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que manoir, toi qui jadis dominais si fièrement<br />
sur le riant val de la Vienne, tu as<br />
abrité les amours de Charles VII et e'es<br />
dans tes murs qu'est venue la pueelle<br />
d’Orléa.is pour marcher contre l’envahisseur<br />
étranger.<br />
Une inscription que la municipalité de<br />
Chinon a eu le bon esprit de faire placer,<br />
indique la chambre où eut lieu l’entrevne<br />
entre Jeanne d’Arc et Charles VII. Des<br />
fouilles récentes viennent de mettre à<br />
découvert les restes de cette salle, démolie<br />
au XVIIe siècle par ordre du duc de Richelieu.<br />
<strong>Les</strong> anciennes cours du château ont été<br />
converties en un charmant jardin anglais,<br />
et les vieilles tours,semblant s’élancer de<br />
ce fond verdoyant, font le plus pit’ ores-<br />
que effet. Du plateau de ce jardin, l’œil se<br />
repose merveilleusement sur le panorama<br />
de la Vienne. Au pied de l’observateur, à<br />
travers la prairie, se déroule comme un<br />
long serpent argentin la rivière de la<br />
Vienne ; sur les hauteurs, à l'horizon,<br />
dans les lointains du ton le plus rigoureux<br />
se détachent d’antiques manoirs et des clochers<br />
avec cimes élancées.<br />
R a b e la is<br />
Un nom que rappelle inévitablement la<br />
ville de Chinon, c’est celui de Rabelais, de<br />
l’immortel et satyrique auteur de Gargantua<br />
et de Pantagruel.<br />
Rabelais naquit à Chinon vers la fin du<br />
xve siècle dans la rue de la Lamproie. On<br />
montre encore aujourd’hui la maison<br />
qu’occupait son père ; mais l’auberge de<br />
la Lamproie a été presque complètement<br />
transformé.<br />
Le Chinonais est un pays où l’on aimait<br />
beaucoup jadis où l’on aime encore<br />
un peu aujourd’hui, il faut bien le dire, la<br />
vie grosse et les festins homériques, on<br />
se figure alors volontiers que Rabelais enfant,<br />
ayant en germe celte jovialité qu’il<br />
immortalisa, assistant aux joyeux festins<br />
de l’auberge de la Lamproie qui frappèrent<br />
sa jeune imagination, dut puiser dans<br />
ce pays les penchants de son exhubérante<br />
nature.<br />
Outre la maison de Rabelais, on peut encore<br />
voir eomme souvenir l’entrée des<br />
Caves peintes, souterrains ou l’auteur<br />
de Pantagruel place dans san roman le<br />
temple de la dive bouteille.<br />
Le plus beau souvenir Rabelaisien que<br />
les Chinonais ont à offrir aux étrangers<br />
c’est un magnifique portrait peint par<br />
Eugène Delacroix, portrait exposé dans<br />
la salle de l’hôtel de ville. Si ce n’est pas<br />
ane œuvre contemporaine de Rabelais, le<br />
peintre s’est vivement inspiré de son sujet.<br />
Il est impossible de mieux se représenter<br />
la franche et spirituelle figure et le<br />
sourire malin du grand satyrique.<br />
Le festival<br />
Arrivons maintenant au but principal de<br />
notre voyage et parlons du festival donné<br />
par la musique municipale de Chinon<br />
avec le concours des Sociétés musicales<br />
de Thouars et de Loudun.<br />
Dès le matin les vieux canons du château<br />
annoncèrent aux échos d’alentours que<br />
Chinon était en liesse.<br />
A D heures, à l’arrivée du train de Bres-<br />
suires, la municipalité et le conseil vinrent<br />
recevoir à la gare leurs invités ; puis<br />
on se dirigea au château où fut servi le<br />
vin d'honneur.<br />
C’est là, n’est-ce pas, lecteurs, un début<br />
vraiment louable et toutefois digne de cet<br />
excellent pays de cocagne et du bon vivre.<br />
Aussi en goûtant ce délicieux nectar,<br />
écrions-nous avec Maistre françois Rabelais<br />
: « ô lar.ryma christi, c’est bien de<br />
» Chinon ! C’est vin breton ! oh, le gen-<br />
» til vin ! Par mon âme ce n’est que vm<br />
