journal of european integration history revue d'histoire de l ...

Le sommet de La Haye 95Approfondissement/élargissementSi l’achèvement est la première exigence du président Pompidou, la question del’élargissement est de toute évidence la priorité des Cinq, alors qu’elle n’est citéequ’en troisième position, après l’achèvement et, aussi, après l’approfondissement,dans le triptyque français. Cependant, il apparaît très vite, pour la France commepour ses partenaires, que les deux derniers volets doivent être liés.C’est Willy Brandt qui, le premier, exprime très nettement sa détermination àmener de front les progrès dans ces deux domaines. Le 22 juillet, à Bruxelles, auConseil Affaires générales, il intervient, immédiatement après Maurice Schumannqui vient de présenter la proposition du gouvernement français, pour soulignerqu’il y a une interdépendance entre le renforcement et l’élargissement de laCommunauté, qu’à défaut de lien juridique il existe une relation politique et qu’ilconvient donc d’obtenir des progrès parallèles dans ces deux domaines. 81 Cettethèse du lien politique entre les deux objectifs à poursuivre simultanément est, parla suite, constamment appuyée et développée par les ministres des Affairesétrangères, par la Commission et par Pompidou lui-même qui ne fait pas del’approfondissement un préalable à l’élargissement. 82 C’est le mot d’ordre qu’ildonne à ses collaborateurs lors du conseil restreint du 21 octobre où il déclare qu’iln’est pas raisonnable de demander que l’ouverture des négociations soitsubordonnée à l’approfondissement et qu’il faut accepter le parallélisme entreapprofondissement et élargissement. 83Dans la pratique, l’approfondissement passe à l’arrière plan. Il estsymptomatique que le triptyque allemand présenté à la presse le 2 juillet«achèvement, élargissement, Europe politique» 84 ne retienne pas cette expression.Les dirigeants et les diplomates français doivent se rendre à l’évidence: leurspartenaires ont peu d’intérêt pour l’approfondissement. 85 A Paris, on envisage uncertain nombre de coopérations souhaitables dans les domaines comme la monnaie,la technologie, les transports, l’énergie, le pétrole, etc. 86 Mais seul le dossiermonétaire est évoqué assez longuement dans l’un des deux conseils restreints, le 17novembre, par Valéry Giscard d’Estaing, sans d’ailleurs qu’une position françaiseunanime parvienne à se dégager. 87 Cette question monétaire n’est pas non plus81. PV du Conseil du 22 juillet 1969, Archives du Conseil, Bruxelles.82. Formule reprise par Maurice Schumann. Voir PV de l’entretien entre le ministre français desAffaires étrangères et Sigismund von Braun, ambassadeur de la RFA à Paris, 16 octobre 1969,5AG2, 104.83. Document cité en note 64.84. Note de l’Ambassade de France à Bonn, 3 juillet 1969, 5AG2, 104.85. Document cité en note 64.86. Il y a aussi des projets plus ponctuels. Par exemple, Pompidou parle de la société de droit européendont la réalisation représenterait un grand progrès pour le développement de l’Europe. PV del’entretien entre Georges Pompidou et le président Gustav Heinemann, lors du sommetfranco-allemand de Bonn, 8 septembre 1969, 5AG2, 104.87. Document cité en note 59.