<strong>LA</strong> <strong>SCIENCE</strong> <strong>OCCULTE</strong> 118quelque temps cette qualité grandir. Et il en est de même pour d’autres vertus 1 .Il importe que les qualités une fois acquises soient sans cesse améliorées et fortifiées. Lamaîtrise des pensées et des sentiments doit aller assez loin pour que l’âme ait le pouvoir de créer desinstants de repos intérieur absolu, dans lesquels l’homme écarte de son cœur et de son esprit tout ceque la vie journalière lui apporte de bonheur et de peine, de satisfactions et de soucis, voire mêmede devoirs et de nécessités. Pendant ces moments, l’âme ne doit rien admettre dans son empire,qu’elle n’y ait expressément consenti. Il faut faire ici justice d’un préjugé facile. On peut prétendreque cette méthode rend l’homme étranger aux devoirs de l’existence. Il n’en est nullement ainsi. Deces instants de silence et de paix intérieure jaillissent des forces si vivifiantes que l’étudiant en lesemployant dans l’existence, remplit ses devoirs mieux qu’auparavant, bien loin de les négliger. Ilest précieux pour l’homme dans ces instants d’oublier ce qui le concerne personnellement pour nesonger qu’à des questions qui intéressent l’homme en général. S’il peut remplir son âme desenseignements relatifs aux mondes supérieurs, et que ces enseignements le captivent au même degréqu’un souci ou une affaire personnelle, son âme en recueillera des fruits particulièrementprofitables.Celui qui met ainsi de l’ordre dans sa vie intérieure s’élèvera jusqu’à un niveau où ilconsidérera ses propres affaires avec le même calme que si elles étaient celles d’un étranger. Voirdu même œil ses joies et ses chagrins, ou ceux d’autrui, est une préparation excellente audéveloppement spirituel. Il est bon, pour arriver à ce degré, de faire défiler devant son esprit à la findu jour les expériences de l’existence quotidienne ; de se contempler soi-même dansl’accomplissement de ses devoirs journaliers, comme de l’extérieur. Pour arriver à pratiqueraisément cet exercice, on commencera par des fractions minimes de la vie journalière. Peu à peu ondeviendra assez habile pour pouvoir accomplir en peu de temps ce travail de rétrospection dans sonintégrité. L’idéal pour l’étudiant, c’est de conserver une assurance et un calme parfaits à l’approchedes événements, et de juger ces événements non pas d’après ses dispositions propres, mais d’aprèsleur réelle importance et leur valeur objective. C’est en regardant vers cet idéal qu’il bâtira dans sonâme un fondement solide et pourra s’adonner aux concentrations et aux méditations dont nousvenons de parler.Ces, conditions sont indispensables, car les expériences supra-sensibles s’édifient sur lemême terrain que la vie psychique normale, antérieure à l’entrée dans les mondes supérieurs. Àdeux points de vue la vie supra-sensible dépend des qualités développées dans la vie normale. Sil’on ne prend garde à l’avance à faire d’un jugement sain et solide le fondement de toute disciplinespirituelle, les perceptions supérieures seront inexactes et imprécises. Les organes spirituels sedévelopperont pour ainsi dire de travers. Et de même qu’avec un œil malade et défectueux on nesaurait voir correctement le monde physique, de même on ne saurait attendre des perceptions justesd’organes développés sur la base d’un jugement faux.D’autre part, si l’on part d’une moralité douteuse, la vue spirituelle à l’entrée des mondessupérieurs est comme embrumée et stupéfiée. C’est comme si l’on observait le monde sensible dansun état de prostration. Mais dans le monde physique on ne parviendrait à aucun résultat, tandis quel’observateur spirituel, même dans un état de stupeur, est toujours beaucoup plus éveillé quel’homme normal. Aussi aboutit-il à des résultats positifs qui sont des tissus d’erreurs.1. C. F., l’Initiation.** *