» de taffetas. »<br />
Après la répétition d’ensemble vint<br />
nécessairement le déjeûner offert aux<br />
musiques de Thouars et de Loudun par<br />
la municipalité de Chinon dans la salle<br />
du théâtre élégamment décorée, déjeûner<br />
dans lequel la plus franche cordialité ne<br />
cessa de s’allier aux joyeusetés Rabelaisiennes<br />
qui caractérisent les chinonais.<br />
Au dessert M. Martin, doyen d’âge, du<br />
conseil présidant en cette qualité la réunion<br />
en l’absence dumaire et des adjoints,<br />
adressa aux invités les parotes suivantes :<br />
« Messieurs,<br />
« Je ne m’attendais pas à l’honneur de<br />
présidée cette petite fête de famille, je le<br />
dois à un privilège que personne n’enyie<br />
je le suppose : je suis le doyen d’âge.<br />
« Cet honneur revenait de droit à l’honorable<br />
maire de la ville, M. Faucon,<br />
que son état de santé retient chez lui.<br />
« Je crois être l’interprète des sentiments<br />
de tous en exprimant ici les regrets<br />
que nous cause son absence.<br />
« Maintenant, Messieurs, au nom de la<br />
municipalité de Chinon, que je représente,<br />
au nom de la commisssion de cette fête,<br />
dont j’ai l’honneur de faire partie, qu’il<br />
me soit permis d’adresser à MM. les musiciens<br />
de Thouars et de Loudun nos sincères<br />
rernercîments pour l’empressement<br />
qu’ils ont mis à répondre à l’invitation qui<br />
leur a été faite par leurs confrères de<br />
Cbinon, de venir prêter leur bienveillant<br />
concours à cette fêle dont le but est l’inauguration<br />
delà bannière offerte à la musique<br />
municipale de cette viile en récompense<br />
des prix qu’elle a obtenus l’an dernier<br />
au concours des <strong>Sables</strong>.<br />
* L’initiative de cette récompense est<br />
due à la bonne pensée de quelques dames<br />
de Chinon. Je saisis cette occasion de<br />
leur en adresser ici tous nos rernercîments<br />
et notre reconnaissance.<br />
« J ’espère, Messieurs, que cette joyeuse<br />
et charmante réunion ne sera pas la dernière<br />
et qu’à l’avenir plus d’une occasion<br />
se présentera où les musiques de Thouars,<br />
de Loudun et de Chinon viendront resserrer<br />
les liens qui les unissent déjà si<br />
étroitement.<br />
« Je bois avec bonheur aux musiques<br />
de Thouars, de Loudun et de Chinon. »<br />
De nombreux applaudissements accueillent<br />
cette franche et cordiale allocution.<br />
M. Rathier, sous-préfet de Chinon,<br />
adressa aux invités les paroles suivantes<br />
:<br />
« Messieurs,<br />
« Je tiens à exprimer à Messieurs les<br />
« organisateurs de cette joyeuse et utile<br />
« fête tous mes remerciements pour l’hon-<br />
« neur qu’ils m’ont fait en m’invitant à ce<br />
« banquet, auquel j ’ai été heureux d’as-<br />
« sister.<br />
« Vous exercez, Messieurs, avec autant<br />
« de talent que de succès un art qui<br />
« n’est pas purement d’agrément, mais<br />
« qui a son utilité bien réelle. La musi-<br />
« que offre aux populations, pour les<br />
« jours où les travaux sont suspendus,<br />
« une distraction simple et noble tout en-<br />
« semble ; elle calme, dans une certaine<br />
« mesure, à l’intérieur du foyer domesti-<br />
« que les ennuis et les soucis dont la vie<br />
« est fatalement semée ; elle entretient<br />
« chez les hommes, rassemblés autour du<br />
« drapeau national, un enthousiasme bien<br />
« nécessaire quand il s’agit de voler à la<br />
« défense de la patrie. (Nombreux applau-<br />
« dissements.)<br />
LA PLAGE<br />
« Enfin on ne contestera pas qu’elle<br />
« élève l’âme, qu’elle lui donne des ailes<br />
« jusqu’à ces régions où les sentiments<br />
« doivent être purs. Et c’est pourquoi<br />
« tous les peuples ont toujours associé la<br />
« musique aux cérémonies religieuses, au<br />
