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Ethique et sport en Europe<br />

nous, celui de la musculature (Travaillot, 1998), autant de capitaux corporels<br />

faisant défaut à nos enquêtés. Pour reprendre la métaphore de Norbert<br />

Elias et Eric Dunning, l’analyse de la non-pratique sportive offre une clé de<br />

compréhension de la société dans son ensemble. Elle concerne le vif impact<br />

de l’apparence corporelle et de ses écarts manifestes aux normes admises.<br />

Dans tous les cas, elle touche et concerne les enfants dans leur identité à un<br />

moment où la construction (Heinich, 1999) de celle-ci s’avère d’autant <strong>plus</strong><br />

importante qu’elle signe leur entrée dans cette période instable que peut<br />

constituer l’adolescence. C’est lorsque le fonctionnement normal défaille<br />

que le verrou saute et qu’apparaît l’importance du mécanisme qui agit silencieusement<br />

tant il est huilé.<br />

Cette violence non spectaculaire mais répétée est liée à une position de<br />

domination où le dominé est choisi pour un handicap réel ou collectivement<br />

admis. Ce type de violence, révélée par les travaux psychologiques de Dan<br />

Olweus et son concept de « bullying » – repris en français sous le vocable<br />

de harcèlement, puis affiné (Blaya, 2006) –, rappelle l’impact anxiogène à<br />

long terme que cette violence insidieuse et inscrite dans la durée produit sur<br />

les victimes. David se rappelle ainsi :<br />

« Si on parle de tes récréations en primaire : que faisais-tu pendant ce<br />

temps-là ?<br />

– Oh, je restais sur le bord. Je m’amusais, avec les filles… Y avait même<br />

beaucoup de filles qui faisaient du sport. J’étais souvent sur le bord, sur la<br />

touche. Je recevais le ballon dans la tronche, j’étais vraiment la tête de Turc.<br />

[…] Quand j’étais petit, j’étais vraiment mis à l’écart, parce que le sport<br />

c’était vraiment… Les récréations c’était tout le temps la balle aux prisonniers,<br />

c’est la partie de foot… Même la marelle je n’y jouais pas, même les<br />

billes ! Tout ce qui représentait le sport, que ce soit la moindre concentration<br />

des muscles sportifs, c’était non. J’étais dégoûté, quoi. »<br />

L’exclusion qui en découle n’est pas seulement personnalisée par l’adversaire<br />

de jeu, mais aussi par les partenaires qui peuvent aussi devenir agresseurs<br />

lorsque l’association dans une équipe d’un joueur incompétent handicape<br />

la performance du groupe.<br />

La violence institutionnelle<br />

Un fait contemporain semble éclairer <strong>plus</strong> précisément le dégoût dont une<br />

partie du sport fait l’objet. Il concerne les dérives de la compétition, perçues<br />

comme grandissantes dans ce champ par les enquêtés. Voici résumées les<br />

conceptions des parents et enfants non sportifs à cet égard. La critique est<br />

d’abord anthropologique : la compétition implique un vainqueur et un vaincu,<br />

avec toute la violence symbolique que cela suppose (Jeu, 1972, p. 11). Une<br />

critique morale ensuite, envers le sport élitiste qui n’engage que les meilleurs<br />

en compétition et délaisse, voire exclut, les <strong>plus</strong> faibles. La critique est aussi<br />

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