<strong>LA</strong> CONNAISSANCE DES MONDES SUPÉRIEURS 119Pour consolider la connaissance imaginative, il faut compléter ses méditations ens’accoutumant à la « pensée libérée des sens ». Lorsqu’une pensée est sortie d’une observation dansle monde physique, on ne saurait dire qu’elle est pure de tout élément sensoriel. Mais il n’est pas ditque l’homme ne puisse avoir d’autres pensées. Pour l’étudiant le moyen le plus sûr et le pluspratique de s’élever jusqu’à la pensée libérée des sens, c’est de s’assimiler les enseignements del’occultisme et d’en faire la substance de sa propre pensée. Les réalités spirituelles ne sont pasperçues par les sens physiques. Avec un peu de persévérance, l’homme arrive cependant à lescomprendre. Sans une instruction spéciale on n’arrive pas à étudier par soi-même les mondessupérieurs ; mais on peut se passer de cette instruction pour comprendre tout ce que les,investigateurs racontent. Si quelqu’un objecte qu’il ne saurait accepter avec confiance desdescriptions qu’il ne peut vérifier personnellement, il erre complètement. Car il est parfaitementpossible, par la seule réflexion, d’acquérir la conviction qu’un enseignement est véridique. Et si laréflexion chez quelqu’un est impuissante à procurer cette conviction, cela ne vient nullement de cequ’on ne peut croire à une chose que l’on ne voit pas, mais uniquement de ce que la réflexion amanqué de sincérité, d’ampleur et de profondeur.Pour éclairer ce point, il faut se représenter que la pensée humaine quand elle se stimuleénergiquement elle-même, peut saisir bien davantage que le domaine qui lui est d’ordinaire attribué.La pensée recèle un être intérieur en correspondance avec le monde hyperphysique. L’âme neperçoit pas habituellement cette correspondance parce qu’elle est accoutumée à n’appliquer safaculté de penser qu’au monde physique. Aussi tient-elle pour inintelligibles les communicationstirées des mondes supérieurs. Or ces mondes sont parfaitement compréhensibles non seulementpour une pensée disciplinée à l’école de l’occultisme, mais encore pour toute pensée humaine quisait éveiller la totalité de ses forces et les utiliser consciemment.En s’appropriant ainsi sans cesse ce que l’occultiste enseigne, on s’accoutume à des penséesqui ne sont pas fondées sur la perception des sens. On apprend à connaître comment se tissent dansl’âme les séquences de pensées, comment les pensées se cherchent pour s’associer, et cela sans quela puissance des sensations y soit pour rien. L’essentiel est de bien ressentir que le monde de lapensée est animé d’une vie propre, que, quand on pense, on dispose d’une puissance vivante venuedes mondes supra-sensibles : On se dira : « Il y a en moi comme un organisme fait de pensée : or jesuis un avec cet organisme. » En se plongeant ainsi dans la pensée libérée des sens, on prendconscience d’une essence qui coule dans notre vie intérieure, de même que par les organes des sensse déversent en nous les propriétés des objets extérieurs que nous percevons. « Là, en dehors demoi, dans l’espace, se dira l’observateur du monde sensible, il y a une rose : je ne saurais direqu’elle me soit étrangère, puisqu’elle se révèle à moi par son parfum et sa couleur. » Il suffit d’êtresincère, et de cultiver la pensée libérée des sens, pour en arriver à se dire également : « Une essencese manifeste à moi qui associe les pensées entre elles et qui en compose un véritable organisme. » Iln’y a entre les deux activités qu’une différence : l’observateur a conscience que la rose est endehors de lui, le penseur libéré des sens éprouve que l’essence mentale est en lui, une avec lui.Celui qui plus ou moins consciemment n’accorde la réalité essentielle qu’aux choses extérieures, nepourra avoir le sentiment qu’une chose peut être réelle et se révéler à lui en formant une unité avecsa propre conscience. Pour discerner la vérité dans cette question, il faut réaliser l’expériencesuivante. Il faut distinguer entre les associations d’idées que l’on crée arbitrairement et celles donton est conscient quand on a imposé silence à toute volonté personnelle. Dans le dernier cas on peutse dire : « Je fais régner en moi un parfait silence et je ne provoque aucune association d’idées, jem’abandonne à ce qui pense en moi. » Il devient logique alors de conclure : « Il y a un être en soiqui agit en moi », comme il est logique de conclure : « Je suis impressionné par une rose », lorsquel’on perçoit une couleur et un parfum déterminés. Il n’y a nulle contradiction à tirer des