« culte que nous devons à la divinité.<br />
« Continuez donc à progresser dans<br />
« l’art musical, qui n’est pas fertile,<br />
« comme vous voyez. <strong>Les</strong> concours, les<br />
« réunions que vous organisez d’une ville<br />
« à l'autre sous la direction intelligente<br />
» de vos chefs, peuvent contribuer dans<br />
« une large mesure à ce perfectionne-<br />
« ment. Et je ne saurais trop louer, à cette<br />
« occasion, le zèle des honorables magis-<br />
« trats et fonctionnaires de cette ville qui<br />
« consacrent les loisirs dont ils peuvent<br />
« disposer à composer des morceaux d’en-<br />
« semble d’une mélodie si douce et si<br />
« agréable à entendre, et destinée à être<br />
« exécutés par les orchestres municipaux.<br />
« Le culte des beaux-arts que vous<br />
« professez, messieurs, entretient et établit<br />
« des liens d’amitié entre les hommes :<br />
« ils donnent naissance dans les concours,<br />
« dans les réunions de corporations musi-<br />
« cales, à une .émulation qui n’est pas de<br />
« la rivalité, mais bien de la fraternité.<br />
< (Applaudissements■ frénétiques.)<br />
» C’est l’exemple que nous donnent en<br />
» ce moment, dans cette enceinte,les trois<br />
» sociétés musicales réunies de Thouars,<br />
» de Loudun et de Chinon.<br />
» Que ces deux premières veuillent bien<br />
» garder précieusement le souvenir de la<br />
» franche et bonne hospitalité qu’elles<br />
» reçoivent. Nous les remercions du con-<br />
» cours si bienveillant et si empressé<br />
» qu’elles apportent à cette fête.<br />
» Je porte un toast à leur prospérité<br />
» ainsi qu’à celle de la société musicale<br />
» de cette ville où j ’ai l’honneur d’exer-<br />
» cer mes fonctions. »<br />
Toutes les mains se tendirent pour ser-<br />
ser dans une même étreinte celles de M.<br />
le sous-préfet et le remercier de ces bonnes<br />
paroles qui ont produit la plus chaleureuse<br />
et la plus sympathique impression<br />
sur toute l’assistance.<br />
M. Charpentier, président de la Société<br />
musicale de Loudun se leva ensuite. En<br />
quelques mots il exprima à l’Assemblée<br />
» ses regrets que le chef de la municipa-<br />
» lité de Loudun retenu par des intérêts<br />
» locaux n’ait pu se rendre à l’aimable<br />
» invitation de la municipalité de Chinon.<br />
» Il assura que cette réunion ne pourrait<br />
» que ressérer les liens de bonne amitié<br />
» qui existaient déjà entre Chinon et Lou-<br />
» dun.<br />
M. Proux, président de la Société musicale<br />
de Thouars, prit ensuite la parole.<br />
« Il exprima au nom de M. le maire de<br />
» Thouars et de la ville tout entière, ses<br />
» sincères remerciements pour l’accueil<br />
» fait à la musique municipale de cette<br />
» ville. »<br />
M. Laurent, chef de la musique de<br />
Chinon, remercia ses collègues de Thouars<br />
et de Loudun. « Je regrette, dit-il, qu’une<br />
» note triste vienne se faire entendre au<br />
» sein de cette réunion, car, au milieu de<br />
» la joie de nous retrouver ensemble,<br />
» nous ne pouvons que nous associer au<br />
» coup cruel qui vient de frapper notre<br />
» cher confrère Hermann, l’honorable chef<br />
» de la musique de Thouars. Chers col-<br />
» lègues, a-t-il ajouté, groupez-vous donc<br />
» autour de lui, afin que, s’il ne puisse<br />
» plus encore dire : mon enfant, il ait<br />
» du moins la consolation de dire : mes<br />
» enfants !.<br />
M. Duboz, membre de la commission<br />
d’organisation de la fête clôtura ces joyeuses<br />
agapes par quelques paroles toutes<br />
Rabelaisiennes :<br />
« M. Rathier, notre excellent sous-préfet,<br />
« et M. Martin l’honorable doyen du con-<br />
« seil municipal vous ont dit combien la<br />
« ville était heureuse de remercier de<br />