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JE QUITTE MA PLACE 137<br />
-<br />
service, dit mon père. Quand on est bien nourrie,<br />
on doit supporter beaucoup. Nous chantions ' pour<br />
oublier la faim, et tu vois, la lampe va s'éteindre,<br />
faute d'huile.<br />
- Je savais tout cela, et je suis revenue quand<br />
même. Les premiers jours, étant affamée, je tor<br />
chais tous les plats avec ma langue, j'étais insa<br />
tjable. Mais quoi ! je ne suis pas une mTndüÏnte :<br />
je ne veux donc pas être nourrie de lèurs restes .<br />
..<br />
Je les ai vus remettre des pommes de terre de<br />
leurs assiettes sur le plat : c'était pour nous, et<br />
ils nous donnaient des tartines dans lesquelles<br />
ils avaient mordu. Eh bien ! quand je travaille,<br />
je prétends ne pas être traitée ainsi.<br />
« Je comprendrais qu'ils ne donnent pas de<br />
leur pain d'épice, ou de leur boudin de foie,<br />
et autres « délicatesses » . qu'ils ma ngent devant<br />
vous sans jamais rien vous en passer. Soit ! mais<br />
je ne veux 'Pas que mes tartines aient traîné sur<br />
leurs assiettes.<br />
- Tu oubliais la faim que tu as eue ici.<br />
- Non, père, seulement quand on travaille, ce<br />
n'est pas comme si on re_cevait une, charité.<br />
- Tu es ingrate, petite : tu mangeais le pain<br />
de tes maîtres et tu n'étais ps contente.<br />
- Ah ! non ! Je mangeais le pain d e mon tra<br />
vail, et non le leur. C'est comme la femme de<br />
}