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124 JOURS DE FAMINE El' DE DÉTRESSE 1<br />
Chez moi, toute émotion se traduit par des<br />
tremblements. Je partis donc en tremblotant. Je<br />
pris le quartier juif où, de porte en porte, j'of<br />
fris timidement mes casseroles. On avait refusé<br />
partout, et voilà qu'une juive m'acheta: les trois<br />
pots à la fois. Ah ! par exemple ! du coup, de<br />
froid que j'avais, je pris la fièvre. Je cours à la<br />
maison chercher trois autres casseroles ; je les<br />
vends. Quelle joie ! Le soir, j'avais un gain ines<br />
péré d'un demi-florin. J'écrivis tout de suite à<br />
mon père de ne pas E'inquiéter de nous : que,<br />
moi, je gagnais largement la vie pour tous ; que<br />
je n'avais plus de semelles à mes souliers, mais<br />
que je mettrais des s'abots ; qu'il devait " seule<br />
ment sonser à s'innocenter de son larcin.<br />
Me voilà marchande de rue ! En quelques<br />
jours, avec un peu de crédit, j'eus une charrette<br />
pleine de poteries, qu'en criant je débitais de<br />
porte en porte : « Koop ! potten en pannen !<br />
Koop 1 » (1)<br />
Comme les Pâques juives approchaient, j'al<br />
lai dans la Joden Breestraat me poster parmi les<br />
autres colporteurs, chez qui les juives venaient<br />
renouveler leur vaisselle de Pâques. Comme tous<br />
les marchands, je tlevenais fourbe. Quand je<br />
(1) Achetez des pots et des casseroles ! Achetez !