journal of european integration history revue d'histoire de l ...

Le sommet de La Haye 91souvent répétée, le projet de sommet bénéficie d’un «préjugé favorable». Mais laFrance doit faire face aux assauts de ses partenaires et à ceux de la Commission quiredoutent la mise en place d’un nouvel organe qui viendrait affaiblir les institutionsexistantes et ferait dériver le système communautaire vers une «Europe desPatries». 48Pour écarter ce danger, deux parades sont imaginées. Il s’agit d’abord de limiterle rôle du sommet, en refusant l’idée de rencontres régulières qui impliquerait uneinstitutionnalisation déguisée et en lui déniant la possibilité de devenir un organede la CEE, voire une instance d’appel susceptible de mettre en cause les décisionsdu Conseil. 49 Sur ces points, Paris se montre volontiers rassurant. 50 L’autre paradeconsiste à associer la Commission de Bruxelles aux travaux du sommet. Leprésident de la Commission, Jean Rey, monte au créneau pour manifester savolonté d’y participer. Il s’exprime en ce sens au sein du Conseil dès le 22 juillet etobtient immédiatement le soutien des Cinq. 51 Il intervient aussi, quelques joursplus tard, à Paris, auprès de Maurice Schumann. Mais le gouvernement français semontre très réticent, rappelle que la Commission n’avait pas été admise à Rome en1967 et qu’il ne voit aucune raison de procéder autrement. 52 Il cherche à trouverune solution permettant de donner une satisfaction partielle aux champions desinstitutions communautaires tout en reléguant la Commission à l’arrière-plan.Selon le président Pompidou, il convient de donner l’impression que laCommission est traitée avec égard mais qu’elle est «un instrument desgouvernements et non un organe indépendant». 53 Après avoir envisagé pour elle unstatut d’observateur, 54 Paris propose de l’inviter à l’une des trois séances dusommet, en fait à la deuxième, qui doit s’occuper des dossiers communautaires,tandis que la première séance sera consacrée à un échange de vues général et ladernière à l’établissement des conclusions. 55 De fait, Jean Rey participera à laséance du mardi 2 décembre au matin, accompagné d’un autre membre de laCommission, Edoardo Martino, et de quatre fonctionnaires mais non de l’ensembledes vice-présidents comme il avait été proposé.Cependant, même si la Commission n’obtient qu’un strapontin au sommet deLa Haye, elle est associée indirectement à la préparation de la conférence. LeConseil lui demande, en effet, une mise à jour de l’avis formulé en 1967 sur lesdemandes d’adhésion des candidats et, en venant présenter le nouvel avis devant leConseil le 17 octobre, Jean Rey ne se prive pas d’exposer son point de vue surl’élargissement et, du coup, sur les modalités d’une relance dans son ensemble. 5648. La Haye à Paris, 23 juillet 1969, MAE, 2724.49. La Haye à Paris, 23 juillet, Bruxelles à Paris, 23 juillet, Rome à Paris, 30 juillet et 16 septembre1969, MAE, 2724.50. Note du 31 juillet 1969 (réponse à un questionnaire allemand), MAE, 2724.51. PV du Conseil du 22 juillet, Archives du Conseil, Bruxelles.52. Note de la sous-direction Europe occidentale, 28 août 1969, MAE, 2724.53. Note de Pompidou, sans date, 5AG2, 1006.54. Note pour le président, 1 er août, 5AG2, 1010.55. Bruxelles à Paris, 16 septembre et 11 novembre 1969, MAE, 2724.56. PV du Conseil du 17 octobre, Archives du Conseil, Bruxelles.