justement capable de se déporter de soi, de sa stricte identité<br />

et des fonctions que le monde fait peser sur elle et dans lesquelles il a<br />

toujours tendance à nous enfermer.<br />

Ainsi, le sport n’est-il un jeu constitutif de la personne qu’à la double condition<br />

contradictoire de nous mettre hors de la réalité et de nous ramener à<br />

cette réalité dont il va nous permettre une <strong>plus</strong> grande maîtrise. Sa fiction<br />

n’est positive qu’à la condition de ne pas être une illusion, une apparence<br />

ou un rêve. Or, une fiction n’est une apparence que si son monde imaginaire<br />

se donne comme une transposition simplifiée, éclairée, embellie ou<br />

modélisée de la réalité même dont le monde imaginaire est une transfiguration.<br />

La transposition sportive est donc de même nature que la transposition<br />

artistique mais elle possède quelque chose de spécifique dans la<br />

mesure où elle n’est pas seulement le transport d’une représentation (une<br />

métaphore) : elle est aussi le transport même du corps dont les gestes, les<br />

énergies, les pulsions, c’est-à-dire les transports, sont eux-mêmes transportés<br />

ou transfigurés par une canalisation, une stylisation qui les rend à la fois<br />

<strong>plus</strong> efficaces, <strong>plus</strong> beaux et <strong>plus</strong> libres. Si l’œuvre d’art est une eutopie<br />

parce qu’elle est une eusunopsis (le bonheur du regard d’une totalité), le<br />

sport intègre ces deux propriétés à l’intérieur d’une euphorie, du bonheur<br />

du transport du corps.<br />

Car, comme pratique corporelle, le sport nous ramène salutairement au<br />

corps, surtout dans une société qui l’assiste de <strong>plus</strong> en <strong>plus</strong> (au risque de<br />

l’oublier) par les prothèses techniques que sont les moyens de locomotion,<br />

les moyens d’information et de communication ou les moyens de production.<br />

Mais ce rappel du corps (ce rappel de la réalité) ne serait qu’une régression<br />

que l’utopie pérecquienne nous a montrée comme monstrueuse, si ce corps<br />

ne possédait pas dans son exercice sportif, c’est-à-dire dans le perfectionnement<br />

et dans le dépassement même de ses possibilités, le retrait, la limite,<br />

la mesure, la pensée de sa discipline et de sa maîtrise, ce que Marc Aurèle,<br />

le grand philosophe et empereur romain (qui s’y connaissait donc à la fois<br />

en philosophie et en puissance), appelait la douceur. Il n’y a de douceur<br />

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